Ne supportant pas l’idée funeste de voir les grands tomber raides morts au pied des trop petits, Chalachou décida de lire dans la paume de la main de chacun des Algériens avant de tirer trois cartes biseautées au hasard qu’il interpréta une par une avant de brûler toutes ses cartes trop usées au bûcher de toutes les désillusions.
1ère carte : Chalachou, en medium en carton-pâte, lut d’abord dans la première carte un pressentiment de mauvais augure : pour lui, l’Algérie ne peut pas fabriquer son avenir avec un pied orphelin et construire son devenir en croyant aux pouvoirs des thaumaturges de pacotille. Le football devant être la première science « positive » à enseigner dans les bahuts, Chalachou, en palpant la première carte, plissa les yeux et les jambes pour subodorer quelque chose de pas bon au-delà du 23 juin en voyant tout le pays couché à l’horizontale sur ses lauriers dégonflés. En guise de pourboire, Chalachou invoqua les pouvoirs surhumains de Sidi Djaboulani avant de cracher à l’intérieur d’un ballon carré pour conjurer le mauvais sort jeté sur un pays qui veut se libérer par les pieds en levant les mains trop haut vers les cieux.
2ème carte : en tirant sa deuxième carte, Chalachou s’enfonça dans un silence inquiétant en montrant du doigt un objet à la rotondité douteuse. Puisque, de toutes les façons, il n’y aura pas vie après le 23 juin, criera Chalachou, il vous restera le temps à comprimer et l’espace à compresser pour faire de votre vie une haltère qui sert à maintenir le reste de l’humanité en équilibre (in) stable. En rapprochant la deuxième carte trop près de ses yeux exorbités, Chalachou sombra dans une longue méditation avant de s’emparer d’un morceau de tissu de couleur vert marabout sur lequel il écrivit : « pour ne pas entrer dans l’avenir à reculons, autant perdre une fois que de se retrouver battu à trop plate couture à chaque fois.» Avant de tirer la troisième carte, Chalachou crut lire au dos de la carte biseautée que puisque le passé est dans l’oubli, autant laisser l’avenir à la Providence
Troisième carte : tombant à pic, la troisième carte fut pour Chalachou une véritable révélation : un pays ne pouvant tout le temps gagner en usant simplement de ses pieds trop plats, il faut se mettre à croire que l’essentiel ce n’est pas de battre les autres mais surtout abandonner l’idée tenace de la défaite inévitable à chaque fois qu’on court, le souffle coupé, après une victoire fuyarde. En renversant la carte sur son dos, Chalachou, le voyeur par le chas de toutes les infortunes, expliqua au peuple des écoutants qu’un pays ne se construit pas en transformant ses champs abandonnés en terrains d’entraînement pour des batailles au pied levé et des victoires à la saint glinglin.
Le pays ne pouvant, de toutes les manières, marcher sur ses pieds sans s’user les talons faute de talent, tout le monde alors gardera pied en restant pieds et poings liés jusqu’à se prendre les deux pieds dans le même sabot.
Dernière carte : en rangeant sa dernière carte, Chalachou eut une prière si absconse que tout le peuple des écoutants se retrouva à vider son corps et son cœur de toutes ses larmes :
«Pour parler au pied de la lettre, vous, peuple des écoutants, pour retomber sur vos pieds, il ne faut surtout pas traîner les pieds et éviter de se moucher du pied. Pour les pieds nickelés, il est temps pour le pays de mettre le pied à l’étrier pour conjurer les pieds de nez de l’Histoire impitoyable. Trop fatigués de faire le pied de grue, apprenez à défaire vos pieds et poings liés et veiller à trouver au moins chaussure à vos pieds » Ainsi aimait parler Chalachou au peuple des écoutants
19 juin 2010
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