Au coin de la cheminée
Le maître voleur (3e partie)
Résumé de la 2e partie : A la joie et à la surprise du paysan et de sa femme, le riche seigneur qui s’est présenté à eux, est leur fils bien-aimé parti depuis longtemps. Le hic : c’est un voleur.
Si notre seigneur le comte, là-haut dans son château, venait à apprendre qui tu es et ce que tu fais, remarqua le père, il ne te prendrait certes plus dans ses bras pour te bercer, comme il le faisait quand tu étais petit, mais il t’enverrait à la potence !
— Sois tranquille, père, il n’en fera rien : je connais mieux l’art de ma profession ! J’irai lui rendre visite aujourd’hui même. Au début de la soirée, le maître voleur alla reprendre place dans son carrosse et se fit conduire au château, où le comte, le prenant pour quelque noble et important personnage, le reçut avec grande courtoisie. Mais à peine l’inconnu eut-il décliné son identité que le comte blêmit et resta figé un long moment dans un silence.
— Tu es mon filleul, finit-il par lui dire, c’est pour cette raison je te traiterai avec indulgence. Puisque tu te vantes d’être un maître voleur, je vais mettre ton art à l’épreuve ; mais si tu ne t’en tires pas à ton avantage, tant pis pour toi : tu fêteras tes noces avec la fille du cordelier (autrement dit : tu seras pendu) et les corbeaux accompagneront tes noces de leur musique !
— Cherchez et trouvez trois épreuves, monsieur le comte, aussi difficiles qu’il vous plaira, lui dit le maître voleur, et si j’échoue, vous ferez de moi ce que vous voudrez.
Le comte réfléchit un instant avant de dire :
— Très bien : en premier lieu, tu devras me dérober mon cheval favori dans l’écurie ; deuxièmement, tu auras à nous enlever le drap de dessous dans notre lit, à ma femme et à moi, quand nous serons couchés, sans que nous nous en apercevions, et il faudra en outre que tu prennes son alliance au doigt de ma femme ; comme troisième et dernière épreuve, tu me traîneras le curé et le sacristain hors de l’église. Garde bien tout cela en mémoire, sinon ton cou en répondra. Le maître voleur s’en alla à la ville voisine où il acheta, pour le revêtir, le costume que portait une vieille femme, puis il se grima le visage en brun et se peignit encore quelques vieilles rides, se transformant de telle sorte que personne n’eût su le reconnaître. Cela fait, il se fit encore remplir un tonnelet de vin de Hongrie auquel il mélangea un puissant narcotique. Il mit le tonnelet dans une hotte, la hotte sur son dos et s’en revint ainsi, d’une démarche lente et hésitante, jusqu’au château du comte. Il faisait déjà sombre quand il s’y présenta, ou plus exactement quand il alla s’asseoir sur une borne, dans la cour, et se mit à tousser comme une vieille femme bronchitique, tout en se frottant vigoureusement les mains comme quelqu’un qui a froid. (à suivre…)
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19 mars 2010
1.Contes