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Le 19 mai, fête avec ou sans barbe? par Kamel Daoud

24 mai 2010

Contributions

Peut-on revenir vers le futur ? Oui, quand le passé est un avenir et le Présent une bête qui a deux dos et qui fait la guerre, pas l’amour. C’est ainsi pour le moment: au constat ou par recoupement. Au constat,

tout le monde a remarqué qu’une partie de l’intelligentsia algérienne, ses anciens combattants, ses chefs de partis, nouveaux martyrs ou anciens morts défroissés par de récentes convocations, sont repartis, en désordre, vers cette période trouble et glorieuse de la guerre de libération pour un remake féroce et pour découvrir la vérité sur le «Qui tue qui ? Version 54/62». L’histoire est un présent qui ne peut pas rentrer chez lui, le présent est un futur toujours promis, le futur est ce qui se retrouve derrière la mer avec des yeux bleus et la peau de tout un horizon. Dans un même courant, mais visant une autre période, les conservateurs islamistes remontent eux aussi le temps, mais dans la discrétion.

Raconté par un ami, ce fait vrai intervenu dans une université de Sétif où une fête d’étudiants a été empêchée par des pasdarans chétifs et mal nourris ou seulement à la fatwa et à l’ablution. Car pendant que le pays est embarqué comme un courant de saumons vers un stade prénuptial de la révolution algérienne, les universités algériennes en sont encore aux années 80 avec brigades des mœurs, syndicats d’étudiants annexés aux islamistes «corrigés», hystérie des brigades des mœurs, islamisation folklorique féroce et archaïsmes érigés en expression de «notre identité». Dans l’université en question, il ne s’agissait, selon l’anecdote, que de deux freluquets s’annonçant, pour arracher les câbles de la sono d’une fête d’étudiants «harame», comme les représentants d’une organisation estudiantine qui veille au tracé en blanc du droit chemin selon sa conception à elle. Une véritable police interne que tout le monde tolère dans l’université sans le dénoncer, même après 200.000 morts et dix ans de préhistoire.

Le pire dans ce cas de figure qu’il est la réalité quotidienne de presque toutes les universités algériennes. Une réalité avec laquelle l’administration universitaire compose, dans le souci de mieux insonoriser l’université et d’éviter les chahuts ou les accusations d’infraction à la Religion privatisée. C’est vous dire que les islamistes qui prennent en otage les universités, même après la défaite du Fis, se portent bien. On ne les inquiète pas, on demande aux recteurs de ne pas les contrarier, on les utilise pour les élections ou pour les évènements de foule, on les laisse imposer leurs lois aux différences des autres. Du coup, l’université algérienne ne se retrouve pas seulement otage de l’infantilisation, du manque de but universel et de la déperdition, mais aussi otage de ce statu quo recherché par le Pouvoir entre lui et les courants les plus archaïques de la société. On préfère dans ce cas précisément, une université doucement talibanisée que le foyer d’une vraie force vive de la nation, une université capable d’abriter ou de déclencher la contestation. C’est ce que le Pouvoir salue chaque 19 mai, fête de l’Etudiant: un passé, pas un Présent. Aujourd’hui, les lycéens, les travailleurs, les chômeurs peuvent marcher dans les rues, les étudiants eux ne le feront que lorsque le FLN ou le Hamas le voudront ou lorsqu’ils ne mangent pas bien ou lorsqu’une réforme risque de viser leur médiocrité et leur système de notation. Une façon d’illustrer cette grande psychanalyse de l’acte et de l’action en Algérie: le culte du retour. Vers des utopies qu’on n’a jamais vécues cependant, ou vers des époques de recommencement souhaité. Presque tous les Algériens rêvent de retour: vers le ventre de la mère, vers le socialisme, vers la jeunesse de Bouteflika, vers la guerre de Libération, vers Oujda ou Istanbul, vers La Mecque ou Boumediene, vers Nasser ou vers l’équipe nationale de 1982, vers la «Gloire de l’islam» ou le stade asexué de l’humanité. Tout est bâti à l’image du seul présent que nous a fait la mémoire: le passé. Du coup, tout le monde est gardien de quelque chose: des bonnes mœurs, d’un morceau de trottoir, de la révolution, des constantes nationales, de la démocratie ou de la souveraineté. Dès qu’un Algérien a un peu de pouvoir, il se proclame gardien, ou l’inverse. Avez-vous remarqué, par exemple, que même pour l’actuelle équipe de foot, les seuls (ou presque) joueurs locaux (3) sont des gardiens ? C’est la vocation assise des trois quarts de ce peuple: gardien du passé ou agent de sécurité du Présent. Le but est de ne pas laisser entrer le futur là où il veut.

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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