Culture (Jeudi 06 Mai 2010)
En écoutant la conférence prononcée par un douktour (enseignant universitaire de grade professeur de l’enseignement supérieur), intellectuellement parlant, je me suis senti triste. Abattu ! En écoutant ce douktour, je me suis dit :
ce qui se présente en tant que “recette” du îlm (la science) par nos ulémas (professeurs universitaires) aux étudiants est alarmant, inquiétant et scandaleux ! Et l’exception confirme la règle ! En écoutant ce douktour, j’ai pensé à nos pauvres étudiants attristés, apeurés, les fesses collées aux bancs des amphithéâtres, dans nos universités qui poussent comme des champignons, dans le sud comme dans le nord, dans l’est comme dans l’ouest, au nombre de cinquante, un peu plus, un peu moins, qu’importe ! Et je me suis dis : nos universités ressemblent à des “crèches” ou dans le meilleur des cas à des “écoles primaires”. C’est scandaleux qu’un douktour, avec un grade de prof de l’enseignement supérieur, s’exprime dans un colloque scientifique sur “l’acculturation et la littérature coloniale en Algérie” pour dire : “La littérature algérienne d’expression française renferme une idéologie coloniale.” Cela s’est passé le 14-15 février 2010, à Mostaganem. D’après ce douktour, cette littérature est contaminée par l’idéologie coloniale parce qu’elle est écrite dans la langue du colonisateur ! Euréka ! D’après ce douktour, la langue renferme, consciemment ou inconsciemment, une idéologie. Et vu que la langue française est une langue du colonisateur, donc elle véhicule l’idéologie coloniale. Excusez-nous : Voltaire, Malraux, Sartre, Jeanson, Yves Courrière et d’autres on vous a dérangés dans votre mort de quiétude. Ainsi, et toujours, d’après ce douktour, tous les écrivains algériens d’expression française, je cite quelques-uns : Kateb Yacine, Mohammed Dib, Malek Haddad, Mostefa Lacheraf, Rachid Boudjedra, Mouloud Mammeri, Mouloud Feraoun, Assia Djebar, Tahar Dajout, Rachid Mimouni, Kaddour M’hamsadji, Nabil Fares, Djamel Amrani, Mourad Bourboune, Anna Gréki, Youssef Sebti, Youcef Merahi, Jean Sénac, Yamina Mechekra, Aïcha Kasoul, Aïcha Lemsine, Maissa Bey, Merième Ben, Yasmina Khadra, Salim Bachi, Abdel Kader Djeghloul, Mohamed Arkoun, Mohamed Harbi… et la liste est longue, tous ces écrivains sont des reproducteurs de l’idéologie colonialiste ! Au seuil de nos universités, des nouveaux inquisiteurs débarquent ! Inquisition “scientifiste” ! Autodafé ! Feu ! Peur ! Incinération des livres ! Crucifixion de l’encre ! Gommer la raison ! Encore, une fois de plus, et d’après les propos de ce même douktour : il faut “protéger” nos étudiants, notre progéniture des méfaits de cette littérature écrite dans une langue maudite : c’est le haram, l’impure, le blasphème, la trahison. Et le seul moyen efficace pour se protéger contre cette “malédiction littéraire”, c’est de la jeter dans les bras du feu !
A. Z.
aminzaoui@yahoo.fr
13 mai 2010 à 0 12 42 05425
Souffles…
La langue est un “bien-vacant” ! (2/2)
Par : Amine Zaoui
Brûler ces livres, idéologiquement incorrects ! est un devoir “national” ! Il faut en finir avec cette longue liste : Nedjma, de Kateb Yacine, la trilogie : la Grande Maison, le Métier à tisser, l’Incendie, de Mohammed Dib, l’Élève et la Leçon, de Malek Hadda, l’Algérie, nation et société, de Mostefa Lacheraf, la Colline oubliée, de Mouloud Mammeri, le Fils du pauvre, de Mouloud Feraoun, Idris, de Aly Hammami, l’Escargot entêté, de Rachid Boudjedra, les Enfants du nouveau monde, de Assia Djebar, le Silence des cendres, de Kaddour M’hamsadji, Yahia Pas de Chance, de Nabil Farès, le Témoin, de Djamel Amrani, le Muezzin, de Mourad Bourboune, la Grotte éclatée, de Yamina Mechekra, Je brûlerai la mer, de Youcef Merahi, les Pieds de Yasmine, de Aïcha Kassoul, la Chrysalide, de Aïcha Lemsine, Entendez-vous dans les montagnes, de Maïssa Bey, À quoi rêvent les loups, de Yasmina Khadra, le Serments des Barbares, de Boualem Sansal, le Chien d’Ulysse, de Salim Bachi, la Nuit du henné, de Hamid Grine, Voie anticolonialisme, de Abdelkader Djeghloul, la Fable du nain, de Kamel Daoud, un Été de cendres, de Abdelkader Djamaï, Humanisme et Islam – Combats et Propositions, de Mohamed Arkoun, le Soleil sous les armes, de Jean Sénac, Lui, le livre, de Mahdi Acherchour, Algérie, Capitale Alger, d’Anna Gréki, les Chercheurs d’os, de Tahar Djaout, le Fleuve détourné, de Rachid Mimouni, Prophète, de Hadi Flici, l’Interdite » de Malika Mokeddem, le Soleil assassiné, de Myriam Ben et la poésie de Youssef Sebti… La liste est longue. En écoutant les propos de ce douktour, l’Algérie doit “vider” sa bibliothèque nationale de la moitié de son fond documentaire ! À la mer ! En écoutant ce douktour, notre pays doit nettoyer la mémoire nationale de la moitié de son capital symbolique glorieux ! À l’enfer ! Et il faut bannir la moitié des écrivains de nos espaces culturels ! Mais, ce douktour oublie que dans un arabe classique (pur) et correct ! Celui d’Ibn Jenni et d’Al Mutanabbi que chouyoukh el Azhar ont émis une fetwa justifiant et permettant au pouvoir égyptien de construire la barrière électronique sous-sol sur le long de la frontière entre la Bande de Gaza et l’Égypte pour asphyxier les Ghazaouis ! Et j’aime les écrits de Darwich, Abdel Hamid Benhadouga, Adonis, Haidar Haidar, Abdou Wazeen, Djamel Ghitany, Abbas Baydoune, Djoumana Haddad, Ibrahim Al Kawni, Nabil Souleimane, Mohamed Berrada, Iliyas Khouri, Paul Chaoul et d’autres. La langue est un bien-vacant. Elle qui espère des écrivains une occupation positive. Ainsi, il est demandé à l’occupant littéraire de donner une vie et une âme à ce bien-vacant. Nous, écrivains, colonisons les langues. Et le français, pour moi, n’est qu’une nouvelle colonie. En écoutant ce douktour, je me suis dis : l’âge des lumières modernes est encore loin, très loin ! Et je suis triste, mais sans perdre le sens de la résistance intellectuelle !
A. Z.
aminzaoui@yahoo.fr
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