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A la recherche d’une société civile !? par B. Khelfaoui & Remmas Baghdad*

22 avril 2010

Non classé

Qu’est-ce que la société, quelle que soit sa forme? Le produit de l’action réciproque des hommes… Posez telle société civile, et vous aurez tel Etat politique, qui n’est que l’expression officielle de la société civile. Karl MARX (1)



Donner le micro au commun des Che3ayeb Lekhdim, il vous exposera aisément – à partir de la place qu’il occupe en attendant éternellement son tour aux UMC, de ses va-et-vient au marché en ayant des yeux presque délogés de leurs orbites, fixant en alternance la mercuriale des «démunis» et son vieux couffin terni par le désœuvrement et dompté par le « qui enrichit qui !», empruntant la route aux côtés de «ses» trottoirs squattés par les «intouchables», vaincu par des moustiques intrépides et des ordures colonisant les espaces censés verts et recensés « officiellement » et à coup de milliards en rose et jasmin, rasant son oued noirci et alarmé par le terrorisme écologique que subit « le vieux Saïda » par le déferlement en amont des eaux usées de Sidi Mâamar (2), hébété par un urbanisme à architecture de « bidonvillisme » (…) et en n’ayant comme activités de proximité à même de nourrir et développer son univers culturel que ces interminables, abêtissantes et anesthésiantes parties de « double six » – tel un initié de ces bureaux d’études étrangers « qui veut gagner des millions », voire un fin connaisseur, le constat amer, désolant, affligeant, abasourdissant de la gangrène qui ronge une ville en dégradation, une ville qui anime le brasier nostalgique des pieds-noirs, qui atterrissent – en invités – sur son sol, pour se recueillir, en pleurs, sur les ruines d’un passé en fleurs…!

Certes, il faut dépasser le stade du constat pour s’aventurer sur les sentiers difficiles des « chemins qui montent » vers l’action ! Mais alors, quelle alternative civilisée et pacifiste est-elle recommandée pour Che3ayeb Lekhdim, vu que l’homme, comme le souligne Kant(3), « est destiné par sa raison à former une société avec les autres et dans cette société à se cultiver, à se civiliser et à se moraliser par l’art et par les sciences », au-delà d’un engagement journalistique à même de l’inciter à condamner les anomalies et insuffisances constatées, si ce n’est l’action associative réelle et efficace, encadrée et réglementée au sein d’une société civile « crédible » et – il est tout à fait clair – «agréée» !?

Dans cette perspective, loin des projecteurs éphémères et saisissant l’opportunité offerte par des intellectuels qui ont exonéré Saïda, leur mère vénérée, d’un quelconque visa(4), de fidèles filles et fils dévoués à l’amour indéfectible réservé à l’Heureuse, imprégnés de la sagesse contenue dans le message divin «(…) En vérité, Dieu ne modifie point l’état d’un peuple tant que les hommes qui le composent n’auront pas modifié ce qui est en eux-mêmes (…)»(5), et conscients de la quête du pouvoir pour une société civile « bénévole » disposant de compétences qui la prédisposeraient pour une performance alternative entre des fonctionnaires soucieux de leurs « CV » et des élus préoccupés par l’urgence de fructifier « au mieux » leur mandat, ont créé l’association dite AMMS « Association Mouhibbi Madinet Saïda ». En décidant de relever le défi pour labourer une terre associative, rituellement et insoucieusement « sous-cultivée » – décennies respectives « pour une meilleure vie » et « alayha nahya wa alyaha namout » obligent -pour répondre, baroud et karkabou comme décor de fond, à d’opportunistes agendas partisans, cette initiative associative bénévole, qui n’aspire – crédibilité comme principe – à aucune subvention éphémère pour ne point déranger une administration harcelée « d’agréments » pour qu’elle sème à tout vents, s’était fixée, dès l’aube de sa naissance avec le soleil du printemps 2007, un programme d’actions associatives prometteur ! Les dons des généreux bienfaiteurs et les cotisations de ses membres lui permirent, quand même, de réaliser des actions qu’elle jugea adéquates, voire judicieuses pour dépoussiérer un tant soit peu les draps farcis par une société civile en léthargie. Ainsi, et bien qu’elle ne soit qu’à sa troisième bougie, elle compte à son actif associatif des journées de communication exposant tant la situation que les perspectives de l’action associative, des soirées et journées poétiques régénérant le patrimoine culturel du terroir, des remises de prix annuels d’excellence sanctionnant les lauréats des cursus scolaires et universitaires(6), une solidarité périodique sans faille destinée aux enfants assistés du service de la pédiatrie, des opérations en faveur de l’environnement avec implication de la génération infantile, des actions de sensibilisation (sida, tabagisme…) , des travaux de restitution de mémoires saïdéennes(7), des recherches destinées à vivifier les repères historiques saïdéens, des cours de soutien gratuits destinés aux élèves préparant l’examen du bac, un club lecture junior incitant et initiant les enfants à la lecture, un projet d’envergure internationale pour le commerce équitable favorisant et encourageant les travaux d’artisanat, voire le tourisme,…et la création d’une bibliothèque et d’un espace internet « gratuit »… ! Il n’est pas dans nos intentions, à travers ces lignes, de tresser des lauriers à l’association AMMS mais surtout de dévoiler, à travers cette expérience associative vécue, qu’il y a un véritable malaise social ! Malgré l’amplitude de ses actions, l’association déplore un silence assourdissant des citoyens ! Hormis la volonté de ses membres, l’élan du bénévolat est resté lettre morte chez le citoyen saïdi ; pourtant, « l’utilité commune est le fondement même de la société civile »(8).

La question qui se pose sans ambages est : quelles sont les véritables causes qui ont conduit à cette léthargie sociale ? Vit-on dans un entourage schizophrénique ? Même nos enfants sont atteints par ce syndrome du désintérêt. Sinon, comment expliquer aujourd’hui ce manque d’engouement pour les études, les arts, les randonnées, les jeux, les ateliers d’écriture, de peinture, de lecture… L’émulation génératrice d’efforts féconds n’est plus de mise !?

Nos préoccupations et celles de nos enfants sont collées, aujourd’hui, à des bribes de nouvelles sur le pouls de la mercuriale ou le football(9). C’est à qui rapportera le plus de potins qui alimenteraient les discussions sans fin sur la balle ronde et ses frondes ou les coups fins(10) de nos coupe-faim. La routine prend le dessus et l’esprit d’initiative se réduit à une peau de chagrin. On papote, on radote, on blâme ou on s’emporte.

Des perspectives ? Nada ! Elles sont rejetées aux calendes grecques ou carrément inexistantes. Et si quelqu’un osait apportait un brin de changement à cet état de latence en proposant des sorties de secours, il est vite mis sous les feux de la sape. On s’attarde sur l’accessoire et on enterre illico-presto l’essentiel. On se pavane dans ses pantoufles. On préfère penser à panser sa bedaine et rester à la traîne que de prendre les rênes de l’effort, de l’entraide ou de la solidarité, voire instaurer un lobby constructif de notables et de mécènes. Et si on arrive à s’insurger sur un état de fait, cela ne dépasse pas le cercle de sa tablée …

Car, comment expliquer cette démission citoyenne malgré tant d’offres et de sollicitudes, à l’image de cette association qui nage à contre-courant de cette gymnastique qui n’est pas uniquement locale mais nationale. Une vraie désillusion, si ce n’est l’enthousiasme de ces bambins invités à étaler leur talent de lecteur, de poète ou de peintre au cours de cette Journée du Savoir du 16 avril. La flamme qui brillait dans ces regards innocents invitait à plus de sollicitude. Une véritable levée des énergies en synergie devrait s’instaurer car, à l’image de cette citoyenneté biométrique globalisante qui pointe à l’horizon, le futur n’augure – Dieu nous en préserve ! – rien de bon. Une société civile forte, consciente de ses prérogatives, qui devrait contribuer aux propositions étatiques en passant par des exigences légitimes et vers de meilleures conditions d’études. On a pris dans notre pays l’habitude de faire de l’Etat le censeur de la société civile. Au contraire ! C’est à cette dernière que revient la tâche de bâtir, d’encadrer, de surveiller, de garantir le dialogue social en invitant les citoyens à participer à la vie publique. Devenue l’étiquette de toutes sortes de marchandises, ou parfois même le label du vide, la « société civile » forme un lieu commun où les commodités d’un mot de passe permettent de se parler sans savoir ce que l’on dit !

Le problème de la dimension associative est que toutes les associations défendent des idées, des principes, des normes mais ne les font pas triompher ou plutôt ne cherchent pas à les faire triompher au-delà du cercle de leurs membres, ce qui s’apparente à une auto- conviction illusoire et sans lendemain. Le repli sur soi, la multiplication des engagements familiaux et professionnels, l’incommunicabilité et les mass media tétanisent les efforts et les contributions, puis conduisent inexorablement à cette inertie mortifère, car la notion de société civile postule tout d’abord l’existence d’un fait associatif au sens large, c’est-à-dire au minimum la réunion temporaire, formelle ou non, d’acteurs sociaux. Une société civile qui n’est pas associée aux décisions politiques, qui ne formule pas ses propres propositions ou n’échafaude pas de plans d’action présents ou futurs pour empêcher le surplus de misère ou la naissance d’une populace, est vouée indéniablement à l’implosion.

Enfin, puisqu’il n’est pas interdit de rêver, verra-t-on un jour cette lune de destin qui exaucerait les vœux d’indomptables et « naïfs » engagés pour une cause associative encore enfouie dans les ténébreuses galeries d’une labyrinthique foultitude recensée périodiquement, à coups de tapages médiatiques creux et excessivement onéreux, pour les besoins de sièges officiellement électifs et officieusement sélectifs !?

« Quand un peuple veut la vie, force est au destin de répondre » (11) ! A quand ce vouloir, d’autant plus que vouloir c’est pouvoir !?

* Universitaires, Saïda

Notes

1- Marx, Lettre Annenkov, Œuvres I, Pléiade, page 1439.

2- Voir « SOS Oued Saïda en détresse »

3- Emmanuel Kant, « Anthropologie d’un point de vue pragmatique », chapitre : le caractère de l’espèce, édition La librairie, J. VRIN, page 255

4- Voir « Saïda n’a plus besoin

de visa », QO du 16/12/2007

5- Coran, 13,11

6- Voir « Le khoubzisme », QO du 14/06/2008 et « Que va nous rapporter le savoir ? », QO du 01/09/2008

7-Voir « Docteur Moulay Tahar: une vie pour une ville », QO des 26 et 27/10/2009

8- Jean-Jacques Rousseau, «Manuscrit de Genève », Liv. 1, Chap. 5

9- Voir «Au fait ! Et après le foot…la fête ? », QO du 09/02/2010

10- Voir « Solide-Arrêté des coups-fins », QO du 16/09/2009

11- Poème d’Aboukacem Chabbi

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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