Ici et ailleurs, on nous regarde comme on ne regarde plus rien nulle part. Des sans-droits. Des sans-vie. Des non-sens. Et les non-sens, ça perturbe un peu la quiétude des seigneurs de la terre, qu’ils soient ici ou ailleurs. Qu’on nous balance dans un oued, qu’on nous tire une balle à bout portant ou qu’on nous pousse dehors de notre emploi et qu’on nous indique le chemin de la pendaison, c’est pareil. C’est kifkif !
Destinés à être persécutés par les nôtres et les autres, nous ne demandons pourtant rien de particulièrement difficile. Qu’on nous oublie ! Qu’on nous laisse en paix ! Une petite paix, comme dit la publicité, on la vaut bien, n’est-ce pas ?
«Je vous promets que ça va changer», expression maîtresse, dans la bouche des immobiles, pour calmer l’enthousiasme et la fougue de ceux qui veulent travailler, innover. Ça va changer, et vas-y : à défaut de retaper sérieusement des immeubles, on les badigeonne, on avale beaucoup d’argent, et… on ravale les façades. Pour clôturer l’opération dans la fête, l’éternel «karkabou» est convié : cent choeurs et sans reproches, ça se met à chanter «Couscous el-mir, ki bnine». Changement. Maître-mot dans la bouche des immobiles. Et vas-y on change le discours. Le mépris remplace la démagogie. Le mépris est en haut du discours. Pourvu qu’il ne descende pas. Une épidémie de mépris pourrait tuer le reste du peuple qui a été épargné par le terrorisme. A vous citoyens d’applaudir et d’en rire, montrez vos dents, il leur sera plus facile de vous les casser. «Cassez le mur du silence, ô peuple bogosse», dit le discours. Cela fait «vingt temps» que rakoum taklou fel matrag sans rien dire. Des fortunes se sont construites sous vos nez, et vous vous êtes tus, des «miaires» kaïds, le wali qui vient est pire que celui qui passe… Et j’en passe. «Tout cela on le sait, dit la plèbe tout haut, en applaudissant.
23 juin 2010
Non classé