Pour avoir récemment soutenu que le pays devait rapatrier une partie de ses réserves placées à l’étranger et la consacrer à des investissements dans le secteur industriel, Abdelhamid Temmar s’est fait vertement «allumer». Non pas par Louisa Hanoun dont il est «la tête de Turc»,
avec son collègue ministre de l’Energie, mais par Karim Djoudi, le grand argentier du pays, et Laksaci, président directeur général de la Banque centrale. Ce qu’a avancé Hamid Temmar n’est pourtant pas une hérésie au regard du tournant qu’a pris la politique économique du pays, à savoir ne plus compter fondamentalement sur l’investissement étranger pour doter le pays d’un tissu industriel à même de réduire la dépendance à l’extérieur en ce domaine. Il est donc en cohérence avec l’air du temps et c’est sa façon à lui de dire que la stratégie industrielle qu’on lui demande de mettre en œuvre a besoin du financement public, faute d’autres. Pour Djoudi et Laksaci, ses contradicteurs, il n’est pas question de toucher pour cet emploi aux réserves financières de la nation qui sont sa protection contre d’éventuels coups durs auxquels elle pourrait se trouver confrontée à un moment ou à un autre dans l’avenir.
Cette controverse n’est pas nouvelle. Il faut se rappeler que c’est sur ce même thème que Ahmed Ouyahia, alors chef du gouvernement, et Abdelatif Benachenhou, son ministre des Finances, ont eu une passe d’armes dont celui-ci a fait les frais, puisqu’il s’est dit que c’est à cause de cette polémique qu’il fut «débarqué» du staff gouvernemental. A l’époque, c’était Benachenhou qui était dans la position que défendent aujourd’hui Djoudi et Laksaci, alors que le chef du gouvernement plaidait à peu de choses près pour la même thèse qu’assume maintenant Hamid Temmar. En son temps, Abdelatif Benachenhou faisait preuve de conséquence en s’opposant à l’interventionnisme étatique financier ou autre dans la sphère économique, au principe que cela contrevenait à la logique du libéralisme économique, alors dogme triomphant dans les sphères dirigeantes du pays.
Le paradoxe est que ce sont ses contradicteurs qui l’ont emporté sur lui malgré ce contexte de libéralisme auquel l’Algérie a été convertie. Allons-nous assister au paradoxe à l’identique que serait un possible prochain départ de Temmar de l’équipe ministérielle pour avoir enfin une fois avancé une proposition qui a un peu de sens et de cohérence dans le cadre de la nouvelle orientation qu’est en train de prendre la politique économique et industrielle ? Ce qui serait encore une victoire des cercles qui rament à contre-courant des réalités et des nécessités du moment.
Du temps où Benachenhou ferraillait contre Ouyahia, comme aujourd’hui où l’on entend Djoudi et Temmar se contredire, il n’y a qu’une constante : c’est celle du manque flagrant de cohérence dans les choix d’une politique économique gouvernementale et de cohésion dans l’équipe qui en est chargée.
30 mars 2010
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