Pour «une femme en colère », Wassyla Tamzali paraissait plutôt calme, malgré une salle pas nécessairement acquise à sa cause. Première surprise, la militante féministe a donné sa conférence, dimanche, au Centre culturel français d’Alger, devant une assistance à majorité masculine.
Souriant de tous ses yeux, Ferhani Ameziane fait remarquer qu’il n’est pas aisé pour lui d’être le modérateur d’une femme en colère tout en qualifiant de «pamphlet» son ouvrage publié en 2009 chez Gallimard. Mme Tamzali, par précaution, commence par mettre les points sur les i.
«Je n’ai pas la prétention de dire la vérité : je dis ma vérité.» Le livre écrit en trois mois, est «l’histoire de ma liberté» et «c’est à l’école française que nous avons appris à nous libérer de la France», explique-t-elle. Qu’est-ce qui a pu mettre en colère Wassyla Tamzali ? «En Occident, on parle aujourd’hui de féminisme islamique. Donc moi, je fais du féminisme européen. C’est ce qui me met en colère… Je ne suis pas un clone d’Européenne», proteste-elle. «C’est peut-être vous qui êtes désabusée, pas les Européens», lance Ferhani. «Non, je ne suis pas désabusée ! Ce sont les Européens qui sont désabusés. Ils ont tout raté : raté la révolution sexuelle, la révolution marxiste, Che Guevara est devenu une vedette de cinéma… » Auparavant, et surfant à l’aise sur les jeux de mots, le modérateur (un tantinet provoc) avait déclaré que dans son dernier livre, Wassyla Tamzali «s’est complètement dévoilée». Tamzali est aussi en colère contre ceux et celles qui présentent le hidjab comme une sorte d’émancipation. «On présente le voile comme un acte de liberté et c’est faux. Il est soit un acte religieux et là je suis d’accord, soit, comme on dit maintenant, un acte de séduction, soit un acte de soumission ». A une journaliste (non voilée) qui lui dit qu’il faudrait dépasser la question du voile et aborder des questions plus importantes, l’auteur de Une éducation algérienne répond : «Oui, vous avez raison ! J’en ai marre de me battre contre des bouts de chiffons», soulevant les applaudissements des hommes présents (en nombre) dans la salle. L’unique femme voilée dans la salle lève la main pour poser une question, mais n’aura pas le micro à cause de la fin de la conférence. Malgré les excuses du modérateur, elle ne peut s’empêcher de répondre : «Je sais que je n’ai pas le droit à la parole !» Voila, donc, une autre femme en colère et désabusée, en plus !
K. B.
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http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2010/05/26/article.php?sid=100667&cid=16
26 mai 2010
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