Culture (Jeudi 18 Mars 2010)
Souffles…
Le sacré profane : temporalité et spiritualité (1/2)
Par : Amine Zaoui
Comment donner à un lieu religieux et sacré sa dimension culturelle, sociale et économique ? Comment peut-on le faire sortir de sa religiosité étroite et le délivrer à sa dimension de temporalité et d’historicité ?
Les lieux, par leur riche mémoire, représentent des trésors inépuisables. Dans cette rapide évocation, je ne citerai que trois hauts lieux religieux dans notre pays. Ils sont d’une taille universelle. Trois lieux religieux appartenant aux trois religions monothéistes. D’abord, ces lieux nous rappellent la diversité et la tolérance qu’a connue l’histoire ancienne et moderne de notre pays. Un pays avec une histoire sans haine, ouverte sur de vastes horizons humains. Certes, notre terre abrite des centaines de lieux sacrés, qui relèvent de la religion savante ou populaire. Ils sont répandus sur les quatre coins de notre vaste Algérie dans le nord, comme dans le sud, dans l’est comme dans l’ouest, des lieux qui sont capables d’occasionner, par leur symbolique religieux, par leur historicité, des milliers de réflexions, des milliers d’emplois. Faire nourrir des milliers de têtes et des milliers de bouches.
Comment faire revivre les lieux religieux dans le profane sans entacher leur spiritualité ? leur donner une vie vive dans le cours de l’histoire moderne sans les couper de leur passé ?
Primo, nous avons ce tombeau de Okba Ibn Nafiê (622-683). Et Okba Ibn Nafiê al Fihri est l’un des compagnons, par naissance, du prophète (QSSSL). Il est mort dans cet endroit appelé aujourd’hui Sidi Okba, dans la wilaya de Biskra. Mais ce lieu religieux et vénéré vit dans une surdité complète et totale. Toute sorte de surdité : religieuse, intellectuelle, historique et touristique. C’est un lieu d’investissement touristique exceptionnel. Le tourisme religieux.
Mais, en l’absence de toute vision qui peut prendre en charge ce lieu, l’espace se vide de son symbolique. Quand le lieu se vide de son symbolique, il se transformera en un simple “morceau de terre” aveugle. Qui ne dit rien. Je ne veux pas aller dans d’autres chemins : comment Okba a été tué ? Par qui il a été tué ? Pourquoi il a été tué ? Comment il a été tué ? Ces questions ne sont de l’ordre de ce rappel interpellant ce lieu sacré. Ce que je veux exposer ici, c’est la nécessité d’une intelligence locale pour la récupération intellectuelle et touristique de ce lieu religieux afin d’attirer plus de pèlerins, de touristes, d’historiens et d’économistes.Je veux réveiller le mort dans sa tombe, dans son lieu.
Si on ne veille pas sur l’établissement d’un équilibre confiant entre sa divinité et sa dimension profano-historique, Le réveil d’un lieu religieux est considéré comme un acte de “sédition”.
À suivre…
A. Z.
aminzaoui@yahoo.fr
25 mars 2010 à 8 08 37 03373
Culture (Jeudi 25 Mars 2010)
Souffles…
Le sacré profane : temporalité et spiritualité (2/2)
Par : Amine Zaoui
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Secundo, Nous avons aussi le tombeau de “Saint Augustin” (354-430), fils de cette terre ancestrale, situé à la basilique d’Annaba (Hippone). Saint Augustin, l’écrivain berbère est considéré comme l’image la plus forte dans la Méditerranée religieuse. Figure emblématique, campée entre les questionnements philosophiques, religieux et artistiques. Nos voisins, sur nos frontières de l’est, touristiquement bien alertés, ne cessent de puiser dans le capital symbolique de cette personnalité religieuse. Nous, sans flair culturel, avec une cécité touristique, nous n’avons pas pu rendre à ce lieu de pèlerinage sa dimension humaine et universelle, qui n’est, en fin de compte, qu’une partie de l’image de notre Algérie plurielle. Ainsi, nous nous trouvons incapables d’investir dans le symbolique. Tercio, notre terre resserre aussi la tombe historique du rabbin “Ephraïm Aln’kaoua” (1359 – 1442) située dans la ville de Tlemcen. Fuyant les crimes de l’inquisition en Andalousie, grâce à l’intervention de ce rabbin du (14e siècle) auprès du Sultan de Tlemcen, la communauté juive put être rétablie. Depuis sa mort, sa tombe est considérée comme un lieu de grand pèlerinage des juifs. Mais ce lieu religieux demeure mal exploité, non réfléchi sur le plan historique et touristique. Je réveille le mort dans sa demeure. Et si on ne veille pas sur l’établissement d’un équilibre entre sa divinité et sa dimension profane et historique, le réveil d’un lieu religieux est considéré comme un acte de “sédition”. Nos voisins, sur nos frontières de l’ouest, à titre de rappel, ont construit “la mosquée” de Casablanca, ce lieu religieux érigé, les pieds dans l’eau océanique, n’est pas destiné uniquement pour servir Dieu, mais également pour épargner du pain à des milliers de petites gens. Aux alentours de cette maison d’Allah, avec une politique d’intendance de l’espace, bien réfléchie, se sont créés des milliers d’activités économiques, culturelles, touristiques et commerciales. Au tour de cette maison d’Allah, il y a les vendeurs des livres ou de cartes postales, des photographes, des restaurateurs, des coiffeurs, des taxis, des hôtels, etc. La maison d’Allah n’est pas élevée uniquement pour prier Allah, mais elle est faite aussi pour ériger et célébrer la vie humaine. Chez nous, en Algérie, jusqu’à nos jours, les lieux religieux n’ont pas dépassé leur fonction primaire ou première, celle de prière ou de pèlerinage pauvre et décousu. Réveillons-nous nos lieux ? Réveillons-nous les âmes des lieux !?
A. Z.
aminzaoui@yahoo.fr
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