Le nouveau président élu colombien Juan Manuel Santos, qui entrera en fonction début août, risque d’étrenner son mandat avec une guerre à la clef entre son pays et le Venezuela voisin.
Les relations entre la Colombie et ce dernier pays sont en effet à l’épreuve d’un pic de tension qui peut donner lieu à un dérapage de ce genre. Ce n’est certes pas la première fois que les rapports entre la Colombie et le Venezuela se tendent. Le président colombien sortant, Alvaro Uribe, ultralibéral et proaméricain déclaré, et son homologue vénézuélien Hugo Chavez, socialisant et anti-étasunien militant, ne se portent aucune estime et utilisent le moindre prétexte pour chacun démarquer son pays de l’autre.
Néanmoins, les deux hommes d’Etat ont su jusque-là confiner leurs divergences dans des limites gérables. Ce qui ne semble plus être le cas pour la crise qui vient d’éclater entre leurs deux pays. En réplique aux accusations de soutien à la guérilla des Farc portées contre son pays auprès de l’Organisation des Etats américains (OEA) par la Colombie, le président Chavez a non seulement décidé la rupture diplomatique avec Bogota, mais aussi placé en état d’alerte maximum l’armée vénézuelienne. Les ennemis de Chavez, et ils se comptent nombreux, ne verront dans sa réaction que la preuve de son imprévisibilité et de sa dangerosité pour la paix et la stabilité en Amérique latine.
Mais il faudrait qu’au préalable ils expliquent pourquoi le président colombien sortant, Uribe, a fait porter les accusations en questions seulement à quelques jours de son départ de la présidence du pays.
Ce n’est pourtant pas d’aujourd’hui que les autorités colombiennes soupçonnent celles du Venezuela d’apporter leur soutien aux Farc. Le timing de la sortie colombienne nous semble avoir été arrêté dans l’intention de placer le nouveau président élu du pays devant un «héritage» qu’il ne pourra renier.
Santos, qui remplace Uribe en début août, a été, en tant que ministre de la Défense de celui-ci, au cœur des crises précédentes ayant opposé la Colombie au Venezuela. Il est crédité de vouloir continuer la politique de son prédécesseur tant au plan économique qu’à l’égard de la guérilla des Farc. Mais sans forcément continuer la farouche confrontation que Uribe a eue avec le président vénézuelien.
Rien ne dit que le président colombien sortant n’a pas été poussé à allumer la mèche d’un conflit entre les deux pays et passer ce cadeau empoisonné à son successeur. Car il faut bien admettre que la chute ou la disparition d’Hugo Chavez est ce que Washington rêve de voir se réaliser. Une guerre dans ces conditions qui pourrait le concrétiser n’est pas pour déplaire à son establishment.
Au nouveau président élu colombien, il va falloir doigté et diplomatie pour calmer le jeu entre Caracas et Bogota, s’il ne veut pas ouvrir sa présidence par un conflit armé dont les véritables bénéficiaires se fichent de ce que veulent ou pensent les peuples colombien et vénézuélien.
24 juillet 2010
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