Alors qu’une partie du patronat algérien exprime, de plus en plus ouvertement, sa contestation de la politique économique du gouvernement, le monde du travail n’est pas en reste.
Pour des raisons différentes, «bourgeois» et « travailleurs» expriment un malaise réel. Pour les premiers, le gouvernement bride les entreprises alors que ces dernières, dans une économie «normale», devraient être au cœur de la politique économique nationale. Pour beaucoup, le gouvernement ne fait que multiplier les «dos-d’âne» (credoc, licences d’importation
) pour pouvoir présenter un «bilan» des importations en baisse, sans se soucier du fait que cela entrave le fonctionnement des entreprises.
Le FCE, l’organisation patronale la plus en pointe dans la critique de la politique gouvernementale, a choisi, au grand dépit du secrétaire général de l’UGTA, de bouder les discussions que la centrale mène avec le patronat privé. La contestation lancée par le FCE porte sur le fond même de la politique économique du gouvernement, ou plutôt sur les «revirements» de ces dernières années.
Ce mécontentement, diffus depuis longtemps et publiquement exprimé depuis peu dans le monde des entrepreneurs, ne va pas pourtant faire «jonction» avec celui, beaucoup plus durable, des salariés. Chacun est dans sa logique, même si les deux contestent la politique d’un même gouvernement.
Dans le monde du travail, en dépit des faveurs octroyées à l’UGTA, le syndicalisme autonome s’impose inexorablement sur la scène nationale. En cette veille du 1er Mai, ce syndicalisme autonome, fortement présent dans la fonction publique, fait preuve d’une combativité remarquable. Les reculs concédés face à la pression et aux menaces de révocation contre les enseignants et les praticiens de la santé publique n’ont pas entamé leur détermination. Ils sont bien là, décidés à montrer qu’ils répondent à une demande réelle et forte. On constate même une ébauche de constitution d’une confédération de syndicats autonomes, qui se pose, de facto, en concurrent et en alternative à une UGTA fatiguée et dont la proximité avec le pouvoir ne lui apporte pas un surcroît de crédit. Dans les combats syndicaux pour les revalorisations salariales, les batailles menées par les autonomes dans la fonction publique ont davantage pesé que la «négociation responsable» de la vieille centrale.
L’année 2010 promet d’être aussi combative que 2009. Si, en haut de l’échelle sociale, le patronat algérien s’estime bridé inutilement par un retour à des mécanismes de régulation très bureaucratiques, dans le monde du travail, c’est la déconnexion entre les salaires et le pouvoir d’achat qui est contestée. Cette déconnexion s’est durablement installée depuis le passage par le rouleau compresseur du FMI et les petits aménagements du salaire minimum sont très loin de correspondre à l’effondrement du pouvoir d’achat.
Les batailles pour les revalorisations de salaires menées dans la fonction publique servent de référence pour le monde du travail. Les augmentations de salaires dans le secteur privé, qui seraient de l’ordre de 10 à 20%, et «selon les capacités» des entreprises, selon un membre du patronat, restent modestes. C’est un petit ajustement que même l’UGTA trouve insuffisant.
Le secteur économique, public et privé, a peut-être besoin de l’air frais apporté par le syndicalisme autonome.
28 avril 2010
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