Nous ne pouvons oublier
On raconte que, dans la période de l’ignorance, deux frères partirent en voyage. Ils firent halte à l’ombre d’un arbre près d’une terre caillouteuse. Dans l’après-midi, un serpent portant un dinar sortit de sous les cailloux et jeta la pièce entre leurs mains. Ils se dirent :
- « Cela doit provenir d’un trésor caché par ici. »
Ils restèrent trois jours dans ce lieu, et le serpent sortait chaque jour leur apportant un dinar.
L’un des frères dit à l’autre :
- « Jusqu’à quand faut-il attendre ce serpent ? Tuons-le et creusons pour trouver ce trésor et l’emporter. » Mais son frère l’en empêcha et lui dit :
-« Qu’en sais-tu ? Peut-être seras-tu à bout de force avant de trouver cet argent. »
Mais l’autre ne l’écouta pas ; il prit une hache et attendit le serpent. Lorsque celui-ci sortit, il lui asséna un coup qui blessa sa tête mais sans l’achever.
Alors le serpent s’abattit sur lui, le tua et rentra dans son terrier.
L’homme enterra son frère et resta jusqu’au lendemain ; le serpent sortit, la tête bandée, mais sans le dinar habituel.
- « Ô toi, dit l’homme, je jure par Dieu que je ne me suis pas réjoui du mal qui t’a été fait, j’ai même interdit à mon frère d’agir comme il voulait, mais il ne m’a pas écouté. Si tu veux bien demander à Dieu qu’il nous soit témoin : tu ne me feras pas de mal, je ne te ferai pas de mal, ainsi tu reviendras à ton ancienne habitude. »
Mais le serpent refusa. -« Pourquoi refuses-tu? lui demanda l’homme. »
-« Parce que, répondit le serpent, je sais que tu ne saurais garder ta bienveillance envers moi, ayant sous tes yeux la tombe de ton frère ; et ma propre bienveillance envers toi aura une fin également, car ma blessure ne cesse de me faire souffrir. »
AL–DAMÎRÎ
9 mars 2010
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