Le Carrefour D’algérie
Deux générations plus tard, on se demande encore ce qui fait bouger les passions que suscite la guerre d’Algérie. C‘est que le sujet est loin d’être épuisé, laissant des zones d’ombre, des témoignages incomplets, des mensonges bousculant la vérité et une façon indélicate de tourner une page sans la déchirer.
Les mots se déplacent de phrases en phrases et prennent les colorations du moment selon les acteurs, selon les conteurs. La mémoire confisquée par les archives françaises, le tâtonnement pour répondre aux questions du passé, la fuite devant une situation qui mérite plus de courage et de clarté, sont autant d’obstacles pour porter, sur l’avenir, un regard d’espoir. Pourtant, tout le monde s’accorde à dire que le colonialisme a été la phase réductrice dans la vie des nations. Une honte qui mérite d’être lavée pour décomplexer les relations d’Etat à Etat et réchauffer une fois pour toute, la relation humaine, au-delà de la haine, du racisme, de l’exclusion. Difficile travail de deuil, difficile oubli des génocides, des populations déracinées, tant que la persistance d’une vision néocoloniale prédomine les textes de loi et les livres d’Histoire. La condamnation à vivre ensemble dans un monde qui tourne plus vite, mais qui a fini par imposer de nouvelles lois, mérite une mea culpa que d’autres colonisateurs, que la France, ont compris. Reconnaître les crimes contre l’humanité maintenant que les exécuteurs ont pratiquement disparu, avancer vers une plus grande clairvoyance avec courage, dispensera certainement les générations actuelles et futures d’une méfiance les uns envers les autres et réduira ce mortel ethnocentrisme qui n’a plus de raison d’être. Accepter et assumer une Histoire commune en dévoilant les erreurs du passé et ce qu’elles ont engendré comme misère demeure honorable et contemporain voire moderniste. Taire la vérité n’est pas la tuer mais en reporter son resurgissement à plus tard. Comment un film, comme «Hors-la-loi» peut-il soulever autant de boucliers, alors qu’il n’est pas encore sorti en salle? La peur gagne-elle donc les esprits plus de soixante ans plus tard ? La peur de soi, de découvrir qu’il n’y a pas de quoi être fier et d’aller rechercher d’autres fiertés que celle de la «Guerre d’Algérie» semble poser un problème de fond : celui de la remise en cause de la grandeur du pays des Droits de l’Homme.
9 mai 2010
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