Le Carrefour D’algérie
Un livre, un titre, un auteur, suffisamment de quoi lancer un débat pour peu qu’il ait la capacité de provoquer la contradiction, la polémique, un éclairage. Saïd Sadi sort un livre qui touche à une zone d’ombre de l’Histoire de la guerre de libération,
comme tant d’autres d’ailleurs. Certains moudjahidine manifestent leur désaccord sur ce qui y est écrit. Le terrain privilégié des répliques/contre répliques, se trouve être la presse écrite. Au-delà des vérités des uns et des autres et du «qui a tort qui a raison», il est bon de constater que nous entrons dans un nouveau cycle où les seuls gagnants sont les lecteurs et l’opinion publique. Que Sadi ait raison ou qu’il détienne La vérité ou Sa vérité, là n’est pas le problème. Au contraire, nous avons tellement besoin de débats et de contradicteurs pour mettre au clair l’ambiguïté née de l’unanimisme imposé dès la fin de la guerre. Nous vivons une nouvelle ère et même si nous avons échoué dans beaucoup de domaines, le seul orgueil à tirer vient précisément de cette liberté de parole qui n’est pas tombée du ciel, mais bel et bien le fruit de luttes des années durant. On n’a pas plus le droit d’imposer le silence à ceux qui ont quelque chose à dire. On peut les qualifier de manque de sérieux, les contredire lorsqu’on détient des éléments contradictoires, compléter leurs dires, mais à aucun moment, il ne doit être permis de réduire des voix au silence.
Et c’est justement à ce propos qu’il s’agit de dire «basta!». Sinon comment lever le voile sur cette fameuse écriture de l’Histoire de la guerre de libération, qui n’a pas dépassé le seuil des postillons et qui permet toujours aux mêmes de se gargariser de faits d’armes dont certains en ont juste entendu parler avant de les confisquer à leur profit et en faire des registre de commerce. Notre Histoire s’est faite dans la douleur, dans l’exil, dans la dépossession, dans la terre brûlée mais aussi dans la peur envers les autres et envers nous-mêmes. Mais accordons-nous à dire aujourd’hui que notre Histoire n’est ni la meilleure ni la pire, et que c’est une Histoire comme on voit partout sur cette terre, mais qu’il s’agira d’écrire. Que Sadi écrive un livre qui déplaise ou qui plaise, là n’est pas le problème. Le problème c’est qu’il n’écrive rien, ni lui ni les milliers qui ont quelque chose à dire de vrai ou de faux, et que la mémoire demeure ce désert où seuls les renards se promènent à la recherche de proies faciles.
2 mai 2010
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