L’énorme plan quinquennal de 287 milliards de dollars suscite, comme on s’en doute, l’intérêt des milieux économiques, en particulier chez de nombreuses entreprises européennes. Le plan algérien leur permet en effet d’espérer alimenter des plans de charge affectés par les restrictions budgétaires qui se généralisent sur le Vieux Continent.
Les entreprises algériennes, qui ont globalement raté les précédents plans, seront-elles de la partie ou bien invoquera-t-on, encore une fois, leur manque de moyens ou de savoir-faire pour les empêcher de prétendre à une part de ce monumental gâteau?
Outre les fâcheux «restes à réaliser» – une bagatelle de 130 milliards de dollars ! -, le programme comprend, comme le précédent, une liste d’infrastructures diverses où domine effectivement le volet éducatif et social. L’accent mis sur le renforcement des moyens des secteurs de la santé et de l’enseignement se veut l’expression de l’importance accordée au «développement humain». L’orientation est salutaire.
Dans l’histoire économique du pays, le facteur humain n’a pas vraiment été au premier plan. Ce réajustement de perspectives, dans l’air du temps, est à saluer. Les dépenses infrastructurelles servent indéniablement à l’amélioration du bien-être général, mais le fameux «développement humain» ne peut être mené à bien par les seules vertus du béton.
L’approche quantitative, pour impressionnante qu’elle soit, ne suffit pas à donner un contenu véritablement humain à la programmation des investissements. On ne le sait que trop – mais le «rappel est utile aux croyants» -, l’importation massive d’usines clés en main n’a pas provoqué le décollage industriel du pays. L’accès à la santé et à la formation relève, à égale importance au moins, de facteurs qualitatifs qu’il serait fâcheux de sous-estimer. La réalisation d’édifices est une bonne chose. S’assurer que ceux qui les utilisent pour dispenser les services attendus bénéficient d’un soutien réel à leurs propres formations, est aussi important sinon davantage.
L’allocation de ressources au développement qualitatif n’est pas spectaculaire, elle a néanmoins beaucoup plus d’impact que la construction d’hôpitaux où l’on est mal soigné ou d’établissements universitaires et secondaires où l’enseignement laisse à désirer. Le développement humain ne prend un sens opérationnel que s’il est basé sur l’amélioration des connaissances, la professionnalisation et la systématisation des bonnes pratiques dans l’ensemble des secteurs.
L’ouverture sur le monde, les sciences et la technologie est la condition essentielle pour impulser une dynamique vitale de modernisation du pays. Cette démarche, mise en œuvre par des pays comme la Malaisie, la Corée du Sud ou Singapour, a produit des résultats concrets. Construite autour de pôles d’excellence, elle a permis de mettre à niveau des générations de citoyens compétents, au fait des avancées les plus actuelles dans l’ensemble des secteurs. Dans ces pays, la question des capacités des entreprises locales ne se pose plus.
Le développement n’est véritablement centré sur l’homme que s’il libère les initiatives et permet d’acquérir et de transmettre le savoir-faire. On ne le redira jamais assez.
31 mai 2010
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