Benjamin Stora arrive au milieu de la salle. «Monsieur Stora, on voudrait vous présenter une personne», l’appelle quelqu’un dans la salle. Il regarde vers sa gauche, puis sourit et lève les bras vers le ciel. «Oh! Monsieur Mechati ! Comment allez-vous ?» Ensuite, une accolade «historique» entre l’historien français et Mohamed Mechati, un des «22» historiques, dont l’histoire a retenu qu’ils se sont réunis un jour dans une villa du Clos- Salembier, pour décider de lancer la lutte armée contre le colonialisme.
Benjamin Stora dédicacera deux livres pour Mechati.
La discussion est très décontractée. Un photographe prend des photos des deux hommes en train de discuter. «Ce sont les photos de l’historien et du révolutionnaire», fait remarquer un jeune dans la librairie du Tiers-Monde. Stora insiste auprès du photographe pour se faire envoyer les photos sur sa boîte e-mail. Une heure auparavant, l’historien avait signé deux de ses ouvrages pour la moudjahida Louisette Ighil- Ahriz venue elle aussi a cette séance de vente-dédicace des ouvrages La gangrène et l’oubli, la mémoire de la guerre d’Algérie et Le mystère de Gaulle, son choix pour l’Algérie, disponibles en Algérie chez les Editions Sedia. «J’ai écrit La gangrène et l’oubli, il y a une vingtaine d’années. Je ne parle pas de la guerre d’Algérie comme dans l’histoire classique, mais plutôt de ce qu’on pourrait appeler l’histoire de la mémoire», explique Benjamin Stora, lors d’une rencontre avec la presse improvisée par la force des choses, à cause de l’afflux en masse de gens à cette séance de vente-dédicace. «Les événements ont été traités différemment d’une rive à l’autre», répondra-t-il à une question. «Trente ans après l’indépendance de l’Algérie, j’ai tenté de montrer comment cette guerre ne finissait pas dans les têtes et dans les cœurs, parce que de part et d’autre de la Méditerranée, elle n’a pas été suffisamment nommée, montrée, assumée dans et par une mémoire collective», est-il écrit à ce sujet, dans l’introduction de l’ouvrage. Samedi à Alger, Benjamin Stora a aussi parlé de son nouveau livre Le mystère de Gaulle, son choix pour l’Algérie. L’auteur n’est pas totalement d’accord avec l’image d’un de Gaulle «visionnaire», que donnent du Général certains en France. Pour Stora, il était également un «acteur» dans la tourmente des événements particulièrement, la guerre d’Algérie, mais il «n’est pas arrivé là où il voulait aller» car ses projets d’association, puis de fédération avec l’Algérie n’ont pas abouti. A une autre question, Stora répond : «De Gaulle avait une idée de la France chrétienne.» «Il était donc raciste !» lance un jeune journaliste. «Non, de Gaulle n’était pas raciste. Aimer sa religion, ce n’est pas du racisme. Mais, c’est vrai qu’il n’était pas tiers-mondiste. De Gaulle était tout simplement un nationaliste français qui, naturellement, défendait les intérêts de la France», répond l’historien, avant de descendre au rez-de-chaussée de la librairie où l’attendait une autre foule, un ou plusieurs livres à la main. Selon Benjamin Stora, «l’histoire de la guerre d’Algérie ne fait que (re) commencer»…
K. B.
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2010/06/07/article.php?sid=101203&cid=16
7 juin 2010
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