15-03-2010 Point Net
Rarement une grève a mis autant de monde à la fois dans l’embarras. D’abord par sa durée, le «débrayage» des médecins de la santé publique fait largement dans l’inédit. Ce n’est pas courant en effet de voir, en Algérie comme ailleurs, des hôpitaux partiellement paralysés alors que leur activité consiste, faut-il le rappeler, à soigner des malades qui pour la plupart ne peuvent pas attendre au risque de mettre leur vie en péril.
Cela fait maintenant près de trois mois que les hôpitaux du pays, dont la santé( !) n’est déjà pas très reluisante en temps de pleine activité, tournent au service minimum et il n’y a manifestement pas grand monde pour s’en inquiéter outre mesure. Ensuite par sa relative discrétion.
La faiblesse des relais sociaux et médiatiques de cette grève un peu trop silencieuse par rapport à son ampleur et à ses implications théoriques soulève des questions dont certaines ne sont pas agréables à entendre. D’abord la plus évidente : a-t-on le droit,
de part et d’autre de la barrière, de «laisser pourrir la situation», laisser souffrir ou mourir des malades, repousser des rendez-vous de soin qui sont déjà assez longs en période normale et mettre la vie de citoyens en danger ?
Et cette réponse, inévitable en dépit du fait que renvoyer dos à dos deux protagonistes en conflit apparaît toujours comme une solution de facilité : les pouvoirs publics, comme les grévistes, n’ont jusque-là fait aucun effort pour trouver des solutions qui puissent désamorcer la crise.
Ce n’est pas parce que la grève de ceux qui sont censés veiller à notre santé a toujours sa dose d’impopularité que les pouvoirs publics se croient obligés de jouer sur cette corde.
Ce n’est pas non plus parce qu’on exerce un métier «sensible» qu’on se croit en droit d’exploiter jusqu’au bout sa position de force. Le bon sens n’est peut-être pas toujours suffisant pour venir à bout des problèmes, mais on peut rarement s’en passer.
Beaucoup de médecins grévistes travaillent dans des structures de santé privées ? La question peut se discuter. Moralement, il peut être en effet embarrassant de quitter le piquet de grève d’un hôpital où se bousculent les gens de modeste condition et d’aller enfiler sa blouse là où les gens ont les moyens de payer.
Mais légalement, ça n’a pas l’air d’être un problème, ce qui est tout de même un… problème ! Pourquoi les médecins seraient si inégalement motivés par les deux lieux de travail ?
Pourquoi les conditions d’exercice de leur métier dans les cliniques privées ne sont d’aucune commune mesure avec celles des hôpitaux publics ? Un compromis utile est-il possible après trois mois de grève ? Sans doute. A condition d’en parler. Et si tout le problème était là ?
16 mars 2010
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