De l’après-pétrole, une ère qui ne vient pas à l’après-Mondial, une échéance à multiples risques qui fonce droit sur nous, le pays joue gros. Mais puisqu’il vaut mieux faire tourner un pays avec un ballon plutôt qu’à l’aide d’un bâton, dès cette semaine, noyé sous le boisseau footballistique,
le pays en entier préfère partir en vacances « ouvertes », jusqu’à emboutir la nouvelle année qui pointe déjà. En rangs serrés derrière une « armée » de onze hommes à la mission trop risquée mais pas impossible, un peuple en entier se retrouve, donc, à miser à un contre tous pour faire entrer tout le pays dans un ballon et se mettre à voir la vie en rond. Jusqu’à la fin de l’aventure des Verts au Mondial, le pays va vivre comme à guichets fermés. Explication : vice atavique bien connu de nos secondes natures, chez nous, l’avenir appartient à cette « engeance » de gens qui reportent toujours à demain ce qu’ils peuvent exécuter aujourd’hui. Ainsi, comme raconté au chroniqueur par un militant anti-footeux, tout le pays va comme observer une minute de silence, mais une minute qui va durer longtemps, si longtemps. Jusqu’à ce que onze vaillants acteurs sur 35 millions de spectateurs avachis fassent rattraper à tout un pays tout le temps gâché et tous les efforts dilapidés. Le temps va-t-il s’arrêter net au moins jusqu’au 23 juin, le passage vers le tour suivant relevant pour l’instant de la bague de Salomon ?
Scénario N°1 : possible mais inimaginable, le premier scénario qui se présente droit face à nous est que l’Algérie s’emmêle les pieds au premier tour et le pays chute brutalement sur terre et apprend (encore et toujours !) que les miracles relèvent d’une époque qui n’exista jamais, sauf pour les crypto-poètes. Avec pour mauvaise leçon de l’histoire : envoyer carrément onze fantassins lors de la prochaine Coupe du monde, avec deux colonnes blindées en éclaireur.
Scénario N°2: L’Algérie passe l’épaule du second tour et tout le pays se retrouve à s’offrir une année sabbatique, chômée et payée pour tous. Drapés de vert et de blanc, même les arbres se mettront à s’arracher les cheveux de folle joie. Sous l’effet d’une overdose d’amour de la patrie, tout le monde se mettra à trimer seize heures par jour, se soucier davantage de la productivité, faire plus attention à l’inflation, ne pas trop réclamer à augmenter démesurément les salaires, payer son loyer trop modéré à l’heure près, sa facture de « lumière » et de gaz dans les délais, respecter la chaîne en faisant bien la queue, moins utiliser son véhicule comme une arme à feu La joie sera si irrépressible que même la patate sera cédée au dinar symbolique et la pastèque pour le prix d’un ballon dégonflé.
Scénario N°3 : l’Algérie remporte la Coupe du monde au pays de Madiba et voilà le peuple, trop heureux jusqu’à la révolution
des talons, descendre dans la rue pour scander à mourir d’épuisement : Saâdane président
à vie, jusqu’à la prochaine rêverie
cauchemardesque !
8 juin 2010
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