Les noms de rues, de lieux, d’édifices et de villes témoignent de l’histoire et de la mémoire collective d’un peuple. En Algérie, ce patrimoine a-t-il été conservé pour les générations futures ? A-t-il été transmis à la jeunesse d’aujourd’hui ?
Le président de l’Association des amis de la rampe Louni-Arezki, Aït- Aoudia Lounis, estime qu’il y a eu une rupture de legs entre la génération de la Révolution nationale et celle de l’indépendance. «Nos enfants méconnaissent tout sur l’histoire du pays. Que représente pour la majorité d’entre eux Larbi Ben M’hidi ? Le nom d’une rue. Quoi d’autre ? Absolument rien», dira-t-il ce jeudi à Alger à l’occasion de la commémoration de la mort de Louni Arezki, guillotiné le 8 avril 1957. Intervenant sur le sujet, le Dr Ouardia Yarmeche, professeur en linguistique, affirme que les jeunes connaissent la rampe Valée, le nom d’un maréchal français, mais ignorent son actuelle appellation, Louni Arezki, martyr de la guerre de Libération nationale. «Nos jeunes ne connaissent pas les héros qui ont fait l’histoire de ce pays, notamment ceux des différentes périodes médiévales et antiques», indique-t-elle. L’Algérien, selon elle, vit un «malaise identitaire». Et d’expliquer : «Les jeunes ne sont plus fiers de ce qu’ils sont et d’où ils viennent. Depuis l’indépendance, on ne cesse de nous imposer une identité qui n’est pas la nôtre. Malgré la richesse de notre identité, les jeunes d’aujourd’hui n’ont guère de repères.» Le Dr Yarmeche déplore, par ailleurs, que des villes et des villages de notre pays portent toujours les noms que leur a attribués l’administration française. «Il est temps de nous réapproprier notre mémoire collective», dit-elle. Quant à la multiplicité des noms d’un lieu et à la dénomination spontanée attribuée par la population à certains endroits, la conférencière pointe du doigt l’administration. Elle regrette également que de nouvelles cités portent des chiffres, telle cité des 100 logements, au lieu de noms de héros nationaux. «Les noms des lieux transmettent le message de l’Histoire. Les héros, les dates importantes et les évènements historiques témoignent de l’histoire politique et culturelle d’une nation.» Ainsi, le Dr Yarmeche incite l’administration à la recherche et l’écriture de toutes les appellations afin d’unifier l’orthographe des noms des lieux et villes et de préserver, par la même, le patrimoine toponymique. «L’informatisation de la toponymie permettra de faire disparaître toutes les appellations obscures des différents lieux attribuées arbitrairement par la population.» Elle suggère, également, que le nom d’un lieudit soit accompagné d’une carte de présentation de la personne ou de l’évènement.
Rym Nasri
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http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2010/04/10/article.php?sid=98342&cid=16
10 avril 2010
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