Au coin de la cheminée
Le maître voleur (2e partie)
Résumé de la 1re partie : Au seigneur qui lui demandait pourquoi il n’attachait pas l’arbre tordu qu’il avait aperçu dans son jardin, le paysan répondit qu’il était trop vieux et que c’est quand ils sont jeunes que les arbres doivent être redressés.
C’est comme avec votre fils, remarqua l’étranger, Si vous l’aviez dressé quand il était jeune, il ne vous aurait pas quitté ; mais à présent, il doit être endurci lui aussi, noueux et desséché.
— Probablement, oui : cela fait longtemps qu’il est parti, reconnut le paysan. Il doit avoir beaucoup changé.
— Le reconnaîtriez-vous si vous le rencontriez ?
— Physiquement peut-être pas, dit le vieux, mais il a une tache d’envie sur l’épaule, qui a la forme d’une fève. A ces mots, l’inconnu retira sa veste, découvrit son épaule et fit voir la fève au vieux paysan qui s’exclama : «Mon Dieu ! mais tu es vraiment mon fils !» Et son cœur en était tout ému.
— Mais comment se peut-il que tu sois mon fils, reprit-il et que tu sois devenu le grand seigneur que voilà, vivant dans le luxe et l’abondance ? Comment y es-tu arrivé ?
— Oh ! père, le jeune arbre n’était lié à aucun tuteur, répondit le fils, et il a poussé de travers ; à présent il est trop âgé et jamais plus on ne le redressera. Tu veux savoir comment je me suis procuré tout cela ? C’est que je suis devenu voleur. Mais n’en sois pas choqué : je suis un maître voleur, un artiste du genre. Il n’y a pas de serrure qui tienne, pas de verrou qui existe pour moi : ce qui me plaît est à moi. Mais ne va surtout pas croire que je vole misérablement comme les voleurs ordinaires, n’importe où, n’importe comment ! Je ne prends que le surplus des riches et les pauvres n’ont rien à craindre. Je préfère leur donner que de leur prendre quelque chose. En outre, ce qui ne réclame ni effort, ni astuce, ni subtilité, ne m’intéresse pas et je n’y touche pas.
— Il n’empêche que cela ne me plaît guère, mon fils ! Un voleur reste un voleur n’importe comment, dit le père. Cela finira mal, c’est moi qui te le dis ! Ils allèrent retrouver la mère qui pleura de joie en apprenant qu’il était leur fils, et qui versa des torrents de larmes en apprenant qu’il était un maître voleur. Mais la brave femme conclut : «Même s’il est voleur, c’est mon fils quand même ! Et mes yeux l’auront vu encore une fois !» Alors ils passèrent à table et le fils prit part, une fois encore, au repas familial, auquel il n’avait plus goûté depuis longtemps. (à suivre…)
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19 mars 2010
1.Contes