L’APS (Algérie presse service) a fait état des propositions algériennes présentées à la Conférence internationale sur la tolérance et la non-discrimination, conférence qui s’est tenue à Astana (Kazakhastan). La délégation algérienne, conduite par Cheikh Bouamrane, «a préconisé l’élaboration de deux mesures pour combattre l’islamophobie ». La première consiste à former les enfants, de l’école primaire à l’université, à la compréhension de l’Islam, en leur présentant une image exacte de cette religion.
La seconde «consiste à élaborer une législation qui réprime les blasphèmes contre l’Islam et éventuellement contre les autres religions». Soit. Encore faut-il commencer par balayer devant notre porte afin que «les autres», les «roumis», nous respectent. Des faits ! Que penser, par exemple, de ces imams qui ont refusé de se lever au moment de l’hymne national ou de ces ingénieurs qui ont fait de même lors de la cérémonie de fin de promotion ? Ces faits en disent long sur les dégâts que provoque déjà ce salafisme dit scientifique (et soi-disant modéré) sur une partie des jeunes, un salafisme encouragé par les pouvoirs publics ! Des faits qui, heureusement, contrastent tout de même avec ces images de centaines de milliers d’Algériens sortis dans la rue emblème national au vent à l’occasion des matchs de Coupe du monde ! Pour en revenir au sujet qui nous concerne – balayer devant notre porte – je l’ai déjà évoqué dans une chronique parue dans le Soir d’Algérie en mars 2006 à propos des attentats-suicides ciblant des civils et revendiqués par les salafistes djihadistes en Irak et chez nous. Je relevais que de tels actes n’avaient suscité aucune condamnation de la part de l’Islam sunnite officiel dans le monde arabe et musulman. Pas plus d’ailleurs qu’on a entendu la moindre condamnation de nos religieux à propos des attentats-suicides d’avril et de décembre 2007 à Alger, ni non plus au sujet de toutes ces attaques de l’ex-GSPC ayant provoqué la mort de centaines de jeunes militaires. Les a-t-on entendus appeler les populations à manifester contre le terrorisme islamiste au plus fort des années noires en Algérie ? Jamais ! Autrement, ça se serait su et on l’aurait écrit (moi le premier!) dans les journaux dans lesquels on travaillait ! En revanche, les prêches fustigeant la presse indépendante et les démocrates laïques n’ont pas manqué ! Et ces islamistes, dont des imams, qui étaient derrière le lynchage des femmes de Hassi-Messaoud, ont-ils été condamnés par nos religieux institutionnels, ont-ils été poursuivis en justice ? La réalité est là : nos religieux institutionnels et les autres si prompts à élever la voix et à jeter l’anathème contre les journalistes ou les femmes qui revendiquent leurs droits, si prompts à exiger l’interdiction d’émissions de télé soi-disant contraires aux valeurs de l’Islam, ces religieux-là savent observer un silence pieux dès lors qu’il s’agit d’actes commis par les islamistes djihadistes ou par des fanatiques poussés par les tenants du salafisme dit scientifique (essalafia el-ilmiya). Or, c’est ce silence des religieux (mais aussi de nos dirigeants) face à des actes innommables commis au nom de l’Islam, par des groupes qui revendiquent haut et fort leurs crimes, c’est l’absence de condamnation de tels actes, qui font que les populations des pays développés ont une image négative des musulmans. En outre — et ce sera le mot de la fin — interdire la libre confrontation des idées dans nos pays, verrouiller le champ médiatique et politique, jeter l’anathème sur ces penseurs musulmans qui luttent pour un islam des lumières comme Ghaleb et Soheïb Bencheikh, qui militent pour une sécularisation du religieux, voire pour une séparation du religieux et du politique, donne également de nos pays et de l’Islam une image négative bien réelle.
Par Hassane Zerrouky
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2010/07/08/article.php?sid=102698&cid=8
8 juillet 2010
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