Ali Kafi a réagi — sans même l’avoir lu — au contenu du livre écrit par Saïd Sadi. Le président du Haut Conseil d’Etat a profité d’une rencontre avec la presse pour s’en prendre aux colonels Amirouche et Boumediène et pour dresser un tableau noir de la gouvernance de Abdelaziz Bouteflika.
Tarek Hafid – Alger (Le Soir) – Lors d’une rencontre avec des journalistes des quotidiens Liberté, El Watan, El Fedjr et El Khabar, organisée jeudi en son domicile, Ali Kafi a réagi au livre Amirouche : une vie, deux morts, un testament. Le président du HCE, qui avoue ne pas avoir lu l’ouvrage de Saïd Sadi, conteste à l’auteur le droit d’écrire sur la Révolution algérienne. «Saïd Sadi n’a pas le droit d’écrire sur l’Histoire. Il est psychiatre et non pas historien. De plus, n’étant pas un acteur de la Révolution, il est très loin du processus historique de notre Révolution. Il ne l’a pas vécue, donc il ne peut pas s’en imprégner (…) Au vu de la faillite qui a gagné son parti (le RCD), veut-il peut-être rebondir sur la scène en enfourchant le cheval de la grandiose Révolution qui a libéré le pays ? Si Amirouche était encore en vie, il aurait exécuté son propre fils ainsi que Saïd Sadi.» Si l’on s’en tient aux propos de Ali Kafi, aucun Algérien n’est disposé à écrire l’histoire de l’Algérie. «Nos historiens sont des lâches et des entremetteurs. Ils n’écrivent pas. Pourquoi on n’écrit pas notre histoire ? La France a-t-elle peur que l’histoire de l’Algérie soit écrite ? Y aurait-il des Algériens qui seront dérangés par l’écriture de l’histoire?», s’est-il interrogé. Revenant sur le contexte historique de l’époque, Kafi — alors colonel de la Wilaya II — a reconnu avoir été écarté des travaux du Congrès de la Soummam. «Nous étions une délégation officielle, Zighout, Ben Tobbal, Mezhoudi, Rouabhi, Benaouda et moi-même. (…) J’ai assisté à deux séances avant que Zighout ne me contacte et me confie la mission d’aller attendre un avion qui allait larguer des armes. Mais il n’y avait pas d’avion. Je n’ai pas été écarté et je ne prétends pas que j’ai participé au Congrès, mais je m’interroge sur la mission qu’on m’a confiée». Ne manquant pas de traiter Saïd Sadi «d’affabulateur », Ali Kafi confirme, néanmoins, les informations publiées par le président du RCD. Assénant ses vérités, Kafi s’en prendra de face aux colonels Boumediène et Amirouche. Du président de la République il dira : «Moi, Boumediène je l’ignore. Il est entré à la Révolution en 1956 grâce à une lettre de recommandation d’Ahmed Ben Bella. Il ne connaît pas les tenants et les aboutissants de la guerre de Libération (…) Celui qui a rendu l’Algérie malade c’est Boumediène, il nous a laissé un héritage désastreux qui nous gouverne actuellement (…) Il a ruiné le pays. Les deux seules bonnes décisions qu’il avait prises, ce sont la nationalisation des hydrocarbures et la révolution agraire». Pour ce qui est du colonel Amirouche, Ali Kafi tiendra des discours diamétralement opposés. Dans un premier temps, il prendra le ton de l’offense en évoquant le colonel de la Wilaya III historique : «On appelait Amirouche “Taxi Ami Salah”» rapporte- t-il en prenant soin d’évoquer dans le détail sa «fuite» face à l’ennemi. «On s’est retrouvés tous dans une maison à Michelet. Repérant Amirouche, isolé dans un coin tout empêtré dans sa kechabia, Abane l’avait sermonné devant tout le monde en le traitant de tous les noms d’oiseaux. Il lui cria à la figure : ‘’J’emmerde celui qui t’a nommé officier” (inal bouh lisemak dhabet)», raconte Kafi. Mais ce dernier semble finalement se reprendre : «Amirouche était plus qu’un grand frère pour moi. On avait d’excellentes relations, on se voyait régulièrement ». Et il qualifiera «d’impardonnable » la séquestration des corps de Amirouche et Si Haouès après la Révolution. «Cela ne fait pas très longtemps que je suis au courant de cette affaire. Mais je la considère comme un crime impardonnable contre les chouhada. » Au-delà de l’aspect historique, la sortie médiatique de Ali Kafi se caractérise aussi par des critiques à l’égard de la gouvernance de Abdelaziz Bouteflika. Un constat d’échec sans appel. «L’Algérie vit une faillite totale et elle se dirige vers l’inconnu. Nous avons consacré toute notre vie pour le militantisme depuis le mouvement national, avec de grands espoirs, actuellement tout sombre subitement dans l’obscurité.»
T. H.
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2010/05/09/article.php?sid=99858&cid=2
10 mai 2010 à 0 12 51 05515
Belkhadem salue les déclarations de Kafi sur le livre de Said Sadi
Sarah Rahal
Le livre de Said Sadi sur le colonel Amirouche continue de susciter des réactions dans la classe politique. Le secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem, a réagi ce dimanche 9 mai aux récentes déclarations de Ali Kafi sur ce livre. M. Kafi a témoigné « en tant qu’ancien moudjahid et témoin occulaire » de la révolution sur les affirmations de Sadi Sadi concernant les conditions de la mort du colonel Amirouche, a dit M. Belkhadem, sans apporter un soutien direct et franc à l’ancien président du Haut comité d’Etat (HCE). « Il (Kafi, NDR) est responsable de ses propos », a-t-il ajouté.
M. Belkhadem a cependant salué l’intervention de l’ancien chef de la wilaya II historique qui « alimente et enrichit » un débat sur la période de la guerre de la libération nationale. Le secrétaire général du FLN s’exprimait en marge de l’installation de la commission de la jeunesse, des sports et des loisirs de son parti.
09/05/2010 | 15:32 |
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