Les importateurs de médicaments doivent produire d’ici une année. A l’ère du «souverainisme économique», un ministre algérien fait semblant de croire qu’un miracle peut s’opérer en douze mois à la suite d’une injonction. On aurait aimé voir ce miracle s’opérer aussi au sein des administrations et des banques publiques. Mais en économie, les miracles n’existent pas. Ce qui compte, c’est avoir une politique économique qui s’appuie sur les réalités, qui soit cohérente et durable. Le «commerce» et «l’industrie» du médicament ont vécu en l’espace de cinq ans une valse de mesures et de contre-mesures qui déroutent les observateurs et arrangent toux ceux qui trouvent leur compte dans un marché désorganisé.
Le ministre de la Santé qui vient de fixer une échéance d’une année aux importateurs de médicaments n’est pas le ministre du Commerce qui, il y a quelques années, de Genève, alors qu’il effectuait une de ses nombreuses missions pour l’accession «à tout prix» de l’Algérie à l’OMC, a annoncé que l’obligation légale pour les importateurs de produire après deux ans d’activité était caduque. Saïd Barkat et Nourredine Boukrouh ne sont pas la même personne mais ils font partie du même gouvernement qui n’arrive pas à définir une approche durable. Quand M. Boukrouh – et il ne l’a fait pas de lui-même – a annoncé en février 2005, au 8ème round des négociations pour l’accession à l’OMC, «la suppression de l’obligation d’investir dans la production pour les grossistes importateurs de médicaments», qui est resté sur le carreau ? Des investisseurs ayant cru à la parole d’un gouvernement qui accordait avec légèreté des concessions à des négociateurs bien décidés à obtenir le maximum et au delà. Que ne donneraient-ils pas ces négociateurs pour asseoir l’image d’une OMC, présentée comme un «must», une «nécessité»
Quelques années plus tard, l’Etat décide d’interdire l’importation des médicaments produits en Algérie comme s’il venait de comprendre soudainement que l’entrée à l’OMC était un objectif lointain. Rien de surprenant. Mais ce qui a été perdu dans cette valse-hésitation sur le médicament, c’est bien la confiance des investisseurs algériens. Dans la filière du médicament, ils ont eu une illustration saisissante d’une absence de cohérence et d’un changement sans préavis de politique. Une industrie pharmaceutique ne s’improvise pas même si le «marché» est disponible. Elle a besoin d’une politique arrêtée, fermement décidée à discriminer entre la production et l’importation. Elle a besoin de mesures incitatives qui rendraient l’activité de production plus attractive que l’importation et le simple conditionnement. Elle a enfin besoin d’être menée dans la durée.
Sur ces éléments, c’est le gouvernement de la RADP qui a été pris à défaut. Ce n’est donc pas une surprise que les opérateurs du secteur du médicament n’apprécient guère les injonctions de Barkat. A l’expérience, beaucoup pensent que ces injonctions ne vont même pas tenir une année
et que d’autres instructions viendront les effacer.
24 mars 2010
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