A Téhéran, Bouteflika a été éloquent et incisif par Kharroubi Habib

A Téhéran, où il a participé au 14e Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement des pays membres du G15, le président Bouteflika a prononcé un discours dont l’intonation nous a rappelé ceux que la diplomatie algérienne développait quand notre pays était à l’avant-garde des nations qui militaient pour l’instauration d’un nouvel ordre mondial plus juste et plaidaient la nécessité d’une coopération Sud-Sud, alternative possible à la domination économique du Nord riche et égoïste.

La tribune de laquelle Bouteflika a prononcé son discours militant s’y prêtait, puisque celle d’un forum dont les pays participants partagent la même vision sur ces deux problématiques. La déclaration a en tout cas le mérite d’avoir fait savoir que l’Algérie n’a pas renoncé sur celles-ci, même si les deux dernières décennies, elle a été moins en pointe sur le sujet pour causes dues à des problèmes nationaux qui lui ont dicté ses propres priorités.

Sur les thématiques d’un nouvel ordre mondial et de la coopération Sud-Sud, Bouteflika a donc renoué avec la dialectique incisive qui a distingué l’Algérie et en a fait un défendeur écouté dans l’arène internationale.

Lucide, Bouteflika a fait le constat qu’il reste tout à faire sur la question d’un nouvel ordre mondial, puisque «le monde de ce début du XXIe siècle continue à être régi par les institutions et les pouvoirs de décision reflétant les rapports de force issus de la fin de la Seconde Guerre mondiale». Ce qui, en d’autres termes, veut dire que quelques grandes puissances continuent à régenter l’ordre mondial.

S’appuyant sur les conséquences qu’a eues la crise financière mondiale, dont les causes se situent dans les pays les plus riches, Bouteflika a revendiqué avec force la participation des pays émergents du Sud dans la refonte du système monétaire et financier international. Une refonte qui, il va de soi pour le Président algérien, devra aller dans le sens de l’établissement de ce nouvel ordre mondial plus juste pour lequel, entre autres forums, plaide le G15.

Bouteflika a par ailleurs lancé une charge acerbe contre l’Organisation mondiale du commerce (OMC), qui, sous influence des pays riches, impose aux pays en développement, dont l’Algérie, des conditions exorbitantes à leur adhésion en son sein.

A la vérité, il fut offensif et sans concession sur tous les dossiers qui font litiges et mésententes entre le Nord et le Sud. Un langage et des prises de position en rupture avec celles timorées pour lesquelles l’Algérie avait opté ces dernières années.

Il reste maintenant à l’Algérie de ne pas se contenter de déclarations de principe au plan international. Elle ne peut en effet prêcher justement pour un ordre mondial nouveau si, chez elle, elle perpétue les conditions dictées par l’ordre ancien, à savoir notamment le maintien de son économie nationale sous dépendance de celles des pays industrialisés.

Pour se faire entendre, les pays en développement doivent en effet commencer par des changements, dont les résultats leur permettront ensuite d’être en situation de peser internationalement sur tous les dossiers de négociation entre le Nord et le Sud.