Le Carrefour D’algérie
Le quotidien national «El Watan» dans son édition du 27 avril, rapporte que M. Belkhadem secrétaire général du FLN s’est prononcé contre un durcissement de la Loi portant lutte contre la corruption, estimant que la législation compte suffisamment de dispositions à même de permettre de juguler le fléau.
La position de M. Belkhadem ne manque évidemment pas de justesse, elle rappelle le diptyque auquel nous a habitué le système algérien qui est celui de créer une commission ou d’élaborer une Loi pour le traitement adéquat d’une situation. Ainsi, les commissions y compris dans leurs formes hypertrophiées «gigognes» où les lois se comptent par milliers dans notre pays pour des résultats qui laissent le plus souvent en plan. Il ne suffit pas d’intégrer dans un dispositif légal ou règlementaire les projections idéales d’un législateur, pris le plus souvent par l’urgence d’éradiquer un fléau ou de supprimer des effets pervers, pour que la formule connaisse la réussite escomptée. Les textes ont leur propre logique, et souvent l’efficacité attendue dépend de nombreux paramètres qui relèvent de spécialités pointées du Droit. La sanction est-elle disproportionnée par rapport à la nature de l’infraction? Si oui, tous les actants seront rétifs à en accepter le principe. L’infracteur considérera la sanction injuste, celui qui l’exécute pourrait avoir quelques états d’âme et traîner les pieds pour ce faire. La violence de la sanction ne l’éloignera pas de la violence dont le pouvoir d’Etat a fait montre. Elle l’en rapprochera beaucoup plus. La «pénologie» moderne s’est penchée sur cette embarrassante question, l’efficacité d’une loi dépend-elle exclusivement de l’intensité de la sanction? Nos gouvernants actuels ont livré sans trop se faire prier leur réponse, il n’est que d’examiner les textes de lois pris au cours de ces dernières législatures. L’aspect pénal répressif domine de loin et jette son voile «rouge et noir» sur tous les secteurs d’activité, avec le risque de neutraliser les actes de gestion, et de désencadrer le pays déjà en mal de disposer de cadres en nombre et en qualité suffisants. Alors que la tendance mondiale, universelle, s’oriente vers la dépénalisation, dans notre pays le piéton tombe sous le coup d’une disposition pénale à la fois naïve et hardie mais néanmoins inappliquée parce qu’inapplicable, peut se faire condamner à une amende de 2000 DA! Le «harrag» qui vit déjà sous le seuil de pauvreté, est passible d’une amende de plusieurs millions de centimes s’il se fait prendre, s’il périt en mer tant pis. Si cette tendance axée autour du désir forcené de pénaliser à outrance se poursuit en passant le plus grand monde par les tribunaux, et il y a tout lieu de le croire vu le nombre de prisons en projet de construction. Ces établissements deviendront sous peu de véritables symposiums subitement plus fréquentables. Cela renvoie à cette boutade qui fait étirer d’un sourire les lèvres crispées par la mal vie: qu’ont fait les romains en Algérie? Ils ont construit des ruines. Les algériens construisent des prisons, c’est toujours ça de pris.
29 avril 2010
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