L’Algérie a effectivement un problème et de taille avec cette génération qui lui a certes apporté l’indépendance, mais qui s’accroche au pouvoir qu’elle monopolise depuis 1962. Mais pas pour la raison que s’est permis d’avancer l’anticolonialiste repenti qu’est Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères de son état, qui serait, selon lui, que cette génération est cause des blocages dont souffre l’Algérie parce qu’elle reste prisonnière d’une vision de l’histoire et d’engagements que la société algérienne ne partagerait plus et répudiera quand cette génération ne sera plus aux commandes de l’Etat algérien.
Monsieur «Droit d’ingérence humanitaire», a mis totalement à côté de la plaque en attribuant ce motif à la rupture entre les Algériens et cette génération. Ils ne se reconnaissent plus en elle parce que précisément l’usure et la corruption du pouvoir lui ont fait trahir les idéaux et objectifs qui ont légitimé la lutte pour l’indépendance. Ce que les Algériens donc jeunes et moins jeunes veulent quand ils décrient aujourd’hui cette génération, c’est un retour à ces valeurs qu’elle a jetées aux orties, et non leur oubli et leur enterrement, comme en rêve Bernard Kouchner.
Ce n’est pas parce que cette génération a failli après 1962, que celles venues après elle ne sont plus patriotes et donc moins sensibles aux questions de leur histoire nationale et mémorielle, comme le pense Kouchner. Ne lui en déplaise, en cela, il y a une continuité entre elles.
Ces questions resteront pour longtemps de ce fait au cœur des relations entre l’Algérie et la France. Elles en conditionneront l’approche et le climat. Oui, il y a divorce entre les Algériens et cette génération à laquelle le ministre des Affaires étrangères français a fait allusion, mais sur des problèmes algéro-algériens qui sont la mauvaise gouvernance par cette dernière des affaires de la nation, sa privatisation du pouvoir d’Etat et la prédation qu’elle a engendrée. Avec pour conséquence que l’Algérie, au lieu d’être l’un des phares vers lequel auraient pu se tourner d’autres pays et peuples ayant été subjugués par son glorieux combat anticolonialiste, en est réduite à l’état de république bananière. Voilà ce que les Algériens ne lui pardonnent pas et qu’ils ont à cœur d’effacer quand elle passera inévitablement la main.
Qu’il se détrompe donc le sieur Kouchner. Quand cette génération aura cessé d’être aux affaires en Algérie, ce ne seront pas des «béni-oui-oui» attentifs à préserver l’honneur perdu de la France par des crimes colonialistes qui lui succèderont, mais des patriotes plus intransigeants sur les questions mémorielles, parce que inséparables de leur ambition de les restituer à tous les Algériens, en même temps que la possibilité d’être les acteurs de la construction solide de leur nation. Celle aussi de combattre les révisionnisme et négationnisme qui, en France, se sont fait jour pour réfuter l’héroïsme et la justesse de leur combat anticolonialiste et que l’ex-médecin sans frontière, oublieux de ses engagements passés, a insidieusement repris à son compte en s’attaquant de la façon dont il l’a fait à la génération de la guerre d’indépendance.
25 avril 2010
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