Par Mekioussa Chekir
Le phénomène des bandes de quartiers tend à prendre une proportion de plus en plus prononcée depuis quelques années. Le cas des troubles ayant secoué, il y a quelques mois, les quartiers populaires de Bab El Oued et de Frais Vallon est très symptomatique de cette propension des jeunes à vouloir régler leurs différends de manière collective en associant quasi spontanément le plus grand nombre de «ouled el houma» pour défendre la cause de l’un des leurs.
Presque tout un quartier se mobilise ainsi comme s’il s’agissait de toute la réputation de celui-ci qui est en jeu. Une question de «nif» quel qu’en soit «lekhssara» et quel qu’en soit le prix à payer. A ce jour, les habitants de Bab El Oued continuent d’assister, impuissants et inquiets, aux descentes nocturnes sporadiquement organisées par ces bandes de jeunes prêtes à tout pour se faire elles-mêmes justice, quitte à en découdre avec les forces de l’ordre qu’elles ne semblent nullement craindre de défier.
Ni la tenue officielle ni les armes arborées par les policiers ne sont de nature à les dissuader d’aller au bout de leur entreprise de casses et de saccages au moment où ces derniers semblent, jusque-là, vouloir éviter le débordement et le point de non-retour. Ce qui n’est pas sans inquiéter davantage les habitants des cités «visitées» par ces jeunes déchaînés, qui se posent la question de savoir qui arrêtera ces derniers. Livrés à la rue, sans perspective d’avenir aucune, ces Algériens désœuvrés semblent avoir choisi de semer le désordre pour dire leur malaise et cela leur plaît tant qu’on les laisse faire. Tant que la répression n’est pas à la hauteur du délit. Les incidents qui continuent encore de survenir à Bab El Oued ne sont pas des cas isolés mais tendent, hélas, à se banaliser jusqu’à nous rappeler les pratiques courantes de violence en Sicile ou en Colombie, lesquelles sont adoptées comme des modes de gestion des conflits. En Algérie la violence a tendance à se généraliser et à prendre des formes de plus en plus multiples. Pour les analystes et autres spécialistes en sociologie ou en psychologie, ce phénomène était prévisible comme étant un passage obligé de la période post-terrorisme.
Cette violence extrême, se conjuguant à d’autres obstacles de taille comme le chômage, la crise du logement, le mal-vivre… ne peut que donner lieu à des situations inextricables et difficilement solubles. En l’absence d’autorité parentale et d’une école véritablement éducative et pédagogue qui prépare les jeunes générations à affronter confortablement leur avenir, nos enfants sont de plus en plus menacés par les risques de déliquescence et d’exclusion sociales et par les perversités du monde de la rue et de la nuit. Les cas de vols et d’agressions dans les lieux publics, les autoroutes… sont d’autant plus alarmants qu’ils interpellent les pouvoirs publics sur l’urgence à prendre le taureau par les cornes avant que le phénomène ne prenne des proportions irréversibles. Il y va de la cohésion de la société et de la quiétude du citoyen, voire de sa survie.
M. C.
6 avril 2010
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