Culture (Mercredi 28 Avril 2010)
Par : Abdennour Abdesselam
Pour la clôture des festivités commémoratives du 30e anniversaire du Printemps berbère, la Maison de la culture de Tizi Ouzou a programmé la représentation de la pièce théâtrale de Mouloud Mammeri intitulée La Cité du Soleil.
La pièce a été jouée dans une parfaite combinaison accomplie par des comédiens du théâtre Jean-Sénac de Marseille et des élèves de l’atelier de théâtre de la Maison de la culture de Tizi Ouzou.
La pièce a été admirablement mise en scène par Hamid Aouameur suivant la sottie aménagée par Mammeri en trois tableaux. Tour à tour, les rôles du grand argentier, le petit idéologue, l’irréfragable juge, le terrible homme d’armes, le prêtre et le général ont été interprétés avec art par les professionnels Roger Cartelier, Stéphane Aizac, Christian Larour.
Le peuple d’Héliopolis était représenté par la pléiade des jeunes Kaci, Lilia, Liès, Madjid et autres Dihia qui battaient les planches aux rythmes des deux rôles hors texte mais judicieusement introduits par Hamid. Il s’agit de la voix sûre de la narratrice Sophia Benamane et les mesures données par l’aveugle et non moins talentueuse cantatrice Charly Fert. L’ensemble tenait lieu d’une fresque théâtrale qu’il fallait bien contempler en ce soir d’avril. La ville d’Héliopolis, dans l’ancienne Égypte, était un centre consacré aux doctrines du culte, particulièrement celui du dieu Soleil, d’où le nom donné à la pièce théâtrale. Cette dernière est une satire faite à la face de tout pouvoir répressif qui ne perçoit le fragile peuple voué par avance aux immondices qu’à travers le prisme déformant d’une simple machine à consommer les enivrantes bénédictions des dieux et que le conseil des élus des dieux se charge de communiquer à leur aise, dans le temps et l’espace. Un pouvoir (des pouvoirs) qui s’assourdissait aux lamentations dont les cris du peuple (des peuples) se cassaient à mi-course sur les pentes raides de l’empyrée où siégeait l’infaillible conseil qui ne parlait pas le même langage que le peuple. Ce langage, les élus le considéraient comme abstrait. Mammeri a choisi la ville comme lieu de la scène où se déroulent les évènements subis par les héliopolitains pour rappeler que tout pouvoir qui repose sur la force décline et disparaît dès la disparition de cette force. Car le lourd quotidien des héliopolitains est semblable à tous les quotidiens des peuples opprimés.
C’est justement cette analogie d’un drame humain pan- mondial qui continue de se produire que Mammeri a dénoncé avec une fermeté chevillée dans sa pièce intitulée La mort absurde des Aztèques, écrite en 1971. Hélas, disait-il, aujourd’hui, on continue de tuer. Il faut signaler que le théâtre Jean-Sénac de Marseille, dirigé par Hamid Aouameur, est devenu un véritable partenaire culturel avec la Maison de la culture de Tizi Ouzou depuis déjà plusieurs années.
28 avril 2010
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