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Driss Chraibi, la mère et la civilisation

17 janvier 2010

LITTERATURE

1-Driss Chraibi, la mère et la civilisation

Un marocain laïque et révolté, un tunisien juif et antisioniste. Le Maghreb, au moins celui de la culture et des arts, méritait au moins cela. D’autant par ces temps de plate monotonie et d’imitation érigée au summum de l’art. Balade donc à l’ouest et à l’est de nos frontières naturelles en compagnie de ceux des plus grands écrivains maghrébins du siècle passé.

Même s’il aura été particulièrement choqué par le protectorat français sur son pays, l’écrivain marocain Driss Chraibi n’en aura pas eu la dent d’autant plus dure avec les dures conditions imposées à son peuple par un féodalisme d’un autre âge et dont les méthodes de domination contrastaient singulièrement avec celles en usage côté colonial. C’est donc à la lisière entre ces deux aberrations qu’il grandit au sein d’une famille dont on peut dire que socialement «elle se situait au milieu…» C’est au milieu des années cinquante du siècle passé qu’il s’affirme avec une première publication qui aura eu un succès d’estime considérable : Les boucs. Mais avant, il aura fallu faire autant avec ce pays qui fut le sien qu’avec une famille que n’épargnèrent pas les coups du sort. La mort subite de son frère aîné l’aura marqué et il en aura gardé les traces toute sa vie. Ce fut son premier apprentissage du deuil familial, d’autant plus marqué s’agissant de la mère. Cette mère dont, très jeune, il ne put plus supporter la condition. Dont il aura souffert intérieurement. Substitut à cette situation révoltante, l’école, laïque celle-là, française celle-là. Car ce fut aussi un des rôles de l’école coloniale ouverte aux indigènes : les amener à l’évidence que tout ce que l’on pouvait y trouver ne pouvait qu’être supérieur à son monde endogène. Bien évidemment Chraibi ne fut pas d’accord avec cette façon de faire. Et cela ne fit qu’accentuer davantage encore ce sentiment de marge, cette affection toute particulière qu’il développa ensuite pour tout ce qui n’est pas conforme à la norme, aux normes, au bon entendement. Il vécut l’exil comme une sorte de prolongement «naturel» de sa condition historique initiale. Cette question du basculement entre deux cultures, de l’acculturation, dirait-on dans le jargon actuel, aura été au centre non seulement de ses préoccupations, mais de celle de toute une génération maghrébine des plus talentueuses et il est vrai marquée par le vaste mouvement de fond en faveur de l’indépendance des peuples et des  pays sous domination coloniale.

Comme l’expliquent nombre de psychanalystes ou encore de critiques littéraires, le scénario familial initial est dans bien des cas fondamental dans le développement futur de celui ou de celle qui deviendra poète, écrivain, bref, quelqu’un qui a à cœur les pulsations intimes des siens autant au moins que les siennes propres. L’image de la mère s’avère donc fondamentale dans la vie et l’œuvre de quelqu’un comme Driss Chraibi, mais ce n’est déjà plus l’image nostalgique, strictement filiale, toute d’attachement et d’amour que l’on connaissait jusque-là ; non, lui, prend à bras le corps, à travers ce qu’il lui aura été donné de vivre de la condition maternelle, la nécessité d’une transformation radicale d’un ordre social d’un autre âge. Une forme certaine d’engagement. Chacun étant libre de réagir à son niveau. C’est sur cette première révolte que vont se greffer toutes les suivantes, le poussant de plus en plus à une marginalité d’autant plus grande que l’originalité des œuvres  qu’il publie régulièrement va en s’affermissant et se renforçant. Qui ne se souvient de l’inoubliable «Une enquête au pays» paru vers la fin des années soixante-dix et où il fustige, avec tout le talent et l’art de conter qui furent les siens, un système qui n’en finit plus de finir ; en voie de pourrissement, oserait-on dire…Tout au long d’une œuvre forte de plus d’une trentaine de romans, il n’aura eu de cesse de poser sur ses contemporains ce regard à mi-chemin de la froide lucidité et de la dérision la plus tendre ; sans doute un peu comme un antidote à l’amertume et au désenchantement qui marquèrent les générations des grandes indépendances, notamment arabes et africaines.

Par Malik-Amestan  B.

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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