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Faire manger un peuple par les oreilles

17 février 2010

Contributions

Faire manger un peuple par les oreilles

par Kamel Daoud

L’un des systèmes de défense le plus saugrenu de l’actuelle équipe propriétaire du pays, face aux galactiques scandales de détournements et corruption, est de développer trois arguments valables pour moutons dévitalisés: 1°- Laisser la justice suivre son cours puis on verra. 2°- la relation entre la corruption et le «politique» n’est pas avérée.         3°- je n’ai pas encore acheté les journaux donc je ne sais rien.



Cela nous a été servi après l’affaire Sonatrach et celle de l’autoroute est-ouest par un Premier ministre, un ministre de souveraineté, un ministre d’Etat chef d’un parti politique. On a donc déjà compris que la piste du «je l’ai appris par les journaux» est une plaisanterie d’adolescent et que celle de «laissez la justice suivre son cours» est une vieille méthode somnifère. Il reste celle d’Ouyahia quand il a osé nous dire que la relation entre la corruption et le «politique» est une rumeur de café.

En principe, on devait en rire et transmettre le rire à nos enfants et à nos petits-enfants le long des siècles. En vérité, on devrait en pleurer tant cela est l’expression d’une parfaite débilisation de notre statut de peuple indépendant mais pas encore né. Chez nous, mis à part les premières années de la lutte de libération, tout est politique et toute politique est une affaire d’argent. Comment le prendre, le partager, le cacher, le détourner, s’en salir ou s’en gaver, en mourir ou en manquer. Il n’y a aucune récompense au militantisme politique agréé que le Pouvoir, et il n’y a aucune preuve que le Pouvoir est un pouvoir s’il ne se partage pas l’argent, et la terre. C’est-à-dire l’argent enfin de compte. Dire que les affaires de corruption sont une maladie monétaire qui n’a aucun lien avec le système politique actuel est une infantilisation du peuple et du cosmos. Il ne faut même pas faire l’effort d’expliquer que les corruptions sont un produit dérivé des répartitions des pouvoirs, des dictatures sans contrôle et du plus gros porte-monnaie national, celui de l’argent public. On ne peut détourner de l’argent en effet, lorsqu’on est pauvre, impuissant, sans protecteurs politiques et sans moyens et lorsqu’on n’a pas un poste important. Il y a un point commun entre un guichetier de Poste malveillant, un directeur de Sonatrach et un ministre véreux : ils sont un travail important, un parti invisible et une délégation de signature. Pour manger de l’argent sale, il vous faut un Etat sans contrôle populaire, un pays sans démocratie, des complices de plus en plus haut placés en fonction de la somme à voler, et un accès aux marchés publics et aux salaires des martyrs de l’indépendance. La somme de tout cela s’appelle «politique».

En Algérie, nous avons deux partis politiques comme aux Etats-unis: un parti qui gouverne et un autre qui voudrait bien gouverner. Le premier s’appelle le Pouvoir, le second s’appelle «j’attends mon tour». Entre les deux, il existe bien des gens honnêtes ou des gens qui le sont devenus après leur licenciement ou leur mise à la retraite, mais cela n’a pas d’importance. L’essentiel est que la corruption est un exercice du premier parti : celui qui décide. Le second est propre parce qu’il est fauché, le premier est coupable parce qu’il a deux poches.

Dire donc que le lien entre politique et affaires de corruption ne sont pas liés, c’est nous dire que nous les Algériens nous en sommes encore aux dents de lait des premiers jours de l’indépendance. C’est pour conclure que cette chronique n’aurait même pas dû être écrite : lorsqu’on écoute quelqu’un vous dire que le lien entre la corruption et la politique n’est pas avéré, ce n’est même plus la peine d’argumenter. L’immoralisme des dernières affaires de Sonatrach & Cie est tellement évident que certains ont donc pensé y ajouter celui de quelques déclarations encore plus insultantes. Lorsqu’un pays vole ses propres poches en disant qu’il n’y pas de lien entre la veste et les sous, il devient même immoral pour un policier de courir derrière un voleur de portable dans les rues.

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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