Edition du Mercredi 11 Août 2010
Des gens et des faits
“L’inacceptable cause”
La nouvelle de Adila Katia
Par : Adila Katia
Résumé : Kahina aperçoit son fils mais la foule les sépare. Les cris d’une femme de son âge donnent raison à son cœur. Personne n’a le droit de leur prendre leurs enfants. C’est un miracle qu’ils aient échappé aux terroristes. Les mots d’ordre sont criés très fort, pour être entendus par le pouvoir et plus haut encore…
18eme partie
-Sami ! Où est-ce que tu peux être ?
Kahina allait d’une fenêtre à une autre, regardant ces jeunes en colère qui s’en prenaient aux édifices étatiques, cassant les vitres de la poste, secouant à faire tomber les plaques de signalisation et d’orientation. C’était tout ce qu’elle pouvait voir de chez elle, et cela la met en feu. Elle ne tient plus en place tant elle avait peur, tant elle était inquiète pour son fils. Des questions venaient la torturer. Est-il parmi les casseurs ? Est-il en train de tenir tête aux forces de l’ordre ?
La mère a l’impression que son cœur s’est arrêté de battre quand elle entend des coups de feu. Elle reste figée par la peur. Elle ne pouvait pas s’empêcher de penser au jeune Massinissa et d’imaginer que son fils était peut-être blessé, ou même mort. Ces coups de feu ont-ils été tirés en l’air ou sur des manifestants ? Comment le savoir ?
Lorsque le téléphone sonne, elle ne réagit pas tout de suite. Ce n’est qu’à la cinquième sonnerie qu’elle va décrocher. Heureusement que Tahar avait patienté. Car c’était de nouveau lui.
- Sami est là ? Qu’est-ce qui se passe ?
- Rien, enfin, mais je ne sais pas, je suis à la maison. Il se passe des choses dehors. Mais je ne sais pas quoi. J’ignore où est Sami.
Des tirs au loin lui coupent de nouveau le souffle. Tahar ne supporte pas son silence. Il sait que la situation est grave mais la route nationale n° 5 est coupée. La circulation ne reprendra que lorsque les manifestants le voudront. Ces derniers avaient brûlé des pneus, dressant ainsi des barricades de feu. Ceux qui oseraient tenter de traverser ne seront pas surpris de recevoir des pierres sur leurs véhicules. Tahar ne pouvait pas prendre le risque de voir le semi-remorque brûler parce qu’il était pressé de rentrer à la maison. Il devait rester lucide et consciencieux, même si son cœur était auprès de sa famille.
- Tu fermes les volets, lui recommande-t-il. N’ouvre pas aux gens que tu ne connais pas. Les voyous du quartier vont peut-être en profiter pour voler et se faire un peu d’argent. Dès que Sami rentre, ne le laisse plus sortir.
- Je ne crois pas qu’il m’écoutera, murmure Kahina. Je ne pense pas qu’il va rentrer. C’est tout un groupe d’étudiants qui manifestent. Ils sont en train de répondre aux provocations des forces de l’ordre. La marche s’était bien passée. Pourquoi s’en prendre aux enfants pour prouver qu’ils sont les plus forts ?
- En tout cas, si cela peut te consoler, c’est ainsi dans tous les villages kabyles. Tous protestent. Je ne peux que comprendre Sami, même si j’ai peur pour lui.
- Tout à l’heure, j’ai marché, confie-t-elle à son mari. Il y avait beaucoup de femmes. On a toutes crié notre peine, notre douleur et surtout notre refus. Ils n’ont pas le droit de tirer sur nos enfants. C’est tout ce qu’on a. Pourquoi nous prendre ce que Dieu nous a donné ?
- Je suis fier de toi Kahina.
Tahar n’en ajoute pas plus. Il entend nettement des coups à la porte d’entrée, puis la sonnette insistante. Kahina ne raccroche pas. Elle se dirige vers la porte d’entrée, toujours secouée par les coups. Elle n’ose pas ouvrir, même si elle se demande qui est-ce…
à suivre
A. K.
12 août 2010
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