À chaque année, les mois de Ramadhans se suivent et se ressemblent. Comme de coutume, les frasques sont nombreuses sur la scène incroyable du pays. Il ne s’agit pas d’évoquer ici toutes les singularités de ces jours-ci mais celles qui ont retenu le plus l’attention de l’actualité de ce début du Ramadhan 1431.
Sacrée viande indienne !
La première étrangeté au hit-parade ramadhanesque de cette année figure en premier lieu la viande rouge indienne qui a défrayé la chronique quoiqu’elle ne soit pas encore apparue de façon générale dans les marchés du pays alors qu’elle devait être sur les étals des boucheries avant le début du mois sacré.
Pour faire avaler allègrement la pilule, tout le monde s’est mis au service de cette chair qui n’a pas encore fini de nous divulguer tous ses secrets.
L’institut Pasteur a analysé et décortiqué anatomiquement les cellules de cette viande bovine alors que le ministre des Habous a opposé sa fetwa sur le label halal du produit. Il ne reste que la ménagère pour nous distiller son avis sur son goût et sur ses recettes culinaires.
A défaut d’une production locale suffisante malgré l’effacement de la dette aux éleveurs et un record céréalier en deux saisons consécutives, l’Algérie barbote à instituer les issues pour l’approvisionnement régulier de son marché intérieur. Voilà où nous en sommes, des lacunes non résolues qui s’empirent et qui s’entassent à profusion sur le bureau des différents locataires qui ont occupé successivement le ministère de l’agriculture. Les citoyens sont, entre le marteau et l’enclume, pris dans l’engrenage d’une part des éleveurs et de l’autre des exportateurs.
A chaque fois, c’est le même refrain usé qui résonne dans nos oreilles. Un vieux discours à faire fuir l’ancêtre des optimistes. Le problème perdure et persiste depuis des décennies. Rappelons-nous les péripéties de l’histoire du mouton ramené vif d’Australie. C’est toujours la même chronique « moutonnienne » qui revient à la charge. Alors qu’il se trouve des citoyens allergiques à cette viande, il existe d’autres qui l’attendent avec impatience, surtout les bourses moyennes. Quant au reste des rescapés et pour les plus chanceux parmi eux, ils n’espèrent même pas se rabattre sur les abats du poulet.
La lutte des sœurs Sultana et YAMINA contre la faim
En parcourant la une du journal d’Echorouk en ce matin du Lundi 16 août 2010, un article poignant m’a laissé perplexe, triste et choqué à la fois. Je sais que ce n’est pas un fait rare dans le pays où la pauvreté ne cesse malheureusement de gagner du terrain dans beaucoup de foyers. La fierté et la dignité de ces dénués leur interdisent d’étaler au grand jour leur vécu à la grande quiétude des autorités. Ces derniers ont d’autres chats à fouetter dans leur cage dorée. La plèbe n’a qu’à se débrouiller toute seule.
En effet, deux femmes sœurs vivant sous le même toit dans la wilaya de Mila ont reçu la visite d’un journaliste de ce quotidien au moment de la coupure du jeun. Là, photos à l’appui et en flagrante condition, le reporter n’a trouvé, sur leur meïda, qu’un morceau de pain agrémenté d’un petit plat de résistance en couscous sec et de quelques figues de barbarie en guise de dessert qu’elles ont cueillies aux alentours malgré leur total handicap physique. Un menu à faire sangloter le moins sensible des algériens. Certainement les voisins de cette démunie famille sont dans la même situation. A la vue de cette scène impitoyable, l’appétit nous sera automatiquement coupé si nous possédons un authentique cœur humain.
SOURIEZ MESSIEURS ! vous Êtes flashés
Paradoxalement et pour faire beaucoup plus dans le tapage médiatico-politique, on nous exhibe à la télévision tous les soirs dans le JT de 20h un défilement de ces restaurants de la Rahma à faire envier un modeste fonctionnaire. Quelque que soit le nombre de restaurants ouverts en cette circonstance, cela ne signifie absolument rien tant que les responsables concernés ne communiquent pas le chiffre réel des familles qui nécessitent de l’aide à travers tout le territoire national. Si cette famille de Mila s’en trouve oubliée ou exclue de la liste, cela démontre que le mal est plus profond que ce que l’on pense. Le plus comble dans l’affaire, c’est lorsqu’on voit un ministre accompagné du Sg de l’Ugta partager le ftour avec ces catégories devant les caméras de la télévision et en guise de show des interviews à la clé. On aurait aimé les voir frapper hasardement à la porte de ces deux misérables femmes de Mila que sont Sultana et Yamina, assises à même le sol et s’apercevoir de quoi elles se nourrissent pour rompre le carême. Les pauvres, il faut les chercher partout et taper à leur porte. Ils ne résident pas que dans les grandes villes. Les dechras, les mechtas, les douars et les petites localités sont pleins à craquer. Ils ne connaissent ni le yaourt, ni le fromage et encore moins la banane. Ils ne subsistent que du pain sec lorsqu’ils arrivent à le dénicher. Honte à nous et à l’Algérie des 140 milliards de Dollars et des 386 Milliards de l’actuel plan quinquennal. La pauvreté fait encore des siennes après 48 années d’indépendance.
Les SOUVERAINS deS Souks
Le débat sur la cherté de la vie, s’il c’en est un en ces temps de sevrage, n’en finit pas de faire couler beaucoup d’encre et de salive. Au niveau régional, l’Algérie devient le dépotoir de tout ce qui est importable. Pardon, j’allais l’oublier et cela ne se trouve nulle part, l’Algérie exporte en permanence et exclusivement à nos voisins par la force des trabendistes du cheptel. En contrepartie, elle ne perçoit aucun centime sur la transaction, c’est le dindon de la farce de l’opération.
D’autre part, les citoyens, subissent la mort dans l’âme, le diktat de commerçants avides de gains faciles et rapides en ces moments de piété et de ferveur. Il faut ramasser le plus de pognon possible, semble être le leitmotiv favori bien avant Ramadhan. Ils le préparent minutieusement à leur manière.
QUELLE BOURSE ?
Le poulet avait déjà pris des ailes en commençant son ascension fulgurante en sonnant l’alarme à une vingtaine de jours avant le jour j à raison d’une augmentation furtive de 10 à 20 DA la journée. Qui dit mieux ! Plusieurs causes ont été soulignées. Les uns les mettaient sur le dos du stockage de cette viande prisée par les algériens à défaut de viande rouge intouchable pour une grande majorité d’entre eux. Les autres s’appuyaient sur la faible production en ces périodes de grandes chaleurs. Wall Street ne pourra jamais élucider les dessous de notre marché. C’est peut-être la raison pour laquelle on n’entend plus parler de la bourse d’Alger sauf le jour de son inauguration annoncée en son temps à grandes pompes.
Mais que fait-il donc le gouvernement qui, à longueur d’années, nous remâchent des chiffres à faire tourner la tête et patati patata ? A la fin des courses, c’est le gros parrain des souks aidé de ses lieutenants régulent et maîtrisent la mercuriale comme il l’entend suivant leurs intérêts au grand dam des responsables du secteur qui assistent les mains et les pieds liés, prisonniers d’un système qu’ils ont enfanté et alimenté. Le virtuel est à l’état, le palpable est à la pègre. Le marché des fruits et légumes comme celui des abattoirs leur dépendent à 100%. Ce sont leurs acquis. Le gouvernement ne joue presque que le rôle de l’observateur amorphe, laissant le consommateur à la merci de ces puissants nababs.
C’est une vraie course à la montre. Le mois divin est surtout celui des affaires commerciales qui rapportent gros. Les affaires spirituelles sont du seul ressort du ministère des affaires religieuses comme on va le rappeler un peu plus bas. Et puis, il faut en profiter davantage. Le citoyen, est à saigner au maximum. Pas le moindre souffle de respiration. Il faut l’oxygéner à petite dose en se servant de ces chambres froides acquises encore aux frais du trésor public. Nos heureux prospères étalent leur mainmise totale sur la totalité du commerce et manipulent le marché à leur guise et en toute liberté d’action selon leur stratégie. Les pouvoirs publics ne servent qu’à pondre des lois vite mises hors-jeu. Nous sommes à leur merci. Ils vivent en toute impunité, en méprisant l’état du journal officiel de la RADP. Aucune théorie commerciale ne peut expliquer un surcoût de la viande blanche de 75% environ en un soupçon de temps ! Il n’y a que dans les pays qui ne maîtrisent en rien les données que ceci puisse y arriver à l’image du nôtre. Le citoyen n’est pas prêt d’en finir avec ses déboires.
Coucou ! Êtes-vous lÀ ?
Quant aux associations de la défense des consommateurs qui pullulent dans toutes les wilayate, elles rasent les murs au moment où les citoyens en ont le plus besoin de leurs voix. Par l’ombre d’une déclaration ou d’un banal communiqué dans la presse pour défendre ceux par qui ils doivent en principe leur existence. Si elles réagissent, ce n’est qu’après que la bête ait pris tout le monde à la gorge. Pauvre consommateur.
ET Les Taraouih …
Le second fait insolite est cette sortie cathodique du ministère des affaires religieuses qui somme les imams à écourter la prière des «Taraouih» ! Je me suis tourné la tête pour tenter de comprendre si cette attitude est la priorité principale du ministère. Est-ce une revendication et une demande express des fidèles ? Certes, certains imams font durer les prières au dessus de la normale mais ce n’est pas un phénomène général. Et puis d’abord, est-ce une obligation ? On peut l’accomplir dans la position assise ou suivant l’incapacité du fidèle. C’est une inconvenance, si elle existe vraiment, peut être résorbée au cas par cas entre chaque imam et les fidèles du lieu du culte. Comme en Algérie, on peut repérer au moins une mosquée dans chaque quartier, on peut se pencher vers la mosquée selon la durée de la prière. Il se trouve qu’il y a des mosquées où on abrège les prières comme celles où on les rallonge d’une vingtaine de minutes au maximum.
Ce ministère aurait concentré ses efforts en coordonnant avec son gouvernement à s’attaquer aux problèmes de la spéculation qui sévit sur les produits alimentaires pendant ce mois sacré ou comment éduquer les citoyens à ne pas jeter leurs poubelles n’importe où. Il peut aussi aborder le péril de la corruption qui mine le pays ainsi que les maux de l’environnement, causant d’énormes dommages dans les cités. Inculquer également aux fidèles à ne pas déraciner un arbuste, en prendre soin similairement à un bébé en croissance.
Les idées de ce type sont nombreuses en plus de l’aspect spirituel comme la prière des Taraouih dont le réconfort moral et spatial à quatre dimensions est indéniable pour oublier et atténuer un tant soit peu nos malheurs marchands de la journée.
En persistant à rêver de l’éradication de ces insolites qui ne cesse de se métamorphoser en chaque Ramadhan et qui n’en finissent pas de nous faire souffrir, Saha Ftorkoum.
19 août 2010
Contributions