La «solution Diar Echems» n’a pas seulement induit une émulation émeutière dans d’autres bidonvilles de la capitale. De manière moins spectaculaire et néanmoins lourde, elle a aggravé un peu plus la désespérance des très nombreux «ni-ni» d’Algérie. Il ne s’agit pas du fameux mot d’ordre du FFS mais de ces citoyens de l’entre-deux qui disposent d’un revenu assez élevé pour les exclure du logement social, mais pas suffisamment fourni pour prétendre au logement promotionnel.
En théorie, dans un pays où les banques ne spéculent pas à tout-va, le crédit immobilier est une activité rémunératrice et peu risquée puisque adossée à des biens rares et appelés à prendre de la valeur. Néanmoins, le crédit immobilier suppose des emprunteurs disposant de revenus réguliers et «suffisants» au regard de la valeur du bien financé. Or, en Algérie, de nombreux salariés ont certes des revenus réguliers mais pas trop réduits pour pouvoir prétendre à ce type de crédit. Et ceux qui ont des revenus substantiels n’ont pas besoin d’emprunter. Beaucoup de ceux qui ne remplissent pas les conditions, fonctionnaires ou salariés du secteur économique, attendent avec impatience la mise en application du crédit logement à taux bonifié à 1% annoncé depuis juillet 2009.
Cela devrait élargir un peu le nombre de ceux qui peuvent accéder au crédit immobilier, mais il ne faut pas s’attendre jusqu’à preuve du contraire à un bouleversement fondamental de la donne. Ergoter sur «l’inaction» des banques n’est pas sérieux. Les banques, quoi que l’on puisse en penser, sont des agents économiques qui interviennent dans une logique de marché et de rentabilité, elles n’ont pas de vocation philanthropique. Si de nombreux Algériens se retrouvent dans cet entre-deux pénalisant, «ni riches ni pauvres», c’est que l’on construit peu et à des coûts trop élevés. L’offre est restreinte et la demande pléthorique. Les prix sont également dopés par l’abondance de capitaux, plus ou moins gris, sans emploi, qui cherchent à se dissimuler dans la pierre. Des paramètres entêtés qui se sont installés au fil des temps et sont devenus le lieu commun de la crise.
Or, la pénurie structurelle de logements requiert une mobilisation massive, cohérente et soutenue de l’Etat. Le crédit immobilier ne devrait être qu’un élément d’un dispositif vaste et cohérent, il ne peut résoudre à lui seul une grave déficience structurelle qui est l’un des terreaux de tous les radicalismes. Pour que de nombreux citoyens sans logis puissent espérer une sortie du purgatoire, il faudrait un programme de réalisation à la hauteur de ce qui s’est fait en Europe après la Seconde Guerre mondiale : dégager des assiettes foncières et Dieu sait que c’est compliqué chez nous ! et encourager significativement le secteur privé à investir dans la réalisation de programmes d’habitat.
Il faut bien le constater : à travers les différentes démarches, il existe une sorte d’incapacité générique à stimuler ou à impulser des stratégies opérationnelles. Cette incapacité sévit également en période de grande aisance financière. La pénurie de logement est ainsi la conséquence d’une incapacité manifeste à relever l’un des principaux défis politique et social, avec le chômage des jeunes, auquel doivent faire face l’Etat et la société.
31 mars 2010
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