Edition du Lundi 09 Août 2010
L’Algérie profonde
Même les mendiantes sont dépouillées…
Noir Et Blanc
Par : Mustapha Mohammedi
Ce qui n’était qu’un terrain vague, longtemps convoité par les chacals du foncier et les promoteurs de l’immobilier, est devenu une magnifique mosquée.
Grâce à la générosité de quelques fidèles et surtout la volonté d’un industriel de Bir El Djir qui a fait fortune dans le fromage. Construit en un temps record, ce masjed a la particularité d’être situé dans un emplacement exceptionnel, en plein centre-ville, en bordure pratiquement de l’avenue Ben M’hidi, juste en face du lycée Lotfi. On ne peut pas le rater. Des vieilles femmes en situation très précaire ont pris l’habitude d’occuper les marches du parvis pour demander l’aumône à la sortie de chaque prière. Quelques-unes viennent des quartiers pauvres de Saint-Pierre et de Victor-Hugo, d’autres de beaucoup plus loin, des nouveaux douars qui ceinturent la ville. De nouvelles têtes en quête de charité se mêleront de temps en temps au groupe pour tenter leur chance mais disparaîtront aussitôt. Et à force de se côtoyer, les pauvres mamies ont fini par se connaître et par se faire des confidences et même par saluer les habitués les plus assidus par leur prénom. Deux événements vont pourtant casser le ronron de cette communauté. Le premier viendra sous les traits d’un richissime homme d’affaires. Pris de pitié pour la plus démunie d’entre elles, il lui offrira un gros chèque — certains prétendent un très gros chèque — à la condition de ne plus la voir traîner dans les parages. Et effectivement, on ne la reverra plus dans le quartier. Le second, malheureusement, se pointera sous le masque d’un philanthrope. Sous prétexte que sa belle-mère avait besoin de monnaie pour distribuer dans les mosquées et qu’elle l’attendait cinquante mètres plus loin, il arrivera à soutirer aux septuagénaires crédules toutes leur pièces en attendant de leur ramener des billets. Lui non plus personne ne le reverra. Les victimes aussi. Elles se sont définitivement dispersées.
9 août 2010
M. MOHAMMEDI