Contre toute attente, cinq jours après l’élimination de l’Algérie de la Coupe du monde, la question de la succession de Rabah Saâdane n’est toujours pas tranchée. Comme nous l’avions révélé vendredi, Mohamed Raouraoua, président de la FAF, a discuté avec le sélectionneur avant le retour des Verts à Alger et lui a proposé de rester à la tête de l’équipe nationale. Saâdane n’a pas donné sa réponse. Il a demandé un temps de réflexion. Les choses devraient toutefois se préciser cette semaine.
Cette position du président de la FAF ne semble pas liée aux résultats de l’équipe nationale au Mondial. Certes, le parcours des Verts n’a pas été chaotique mais il est loin d’être brillant : l’Algérie est la seule équipe avec le Honduras à ne pas avoir inscrit le moindre but dans cette compétition. Le choix de la FAF semble en réalité répondre plus à des considérations politiques. Le président Bouteflika, qui n’a pas adressé le moindre message de soutien à l’équipe nationale, est en colère après les performances des Verts. Et personne, ni le président de la FAF ni le ministre de la Jeunesse et des Sports, ne veut aujourd’hui prendre la lourde responsabilité de limoger Saâdane pour le remplacer par un autre sélectionneur au risque de faire les frais de mauvais résultats lors des prochains éliminatoires de la CAN 2012 qui débutent en septembre prochain.
Mais le choix de maintenir Rabah Saâdane est-il bon pour l’avenir de l’équipe nationale ? Certes, Saâdane a eu des résultats positifs depuis qu’il a repris en mains la destinée des Verts en octobre 2007. Une double qualification au Mondial et à la Coupe d’Afrique des nations 2010, une qualification en demi-finale de la CAN et une élimination pas trop humiliante au premier tour du Mondial. Mais ce parcours ne doit pas cacher les véritables lacunes du sélectionneur national qui le disqualifient pour mener les Verts vers de nouvelles aventures.
L’une des principales qualités recherchées chez un entraîneur et un sélectionneur est incontestablement sa capacité à diriger les hommes. Sur ce plan, Rabah Saâdane a montré des faiblesses. Il y a par exemple la sélection de Saïfi et de Ghezzal au Mondial. Le premier est un joueur en fin de carrière, usé et manquant de discipline sur le terrain et à l’extérieur. Il a été chassé en janvier d’un club qatari en difficulté puis accueilli comme remplaçant au sein d’Istres, la lanterne rouge du championnat français de seconde division. Ghezzal, qui n’a marqué que 3 buts en 20 sélections – presque toutes en tant que titulaire, a intégré l’équipe nationale presque en même temps qu’il a intégré Sienne (Série A) en Italie, sa première expérience avec l’élite du football en Europe.
Sur ces deux joueurs, Rabah Saâdane n’a à aucun moment tenté de corriger le tir, en testant d’autres attaquants. Mais le sélectionneur national et ses adjoints ont-ils réellement les capacités de détecter des talents ? Un exemple illustre parfaitement cette lacune dans le suivi des talents algériens évoluant à l’étranger : le gardien Raïs M’Bolhi. Le gardien du Slavia Sofia a été signalé au sélectionneur national il y a plus d’un an. Mais Rabah Saâdane n’a rien voulu savoir, continuant à maintenir sa confiance à Gaouaoui puis à Chaouchi, deux gardiens certainement talentueux mais aux performances aléatoires. Saâdane a changé d’avis quand Alex Fergusson, entraîneur du prestigieux Manchester United, décide de tester M’Bolhi pour un éventuel recrutement. Et encore : il a fallu attendre une bourde monumentale de Chaouchi contre la Slovénie suivie de sa blessure en entraînement pour voir le sélectionneur national donner enfin sa chance à celui qui allait figurer dans l’équipe type du premier tour désignée par la FIFA.
Mais la gestion des hommes n’est pas la seule lacune du sélectionneur national. Depuis la nomination de Saâdane en octobre 2007, l’équipe nationale souffre d’une instabilité tactique évidente. Résultat, une équipe capable de tenir tête aux Anglais et de battre la Côte d’Ivoire mais humiliée par le Malawi et malmenée par la Slovénie. Autre illustration de ces errements tactiques du sélectionneur : sa décision d’écarter d’un seul coup six joueurs en mars dernier après la campagne de qualification au Mondial et la CAN et à trois mois du Mondial. Et plus de deux ans après sa désignation à la tête des Verts, Rabah Saâdane n’a toujours pas d’équipe type.
Aujourd’hui, la réaction positive des supporters après l’élimination des Verts ne doit pas être interprétée comme un soutien à Rabah Saâdane. Les Algériens comprennent certes qu’on ne pas construire une grande équipe en seulement quelques mois. Mais la reconstruction doit être plus rapide surtout avec une génération aussi talentueuse. Il est temps que l’Algérie se donne les moyens de ses ambitions : se hisser parmi les meilleures équipes africaines et pour longtemps.
27 juin 2010
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