02 Juin 2010 – Page : 19
Il a souligné que la complaisance et la détestation sont les ennemis de l’art.
Un vibrant hommage a été rendu à l’écrivain algérien d’expression française, Yasmina Khadra, lundi à Constantine, à l’occasion d’une vente-dédicace de son dernier livre L’Olympe des infortunes, réédité aux éditions Média-Plus.
En présence d’un public fort nombreux, constitué de mordus de littérature et, notamment d’admirateurs de cet auteur traduit dans 40 pays, ce dernier, dès l’entrée en matière d’une séance-débat, organisée au théâtre régional de la ville en marge de la séance de dédicaces, s’est défendu contre le «fallacieux» et le «négativisme». Il a aussi souligné que la complaisance et la détestation sont les ennemis de l’art.
Concepteur, dans son dernier ouvrage, d’une olympe constituée de marginalisés et de fracassés de la vie, Yasmina Khadra est l’auteur, en l’occurrence, d’une fiction universaliste ou d’une fable de la vie sur la vie où prévaut le non-lieu, le non-dit et un équilibre fragile fabriqué à base d’illusions et de démissions. Mohamed Moulessehoul (de son vrai nom) a révélé, optimisme et générosité, considérant que «l’exil pour un écrivain est dans son texte» et que «la fiction est un mensonge que seul l’écrivain croit».
De Houria, son premier recueil de nouvelles, en passant par L’Attentat, L’écrivain, La Fille du pont, Le Privilège de Félix, Ce que le jour apporte à la nuit, ou Cousine K, qu’il considère comme sa meilleure oeuvre, Khadra, qui a soutenu que «l’élégance de l’écrivain s’est de s’effacer devant ses personnages», a relevé, à une question-reproche liée à l’absence de la ville de Kenadsa (sa ville natale) dans ses romans, que dans ses écrits, il raconte un pays selon sa mentalité et non sa géographie. Se revendiquant amoureux de Malek Haddad, «un auteur authentique qui avait la souveraineté du verbe et le scrupule du texte», Yasmina Khadra a affirmé avoir appris de Haddad que la pluie pouvait avoir des talents.
Abordant la problématique des traductions des oeuvres littéraires, Khadra a affirmé écrire avec une sensibilité algérienne qu’il serait difficile pour un étranger de véhiculer à travers une traduction, même s’il a vécu dans le pays. Lui-même s’étant essayé à la traduction de son ouvrage L’Ecrivain, (une tâche qu’il avoue avoir abandonné au bout de 10 pages), «il s’était, dit-il, rendu compte qu’il trichait». Il a expliqué, à ce propos, que le traducteur transpose ses frustrations et ses propres insuffisances au texte. Soulignant, notamment la complexité de cette tâche, il a indiqué que «le traducteur peut enrichir le texte ou l’appauvrir, faire chérir l’auteur ou le rabaisser».
Encourageant tous ceux qui se sentent une âme sensible à s’exercer à l’écriture ou à n’importe quel autre mode d’expression, il s’est pris lui-même comme l’exemple de quelqu’un qui s’exerce toujours à l’écriture, même si (son) oeuvre a été vendue à 5 millions d’exemplaires de par le monde.
Cette séance-débat organisée en l’honneur de Yasmina Khadra qui visite pour la première fois la région de Constantine, a confirmé la mort regrettée de l’inspecteur Lobb (personnage principal des polars de Khadra) que les fans de Khadra et de son héros retrouveront prochainement, malgré tout, sur les écrans.
R.C
2 juin 2010
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