Saâdane et ses joueurs sont repartis, mais les couleurs algériennes sont toujours en Afrique du Sud. Ce qui prouve que si nous fêtons les demi-victoires inespérées, tels les matchs nuls, nous savons aussi nous consoler, en ne quittant pas la fête. L’entraîneur est déjà passé à autre chose : il nous dit d’attendre 2014, c’est-à-dire la prochaine, pour avoir une équipe compétitive.
À condition que nous puissions nous qualifier, bien sûr, et nous aurions une chance si nous devions affronter l’Égypte en match d’appui. Si je résume bien la pensée de Saâdane, il y a 24 ans, nous avions une attaque et pas de défense. Nous n’étions pas immunisés, aussi, contre «l’altitude, ya Cheikh !» et contre les querelles internes. En 2010, en Afrique du Sud, nous avons présenté une défense de fer, mais une attaque en papier. C’est normal de ne pas avoir d’attaquants pour marquer des buts, lorsqu’on joue pour ne pas perdre. C’est ce que nous avons fait depuis que Saâdane est à la tête de l’équipe nationale, et c’est ce que nous ferons, s’il gère les choses de la même manière. Dans ce cas, il faudra peut-être attendre vingt-quatre ans avant d’avoir une nouvelle chance. Vingt-quatre ans à ravaler nos frustrations, à disserter sur les occasions perdues et les choix hasardeux. Au bout de ce presque quart de siècle et à ce moment-là seulement, nous redescendrons tous dans la rue. Nous célébrerons la qualification contre l’Égypte, qui nous bat régulièrement en Coupe d’Afrique. Nous acclamerons les artisans de ce succès historique, avec à leur tête notre grand timonier, pour qui nous demanderons un nouveau mandat, pour services à venir. Et nous invoquerons encore les mêmes excuses pour justifier nos tâtonnements et nos turpitudes. Oui, comme en 1982, nous avions une équipe capable d’aller plus loin, mais…, et puis, cessons de crier partout que Saâdane a construit un groupe. Cette équipe existe, aussi et surtout, grâce au dévouement de personnes qu’on ne voit pas dans les tribunes ou sur le banc, mais qui ont été d’une redoutable efficacité au niveau de la prospection. J’espère que ceux qui écriront l’histoire de cette épopée inachevée leur rendront justice en temps opportun. Nous avons donc quitté, à regret, la Coupe du monde et le pays organisateur. Parmi les échos et les images qui nous parviennent, j’ai retenu, d’abord, le geste de ce supporter(1) passant le drapeau algérien autour du cou de Bill Clinton. Cela prouve qu’en dépit de la Palestine, de l’Irak et de l’Afghanistan, nous ne sommes pas rancuniers. Nous referons le même geste avec Obama, qui est en train de nous rouler dans la farine israélienne, quand il ne sera plus président. C’est fou, ce qu’ils peuvent nous aimer ces ex-présidents américains, dès qu’ils ne sont plus aux affaires ! La deuxième image, qui circule par courriels, est celle de ce supporter algérien se ruant sur un Egyptien, qui avait eu la méchante idée de danser, drapeau d’Égypte, en main, pour applaudir le but slovène( 2). J’aurais aimé que le bouillant Saïfi, connu surtout sur les terrains pour polémiquer avec les arbitres, se frotte à un homme comme celui qui a assommé le supporter égyptien. Au lieu de cela, il s’est attaqué à une consœur de la presse sportive, s’attirant les foudres des médias occidentaux et des citoyens algériens révoltés, notamment sur le Net. Or, que nous dit le quotidien Al- Khabar à propos de l’éviction de Saïfi de l’équipe nationale ? Que sa radiation des effectifs serait due, comme pour les deux autres joueurs rayés des cadres, à son âge avancé. Oui : Saïfi est trop vieux pour jouer encore en équipe nationale, et c’est son âge avancé qui expliquerait l’absence de sanctions disciplinaires pour agression contre une journaliste. Cela dit, des témoins de l’altercation rapportent que notre brave (fahla en V.O) consœur aurait réagi en ne tendant pas la joue gauche, mais en souffletant, à son tour, le paltoquet. J’aurais aimé qu’elle en fasse plus, qu’elle lui casse les quelques dents qui lui restent et qu’elle lui donne un coup de pied là où sa virilité, ou ce qui en tient lieu, est offensée. J’espère que seulement que les officiels qui ont accueilli l’équipe nationale, à son arrivée à Alger, auront traité Saïfi comme il le méritait, en l’ignorant. Sinon, ce serait à désespérer de leur humanité, et les épouses respectives de ces dirigeants devraient en tirer toutes les conséquences. A ce propos, voici enfin une bonne nouvelle pour les épouses de dignitaires, confrontées aux galipettes maritales, avec des versions inédites de la polygamie. Ces infortunées épouses croyaient avoir mis fin aux infidélités de leurs maris, en acceptant de légaliser leurs relations conjugales(3). Mais bas-ventre affamé n’a point de conscience, et les maris pieux, mais trop humains, ont inventé d’autres mariages, comme le «mariage touristique» sunnite. Comme les autres types de relations charnelles qui empruntent, allègrement, au «mariage de jouissance » chiite, le «mariage touristique » se pose à chaque saison estivale. Un théologien saoudien s’est ému de cette situation et se propose de l’interdire par prescription religieuse. A voir les arguments développés, il s’agit surtout de décourager cette pratique, largement répandue chez les estivants saoudiens. D’ailleurs, tout le monde sait qu’en dehors de cas rarissimes, les «touristes» qui viennent en Arabie saoudite ne sont pas là pour l’«exultation» des corps, mais pour la paix de l’âme. La paix de l’âme, ils l’ont à demeure les citoyens saoudiens, et il est normal qu’ils aillent chercher ailleurs celle des sens. Eux, ils ont compris depuis longtemps que certains plaisirs charnels ne peuvent être assurés qu’ici-bas, même s’ils contribuent volontiers à accréditer le mythe des 72 Houris du paradis. A l’encontre de ces idées reçues, un «cheikh» saoudien, Anour Madjed Achki, a affirmé la semaine dernière que «le sexe n’existait pas au paradis». C’est donc un véritable leurre que les propagateurs de l’existence des 72 Houris font miroiter devant les candidats aux attentats-suicides. Voilà pourquoi, Mesdames, vous êtes condamnées à subir des maris polygames, tant que vous ne vous déciderez pas à rejeter la fatalité des «4 Houris» terrestres. Vous devez être d’autant plus motivées pour dire non, que vous n’avez aucun espoir de revanche, c’est ce que vous disent les textes.
A. H.
(1) Les images défilant très vite, je ne sais plus s’il s’agit d’un ou d’une supporter. Mais, comme la presse et les sites islamophiles n’ont pas crié au scandale, j’en conclus que c’est un homme et non une femme qui a offert le drapeau à Bill Clinton. Cela dit, je comprendrais qu’une de nos belles supportrices soit tentée de braver nos censeurs. (C’est curieux : le logiciel de traitement de texte Word accepte sans ciller le mot «islamophobe», mais réagit au mot «islamophile», comme si c’était une faute d’orthographe).
(2) Cela dit, il faut rendre cette justice à la presse égyptienne qui ne s’est pas attardée sur notre élimination prématurée. Bien plus : à la veille de l’entrée en lice de l’Algérie, des éditorialistes ont appelé à soutenir notre équipe nationale. Ils ont insisté évidemment sur le fait que cette équipe représentait aussi les pays arabes, mais ça, c’est une maladie égyptienne et il faut vivre avec.
(3) J’ai entendu sur une chaîne satellitaire une épouse algérienne, avocate de surcroît, soutenir qu’elle préférait voir son mari épouser ses maîtresses, plutôt que de supporter ses relations illégitimes.
Quelle brave dame !
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2010/06/28/article.php?sid=102190&cid=8
28 juin 2010
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