Il y avait déjà trois clients dans le taxi. Il s’arrête : «Ouine ?». «Lelbled». Cela veut dire centre-ville. «Monte !». Et pousse-toi que je te pousse, le client s’installe. C’est le quatrième. Première, la voiture s’engage. La discussion était déjà installée. Ils semblaient tous être d’accord pour dire que la ville est devenue un grand chantier. C’est bien, au moins ça travaille. Et pour une fois,
ce n’est pas du bricolage. Ça creuse sérieusement et ça avance. Ce n’est pas grave si les voitures souffrent : dans quelque temps, on roulera sur des tapis et le piéton circulera sur des trottoirs dignes de ce nom.
«Ouella ouach tgoul, el-hadj ?». Le chauffeur s’adressait au dernier «chargé» pour l’embarquer dans la discussion. «Manich hadj. Il se peut que je sois plus jeune que toi». «C’est de la politesse, ya mon frère, c’est tout. Moi, cela me ferait plaisir qu’on m’interpelle de la sorte. Je considère que c’est beaucoup de respect à mon âge».
Il descend la fenêtre de sa portière pour cracher ses entrailles et, d’un revers de la main, s’essuie ce qui lui sert de bouche. «Déposez-moi juste ici». Combien ? 58 dinars ! Le client lui donne 100 dinars. «Scuse-moi, il vous manque deux dinars, je n’ai pas de monnaie». «Ce n’est pas grave». Le client descend. Transvasement. Le dernier arrivé saute devant.
A peine le taxi a-t-il démarré qu’il s’arrête car hélé par un client. «Ouine ? Lelbled ! Rkeb». Heureusement que c’est les bagnoles qui font les travaux. Les nôtres, tous des tricheurs. Il dépose un autre client. «Scuse-moa, il vous manque cinq dinars, je n’ai pas de monnaie». Des scuse-moi, il y en a eu et des ce n’est pas grave aussi. Les nôtres sont tous des khiyane. Les étrangers eux travaillent benniya et ils sont d’une correction
«Je descends ici !». «Non, je ne peux pas garer». Il fait 500 m avant de s’arrêter. «C’est combien ? Soixante dinars», répond le chauffeur. «Scuse-moi, je n’ai que 58″, dit le client. «Ahhh non, si chaque client me prenait deux dinars fel coursa, il est préférable de garer la voiture et de ne plus travailler !» Il lui tend un billet de 1.000 dinars. «Scuse-moi, je n’ai pas de monnaie». «Allez-y en faire chez le marchand de tabac». »Ce n’est pas à moi de le faire, yal hadj». «Manich hadj !», répond le chauffeur de taxi
13 mars 2010
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