Une ville, une histoire
Si l’Algérie m’était contée (11e partie)
Par K. Noubi
Région : Le site d’Oran a été occupé dès la préhistoire ainsi que l’atteste la station d’Ifri où on a retrouvé de nombreux vestiges, conservés au musée d’Oran.
Oran est la deuxième ville d’Algérie, par le nombre de ses habitants, mais aussi par son activité économique. Elle est construite au fond d’une baie ouverte au nord, à 100 m d’altitude.
Selon une hypothèse, le nom d’Oran, Wahran, signifierait «endroit difficile» ou «coupure», à cause du site escarpé sur lequel la ville a été édifiée. Sans doute a-t-on voulu rattacher le nom au verbe arabe wahara, qui signifie : jeter, précipiter, faire tomber. Selon une autre hypothèse, la ville porterait le nom de son fondateur, un certain Boucharam Ouaraham, sur lequel nous ne disposons pas d’informations sûres. Une troisième hypothèse peut être donnée, cette fois-ci par le berbère, langue longtemps en usage à Oran : «Oran se lit wahran, mot qui signifie les lions.»
Le site d’Oran a été occupé dès la préhistoire ainsi que l’atteste la station d’Ifri où on a retrouvé de nombreux vestiges, conservés au musée d’Oran : haches, couteaux, scies en silex, en quartzite ou en grès, témoins d’une intense industrie. On ignore si le site d’Oran a été occupé par les Phéniciens et les Romains, comme Mers el-Kébir (le Portus Divini des Romains), Béthioua (Portus Magnus) ou Aïn Témouchent (Albulae), villes proches.
On n’y a pas trouvé de vestiges, mais sa position géographique, proche de la mer, a dû attirer les Phéniciens, peuple de navigateurs et de commerçants qui, même s’ils ne s’y étaient pas installés, ont dû y fonder, comme ils l’ont fait à plusieurs endroits de la côte algérienne, des comptoirs. Des villages berbères ont dû aussi exister dans l’antiquité et il n’est pas impossible que la ville ait été édifiée sur le site de l’un de ces villages.
La ville aurait été fondée au début du Xe siècle de l’ère chrétienne, en 903, ou, selon une autre estimation en 937. Des marins andalous, voulant assurer un relais pour leur commerce avec Tlemcen et d’autres régions de l’intérieur, auraient édifié les premières constructions : des entrepôts et quelques habitations, ce qui suppose une présence permanente.
Cet établissement a connu une expansion rapide au point de devenir une ville et d’attiser les convoitises. En 901, il est occupé par les Fatimides, dynastie chi’ite établie au Maghreb, à l’époque. Les Almoravides s’en emparent en 1083, puis c’est au tour de leurs successeurs, les Almohades de l’occuper. Au siècle suivant, c’est au tour d’une autre dynastie berbère, les Mérinides, de la conquérir : les Mérinides qui avaient occupé tout le Maroc et une partie de l’Andalousie, ambitionnaient de s’emparer de tout le Maghreb, mais ils se sont arrêtés à Oran.
Ces changements successifs de dynasties n’ont pas empêché Oran de prendre de l’importance : la ville commerçait non seulement avec les autres contrées du Maghreb et de l’Andalousie, mais elle avait aussi des relations commerciales avec les villes de Marseille, de Gênes et surtout de Venise, auxquelles elle vendait de la laine, des tapis, des burnous, du cumin et d’autres produits recherchés à l’époque.
Gouvernée par les Banu ziyân de Tlemcen, la ville garde sa prospérité. Ibn Khaldoun écrira, enthousiaste, qu’Oran est la ville la plus riche du Maghreb et que quiconque y entre pauvre et malheureux, en ressort, riche et heureux ! (à suivre…)
K. N.
19 février 2010
Histoire