C’est encore au réseau Anima que l’on doit les données les plus récentes sur les IDE dans notre région maghrébine. Dans un rapport intitulé «Les investissements et partenariats dans la région MED en 2009», les chercheurs d’Anima nous proposent un ensemble de données chiffrées sur les IDE au Maghreb. L’Algérie est incontestablement en retard. Ce retard s’explique à la fois par la faible attractivité du site Algérie mais aussi par l’indifférence affichée par les pouvoirs publics vis-à-vis des investisseurs étrangers. «Nous n’avons pas besoin de votre argent», affirmait encore récemment l’ex-ministre de l’Investissement et de la Promotion industrielle, Hamid Temmar. Les chiffres sur les stocks d’IDE réalisés durant la période 2003-2009 confirment le retard de l’Algérie.
Les IDE dans la région MED (2003-2009) (en millions d’euros)
Pays Valeur Turquie 70.478 Egypte 58.777 Maroc 20.197 Algérie 18.789 Libye 10.796 Tunisie 10.394
Rapportées à la population de chaque pays et donc à la taille du pays, les données sont encore plus explicites pour évaluer la place de l’Algérie dans la répartition des IDE dans la région MED.
IDE par pays et par tête d’habitant (en euro)
Libye 531 Tunisie 194 Turquie 181 Egypte 140 Maroc 77 Algérie 74
Enfin rapportés au PIB de chaque pays, les IDE sont répartis comme suit
IDE par unité de PIB (nombre de dollars pour 10 000 dollars PIB)
Egypte 6 % Tunisie 5 % Libye 3 % Maroc 3 % Turquie 2 % Algérie 1 %
En 2009, l’Algérie, paradoxalement, eu égard à la situation de crise qui caractérise l’économie mondiale et le recul des IDE qui en résulte, l’Algérie affiche une croissance appréciable en termes de flux : + 70%.
L’évaluation des flux d’IDE en 2009
Algérie + 70 % Maroc + 65 % Egypte + 50 % Tunisie - 34 % Libye - 49 %
Il faut tout de suite préciser que cette augmentation des IDE en 2009 est due, pour notre pays, principalement au secteur des hydrocarbures, notamment avec les projets pétroliers de Total et GDF Suez. Le secteur de l’énergie représente 9 des 10 plus gros projets d’IDE en 2009. L’augmentation de 2009 s’explique aussi par l’augmentation du capital des banques étrangères qui fait suite à la nouvelle réglementation promulguée en 2008 et qui «exige que le capital minimum des banques et des succursales de banques soit quadruplé pour passer de 2,5 milliards de dinars à 10 milliards de dinars». Il y a eu alors augmentation de capital des filiales Fransabank, Trust Bank Algeria, Citigroup, BNP Paribas, Société générale et Gulf Bank Algérie. Il faut cependant relever que les chercheurs d’Anima sont trop optimistes pour l’Algérie lorsqu’ils écrivent «malgré les restrictions réglementaires, l’Algérie attire paradoxalement davantage d’IDE en 2009 qu’en 2008». Nous venons de rappeler en quoi consistaient ces IDE (pétrole et recapitalisation des banques). Mais il nous faut souligner aussi qu’en termes d’investissements étrangers qui portent sur la diversification de l’économie et notamment l’industrie manufacturière, l’attractivité de l’Algérie qui était déjà mauvaise s’est encore détériorée avec la nouvelle réglementation.
Le Maroc
Dans la région MED, le Maroc est le pays le plus dynamique ces deux dernières années dans le domaine de l’attrait des IDE. Deux milliards d’euros en 2008, 3,3 milliards en 2009. Ces IDE sont diversifiés et concernent notamment les industries manufacturières : métallurgie, énergie, automobile (usine Renault à Tanger). Les télécoms (Vivendi), les banques, le tourisme sont des secteurs qui attirent de plus en plus d’investisseurs étrangers. 2/3 de ces IDE sont le fait d’investisseurs européens et 1/4 d’investisseurs du Golfe. Le gouvernement libyen a aussi réalisé des investissements dans l’immobilier (hôtels à Marrakech et Casablanca), dans la chimie (acide phosphorique).
La Tunisie
1,3 milliard d’euros d’IDE en 2009 qui est plutôt une mauvaise année puisqu’il y a eu une baisse de 32% par rapport à 2008. Immobilier, énergie, tourisme attirent l’essentiel des IDE mais montée en puissance du secteur de l’industrie et notamment les industries mécaniques, électriques et électroniques qui doublent par rapport à 2008. Il faut noter aussi la constitution de sous-traitants autour du pôle aéronautique Airbus.
La Libye
1,6 milliard d’euros en 2009. Les secteurs où se réalisent les IDE sont l’énergie, les BTP et les infrastructures ainsi que la chimie, notamment avec le marocain OLP pour la production d’ammoniac et d’acide phosphorique. La Libye réalise aussi un complexe d’urée et d’ammoniac avec le norvégien Yara. Maroc, Tunisie et même Libye, pour l’instant à un degré moindre, semblent bien engagés à jouer totalement la carte IDE pour ancrer leur croissance économique sur des investissements productifs performants. Au même moment, l’Algérie marque sa différence et tourne le dos aux IDE sans que l’on sache exactement pour quelle raison et surtout pour quelle autre stratégie plus probante ?
Par Abdelmadjid Bouzidi
abdelmadjidbouzidi@yahoo.fr
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2010/06/02/article.php?sid=101001&cid=8
2 juin 2010
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