C’est comme dans ce chef-d’œuvre du cinéma: en Algérie, il faut aller au bout de sa peine, de sa sueur et de sa dignité souvent pour pouvoir réduire seulement le fossé qui se creuse à une vitesse grand « V » entre les salaires et le coût du couffin hebdomadaire. Hebdomadaire parce que les Algériens normaux font leur marché une fois par semaine, sinon lorsque les temps sont durs, allongent même cette durée. Donc les salaires chez nous ont bien pâle mine. D’abord du fait de leur état végétatif, parce qu’ils ne permettent rien à part rêver à une sieste à l’ombre d’un cocotier sur une île dans les Caraïbes. Ensuite, ces mêmes salaires ont pris la fâcheuse habitude d’être à la traîne de cette sacrée courbe bien orientée à la hausse de l’indice des prix à la consommation. Tout cela pour dire que les salaires en Algérie ne reflètent en rien la réalité socio-économique du pays.
Les salaires en fait évoluent à un rythme de tortue, et n’arrivent pas à favoriser la relance de la machine économique. Mais, cette fois-ci, bonne nouvelle : plus de 2 millions de travailleurs vont revoir dès le mois de mai leurs salaires augmenter au moins de 20 %, avec un effet rétroactif qui fera du bien aux portefeuilles. Ah !celui-là, il porte bien son nom, même si la valeur des billets n’est plus la même de nos jours. L’UGTA, le gouvernement et le patronat se sont donc entendus pour augmenter les salaires de presque toutes les catégories de travailleurs, et ceux qui ne le sont pas le seront dans quelques mois. Avec un SNMG à 15.000 dinars, la paie des travailleurs aura t-elle cette fois-ci de l’allure ? Du style consommer les ¾ et épargner le ¼ restant pour aller en vacances l’été prochain quelque part dans le vaste Maghreb ? C’est vrai que l’annonce de la prochaine revalorisation salariale est de nature à donner du mou à la pression sociale. Pour autant, le problème de la hausse des prix, et particulièrement ceux des produits alimentaires, des services n’est pas résolu. Ben !oui. Que valent les 40.000 ou 35.000 dinars comme salaire mensuel des Algériens (moyens) quand la hausse des prix atteint en même temps un niveau alarmant, comme une tomate à 120 da/kg ou des haricots verts à 200 da/kg. Fin 2009, six mois après la hausse du SNMG, qui est passé de 12.000 da à 15.000 da, le taux d’inflation avait terminé l’année à 5,7% contre 4,4% en 2008. Donc, mathématiquement, ou potentiellement, on est tenté de penser que même si les salaires vont augmenter en 2010, rien n’empêchera les prix de faire le même mouvement. Y a pas à dire, chaque fois que le gouvernement décide de faire augmenter les salaires, le couffin, mystérieusement, devient de plus en plus léger. Est-ce une damnation ou une réelle myopie économique du gouvernement qui n’arrive pas à trouver le juste équilibre entre les salaires des travailleurs et la maîtrise des grands agrégats économiques et financiers ? Car au moment où l’inflation enfle, réduisant à néant les efforts d’amélioration du niveau de vie des Algériens, l’excédent commercial national gonfle, les recettes du pétrole explosent et les avoirs en devises de la banque d’Algérie font penser à un état de grâce économique.
4 mai 2010
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