Quand j’étais jeune, disait le regretté Sim, je voulais être ministre ou clown ; j’ai choisi la deuxième option car je suis un garçon sérieux.
Heureusement pour nous, il ne manque pas chez nous d’esprits moins catégoriques qui ne répugnent pas à cumuler les deux vocations et qui, à défaut de rendre la politique utile, en font néanmoins une bien décapante occupation.
Ainsi va-t-il de Nacer Mahal, Cobra pour les intimes, le tout nouveau ministre de la Communication, preuve vivante que la relève d’hurluberlus est assurée au sein du pouvoir algérien et qui, n’attendant pas que sa réputation soit faite, vient de brillamment se distinguer devant les journalistes en plaisantant bassement à propos de Ferhat Mehenni : « C’est qui celui-là ? » La boutade était censée appuyer une autre, celle du Premier ministre Ahmed Ouyahia qui venait de qualifier la formation d’un Gouvernement provisoire kabyle de « tintamarre ». M. Mehal, ironisant pour plaire à son chef, confirmait, comme dit Chamfort, que si les singes avaient le talent des perroquets, on en ferait volontiers des ministres.
Ce ministre de la Communication qui se vante de ne rien connaître de son histoire récente, du Mouvement culturel berbère ni du Printemps berbère, M. Mehal qui se gausse d’un des 24 détenus du printemps berbère, d’un des fondateurs du RCD, nous rappelle que la présence d’esprit n’est décidément plus nécessaire à un ministre et que les carrières dans notre gouvernement dispensent des moindres talents. Sauf, bien sûr, celui de savoir faire du bruit avec la bouche… Faire du bruit avec la bouche comme un ministre, c’est ça être comédien, nous rappelle un autre comique, Jean Yanne. La différence ? On est mieux payé quand on fait du cinéma !
Alors va pour le cinéma ! « Je remercie le président de la République pour la confiance qu’il a placée en ma personne » Mahal, what else ? Dix ans à diriger l’agence officielle de presse, l’APS, média supplétif du pouvoir, celle-là dont le président Bouteflika disait qu’il était le rédacteur en chef, dix ans à désinformer, intoxiquer, censurer, c’est bien assez pour devenir ministre, car, pour paraphraser un dernier baladin, Philippe Bouvard, ministre ou fille publique, n’est ce pas le même métier et quand on l’a été, ne fût-ce qu’un jour, on a droit au titre toute sa vie.
El-Ghoul
8 juin 2010
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