Histoires vraies
Mourir libre
Résumé de la 7e partie n Spartacus, pour venger la mort de Crixos, organise des combats mortels entre ses prisonniers…
Spartacus va-t-il faire de même (que Hannibal) ? Va-t-il épargner la ville (Rome) et s’en retourner à Capoue d’où il est parti ? Dans tous les temples de Rome, les prêtres font des sacrifices et le peuple lance au ciel ses prières pour qu’il en soit ainsi. Et ils sont exaucés ! De la manière la plus surprenante, Spartacus ignore la ville sans défense et continue son chemin.
Il revient presque à son point de départ et s’installe à Thurium, en Campanie. Là, il se comporte en chef d’État. Thurium est un port et l’ancien esclave communique par lui avec le reste du monde : il passe des commandes aux marchands de diverses régions de la Méditerranée, il achète notamment des armes, qu’il paye sans mal avec son énorme butin. Spartacus ne reste à Thurium que quelques semaines, le temps de réorganiser son armement, mais cette halte a sans doute contribué à affaiblir la combativité de ses hommes.
A Rome, pendant ce temps, la contre-attaque s’organise enfin. Elle est le fait d’un homme singulier, Licinius Crassus. Crassus, âgé alors de quarante-trois ans, est l’homme le plus riche du pays. Il a acquis sa fortune en rachetant à bas prix les biens des citoyens proscrits par le dictateur Sylla. Il est ainsi devenu le plus grand propriétaire foncier romain. Il possède notamment une partie de la capitale et on dit qu’il fait incendier ses immeubles pour les reconstruire en augmentant les loyers.
Crassus possédait aussi de nombreuses exploitations agricoles en Campanie qui ont été ravagées par la révolte, ce qui lui a fait perdre beaucoup d’argent. Il est, en outre, habité par une ambition dévorante. C’est pourquoi, alors que les autres hommes politiques répugnent à combattre des esclaves, ce qui dans la mentalité romaine est dégradant, lui n’hésite pas. Il se fait remettre les pleins pouvoirs et des crédits pour lever une armée.
Nous sommes alors à l’automne 72. Le temps des opérations militaires est normalement passé, mais Crassus engage quand même les hostilités. A la tête de dix légions, il prend la direction du sud de l’Italie. Son plan n’est pas d’affronter directement Spartacus, mais de neutraliser d’abord les nombreuses bandes plus ou moins organisées qui écument la région. A cet effet, il envoie en avant l’un de ses lieutenants, Mummius, avec deux légions. Mummius a pour consigne formelle de ne pas attaquer Spartacus, mais il ne résiste pas à la tentation d’obtenir un succès personnel et il engage la bataille. C’est un désastre ses troupes s’enfuient, abandonnant leurs armes.
Face à ce nouvel et humiliant échec, Crassus réagit de manière impitoyable. Il remet en vigueur l’ancienne pratique de la décimation, abandonnée depuis longtemps comme trop barbare. Il fait sortir des rangs les cinq cents hommes de l’avant-garde, responsables du mouvement de panique à la bataille, et en fait exécuter cinquante, un sur dix, selon le sens originel du mot «décimer». Le reste de l’armée, terrorisé, ne risquera plus de fuir.
Continuant vers le sud, Crassus rencontre une bande de dix mille esclaves et la bat, en tuant les deux tiers. Peu de temps après, il affronte pour la première fois toute l’armée de Spartacus. Ce dernier manque de remporter la victoire, mais le résultat est égal. Le chef thrace comprend qu’il a désormais un adversaire de son niveau et décide de ne pas courir davantage de risques et de passer en Sicile.
A suivre
D’après Pierre Bellemare
14 janvier 2010 à 18 06 30 01301
Histoires vraies
Mourir libre (9e partie)
Résumé de la 8e partie n Crassus, l’homme le plus riche d’Italie, décide de combattre Spartacus en perte de vitesse…
Il s’entend avec des pirates et leur donne de l’or pour qu’ils les fassent traverser. Ceux-ci gardent les sommes qu’ils ont reçues et disparaissent. Il tente alors d’embarquer ses hommes sur des radeaux, l’opération échoue, il renonce à la Sicile.
Pour passer le reste de l’hiver, Spartacus choisit d’aller dans l’endroit le plus reculé d’Italie, le Bruttium, qui constitue le talon de la botte. Crassus les poursuit et les bloque dans cette impasse. Si l’armée romaine peut être considérée comme la plus puissante de tous les temps, c’est parce qu’elle possédait une force de travail inimaginable. Pour mieux enfermer Spartacus, Crassus fait creuser en une semaine par ses hommes un fossé de quatre mètres cinquante de largeur sur quatre mètres cinquante de profondeur, qui ferme toute la péninsule. Et celle-ci fait à cet endroit quarante kilomètres de long !
Nous sommes en janvier 71. Spartacus et ses hommes sont prisonniers et la situation est grave, car il fait très froid cette année-là, les vivres commencent à manquer et la famine menace. Pour faire attaquer les Romains, le chef rebelle fait crucifier l’un des leurs sous leurs yeux. C’est une provocation terrible, car ce supplice est réservé aux esclaves, mais ils ne bougent pas. Heureusement pour lui, un peu plus tard, à la faveur d’une tempête de neige épouvantable qui empêche toute visibilité, il arrive à faire passer le fossé à son armée, dans des conditions très risquées.
Il est à nouveau maître de ses mouvements, mais il a laissé des forces dans l’aventure. Beaucoup de ses hommes sont morts à cause de la faim et du froid. En outre, des dissensions sont apparues dans la troupe, certains veulent tenter leur chance séparément Spartacus n’est pas en état de s’y opposer. Il se résout à les laisser partir.
Crassus n’attendait que cela. Il attaque, avec toute son armée, les esclaves dissidents, au nombre de douze mille trois cents. Il les défait et les massacre jusqu’au dernier. C’est un coup terrible pour Spartacus. Il sait qu’il ne peut pas aller en Sicile et il n’a plus les forces suffisantes pour espérer quitter l’Italie par le nord. Alors, il retourne en Campanie, où sa situation matérielle devient précaire : les campagnes, qu’il a ravagées les deux années précédentes, n’ont plus de ressources et les villes se ferment à lui. Il sent que l’affrontement suprême est pour bientôt.
Crassus le sent aussi. Il le suit à distance. Alors que Spartacus se trouve dans les montagnes de Petelia, non loin de Thurium, il envoie en avant deux de ses lieutenants, Quinctius et Scrofa, qui commettent l’imprudence de suivre le chef thrace de trop près, alors qu’il est engagé dans un défilé montagneux. Celui-ci fait demi-tour et les écrase. Crassus est trop loin pour leur porter secours et ne peut que constater le désastre. Tous les succès remportés par les Romains pendant l’hiver semblent annulés. De nouveau, c’est l’angoisse dans leurs rangs.
Rien n’est pourtant joué. Ces deux dernières victoires ont donné aux soldats de Spartacus la sensation qu’ils étaient invincibles. Ils pressent leur chef d’affronter Crassus en bataille rangée. Crassus le souhaite également. Pompée, son grand rival en politique, va entrer d’Espagne, et il veut absolument terminer la guerre avant son arrivée. Il déploie son armée non loin de Thurium et offre le combat. Spartacus ne tarde pas à arriver et installe son camp à proximité. Cette fois, c’est bien le dernier acte qui va avoir lieu. La veille de la bataille, Spartacus égorge son cheval. (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
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14 janvier 2010 à 18 06 41 01411
Histoires vraies
Mourir libre (10e partie et fin)
Résumé de la 9e partie n Spartacus et Crassus vont s’affronter dans une bataille rangée. On pressent le quitte ou double pour Spartacus…
Il dit à ses hommes que, s’il est vaincu, il n’en aura plus besoin (de son cheval) et que, s’il est vainqueur, il en trouvera de plus beaux chez ses ennemis. Il demande aussi que, s’il est tué, on enterre ou on brûle son corps, pour que les Romains ne l’outragent pas.
Le combat s’engage avec une exceptionnelle violence. Rarement, de part et d’autre, on s’est battu avec une telle sauvagerie. Les esclaves attaquent avec furie, ils prennent tous les risques, sachant que de toute manière, s’ils sont battus, c’est la mort qui les attend. Les Romains, de leur côté, ne font pas preuve d’un moindre acharnement. Ils veulent venger toutes les humiliations qu’ils ont subies. Tandis qu’ils ferraillent, ils pensent à leurs compagnons qu’on a forcés à se battre comme des gladiateurs, ils revoient celui qui a été crucifié sous leurs yeux.
Spartacus se trouve au premier rang. Il veut à tout prix rejoindre Crassus et l’affronter en combat singulier, mais le chef romain est trop avisé pour courir un pareil risque et se dérobe. Les heures passent. A la fin, l’expérience et la discipline des légionnaires emportent la décision. Les pertes sont très lourdes du côté romain, et chez les esclaves il y a soixante mille morts et six mille prisonniers. Les autres sont en fuite et seront exterminés durant les jours suivants.
Spartacus a été tué dans la bataille. Ses adversaires l’ont vu tomber, tandis qu’il chargeait. Ils ne retrouveront pas son corps : ses hommes ont été fidèles à leur promesse, ils l’ont fait disparaître. Spartaca non plus n’est pas retrouvée. Ainsi ni l’un ni l’autre ne connaîtront le sort terrible qui va être réservé à leurs derniers compagnons.
Pour tirer une vengeance exemplaire de la révolte et frapper à jamais les imaginations, Crassus a imaginé une mise en scène terrifiante. Il fait crucifier ses prisonniers le long de la via Appia, de Capoue à Rome. Ils sont plus de six mille sur les cent quatre-vingt-quinze kilomètres du parcours, c’est-à-dire une croix tous les trente mètres.
Pompée arrive sur ces entrefaites, écrase avec sa puissante armée une bande de cinq mille esclaves en fuite et, grâce à une habile propagande, se fait reconnaître comme coauteur de la victoire, à égalité avec Crassus. Ce dernier proteste et en appelle à ses amis politiques. Le temps de la terreur est passé, le soulèvement qui avait failli emporter Rome est devenu une querelle politicienne. Par la suite, les Romains ont tout fait pour effacer de leur mémoire la peur et la honte qu’ils avaient subies. La grande révolte de 73-71 était nommée pudiquement le «tumulte servile», le nom de Spartacus n’était jamais prononcé ou, s’il l’était, c’était comme injure. Mais la postérité a accordé une éclatante revanche au gladiateur de Capoue. Peu de personnages historiques ont bénéficié et bénéficient encore d’une telle faveur. Il suffit pour s’en convaincre de constater le nombre de films et d’œuvres littéraires qui lui ont été consacrés dans le monde entier. Car Spartacus est plus qu’un héros, c’est un symbole. Ce déraciné, qu’aucune nation, aucune culture, ne peuvent revendiquer est devenu universel et parle au cœur de tous les hommes. Il est l’espoir et la fierté des opprimés. Il leur adresse à jamais un message aussi simple que grand : mieux vaut mourir libre que vivre dans la servitude.
D’après Pierre Bellemare
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14 janvier 2010 à 18 06 51 01511
Histoires vraies
La flèche du diable (1re partie)
Le père missionnaire, André Dupeyrat, se repose dans sa chambre, après une épuisante tournée dans les villages indigènes de la forêt. Nous sommes en octobre 1947. A cette époque, le temps des explorations et des missions est pourtant révolu, c’est, au contraire, celui de la décolonisation qui se prépare. Mais pas en Nouvelle-Guinée, qui est restée l’endroit le plus ignoré et le plus dangereux du monde. Cette grande île équatoriale au nord de l’Australie, couverte d’une forêt impénétrable, n’a pas encore été atteinte par la civilisation et les tribus anthropophages y sont nombreuses. C’est dire que les missionnaires y ont encore du travail. Le père Dupeyrat n’est rebuté ni par la tâche ni par le danger. Ce robuste Belge de trente-cinq ans, aux cheveux blonds et aux yeux bleus, a demandé de lui-même à être envoyé dans ce pays. Et depuis six mois qu’il est là, il obtient des résultats remarquables. Il faut dire qu’il n’hésite pas à aller là où aucun religieux ne s’est aventuré avant lui, dans des villages réputés hostiles à toute civilisation.
Il n’est pas sûr que le père Dupeyrat parvienne à des conversions au sens strict du terme, mais il a réussi à se faire admettre et respecter. Les Papous, qui forment la totalité de la population de l’île, commencent à avoir des échanges avec lui, car le religieux a pris soin d’acquérir les rudiments de leur langue. Bref, par son courage, son énergie et son sens des contacts humains, André Dupeyrat est en train d’obtenir des résultats remarquables.
Pour l’instant, le missionnaire s’est octroyé quelques jours de repos dans la bourgade de Fané, occupée uniquement par des Blancs, européens et australiens, au bord du fleuve Mamberamo. La cité, qui est ravitaillée par bateaux à moteur, ressemble à une oasis au cœur de la jungle. Elle est habitée par une centaine de personnes et protégée par quelques militaires anglais. Le père vient s’y reposer de temps en temps, dans les bâtiments attenants à l’église.
André Dupeyrat goûte à un repos bien mérité et dans des conditions confortables, pour la première fois depuis des semaines, lorsqu’il est tiré de son sommeil par Aitapé, un Papou qui lui sert de domestique.
— Père, père, réveille-toi ! C’est très grave !
Le religieux reprend ses esprits avec peine.
— Tu entends le tambour ?
Effectivement, au loin, quelque part dans la forêt vierge qui entoure Fané, retentissent des coups sourds frappés avec lenteur. L’effet produit est passablement inquiétant. C’est la première fois que le père Dupeyrat entend une chose pareille.
— C’est étrange ! Qu’est-ce que c’est ?
C’est l’appel des sorciers. Ils te lancent un défi. Il faut partir !
— Qu’est-ce que tu racontes ?
— Les sorciers se sont réunis. Ils veulent ta mort. Tu détournes les Papous du culte des ancêtres, alors ils te lancent un défi.
Aitapé, que le père a toujours vu jusque-là calme et souriant, semble bouleversé.
— Quel défi ? Je n’y comprends rien !
— Quand le tambour s’arrêtera, les gens vont venir des villages pour avoir ta réponse. Il faudra leur dire «non», mon père. Il faudra leur dire que tu pars, sinon tu es mort !
— Il n’est pas question que je parte. Je suis certain qu’ils n’oseront pas m’assassiner.
— Si, mais pas avec les flèches ou les sagaies : ça, ce sont des armes de guerriers. Ils vont utiliser l’arme des sorciers…
Aitapé a l’air totalement terrorisé. Il baisse la voix :
— La flèche du diable…
Au loin, le tambour vient brusquement de cesser. D’après ce qu’a dit Aitapé, les Papous vont maintenant converger vers Fané pour lui demander sa réponse au défi des sorciers.
André Dupeyrat a la tête solidement posée sur les épaules. Il n’est pas du genre à s’émouvoir facilement. Pourtant, il se rend bien compte que la situation est grave. (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
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14 janvier 2010 à 18 06 54 01541
Blida : il tue son frère qui battait leur mère
l Dimanche dernier, la cité Benammour de Blida a vécu un drame qui secouera toutes les familles du voisinage. En effet, B. Mounir, 22 ans, attentera à la vie de son frère Abderaouf, 24 ans, selon le juge qui a eu à traiter l’affaire puisqu’il sera retenu le délit de «coups et blessures ayant entraîné la mort» lors de la présentation mardi de l’inculpé. Mounir dormait chez lui quand il a entendu des cris du côté de la cuisine : c’était sa mère qui luttait contre son propre fils Abderaouf, gardien dans un parking, qui la battait. Il se lèvera alors, courut vers la cuisine, s’arma d’un couteau et alla porter un coup au niveau de la cuisse gauche de son frère afin de mettre un terme à la dispute inégale. Le sang ne cessera pas de couler et, le temps d’arriver à l’hôpital, le cœur avait cessé de battre. B. Mounir se retrouve derrière les barreaux et attendra son jugement pendant que la mère, éplorée, aura perdu définitivement un fils et un autre qui restera longtemps en prison.
A. Mekfouldji
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14 janvier 2010 à 18 06 55 01551
Il suppliait le jury de le condamner à mort, il l’a été
Un homme de 37 ans a été exécuté vendredi soir dans le Kentucky pour le meurtre de deux enfants il y a six ans, selon la presse locale parue hier. Il a été exécuté par injection létale et son décès a été prononcé à 19h 34 locales (00h 34 GMT samedi). Il s’agissait de la première exécution depuis neuf ans dans cet Etat du centre-est des Etats-Unis. En août 2002, cet homme était entré chez une femme, furieux qu’elle ait encouragé une de ses amies à rompre sa relation avec lui. Il avait alors criblé de coups de couteau les trois enfants de cette femme, dont deux avaient succombé à leurs blessures, puis avait violé et poignardé leur mère, sans la tuer, selon la même source. Depuis, cet homme n’a cessé de demander à mourir. Il avait plaidé coupable lors de son procès en 2004 et a «presque supplié le jury de le condamner à mort». Puis, il a abandonné tous ses appels et a même demandé à la Cour suprême du Kentucky d’accélérer le processus. En moyenne, un condamné attend plus de dix ans dans le couloir de la mort aux Etats-Unis. Et c’est la 34e personne à être exécutée dans l’ensemble du pays cette année, dont 18 dans le seul Etat du Texas (sud).
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14 janvier 2010 à 19 07 01 01011
Histoires vraies
La flèche du diable (2e partie)
Résumé de la 1re partie n Le père missionnaire, André Dupeyrat, en poste en Nouvelle-Guinée, est menacé de mort par les sorciers papous s’il ne part pas…
Qu’est-ce que la flèche du diable, Aitapé ?
— C’est terrible, père, terrible !
Et le Papou raconte une histoire effectivement terrible, plus que cela même : terrifiante.
Quand un sorcier de Nouvelle-Guinée a décidé la mort de quelqu’un, il commence par lui voler un morceau de son pagne. Il place ce bout de tissu dans un tube de bambou et y introduit un serpent. Les sorciers sont des experts dans le maniement des serpents, même les plus venimeux. Leur savoir-faire est ancestral ; ils se le transmettent de bouche à oreille.
Une fois le reptile enfermé dans le tube de bambou, il commence à s’agiter et à s’attaquer au morceau d’étoffe, qui est sa seule compagnie dans le noir. A ce moment, le sorcier frappe de manière répétée sur le tube. Le serpent n’a pas d’ouïe mais il est très sensible aux vibrations, et les coups produisent dans ce milieu clos un véritable cataclysme.
Au bout d’un moment, le sorcier arrête de frapper et passe à plusieurs reprises le bambou au-dessus du feu. Pour le reptile prisonnier, c’est une torture atroce et, dans les profondeurs de son instinct, il associe cette souffrance avec l’odeur du tissu qui est enfermé avec lui. La machine infernale est au point. Le sorcier n’a plus qu’à s’embusquer près de l’endroit où il sait que sa victime passera. Lorsqu’elle approche, il enlève le bouchon. Le serpent jaillit comme une flèche et plante ses crocs dans la chair de l’homme.
Aitapé a terminé son récit. Il tremble de tous ses membres. Le père Dupeyrat a écouté avec attention et il ajoute en lui-même une information que le Papou n’a pas dite : la Nouvelle-Guinée est l’endroit du monde où on trouve le plus de serpents mortels. Ils sont de toutes tailles, de toutes couleurs, de tous habitats, mais ils ont un point commun il n’y a aucun antidote à leur poison.
Au cours de ses déplacements en forêt, le missionnaire a déjà rencontré plusieurs d’entre eux. Il a même été attaqué à deux reprises et il s’en est sorti grâce à la canne ferrée qui ne le quitte jamais, ainsi qu’à son sang-froid et à ses excellents réflexes. Alors pourquoi n’en serait-il pas de même par la suite ? André Dupeyrat n’a pas peur des serpents. Bien sûr, il n’est pas inconscient, il sait le danger qu’ils représentent. Mais ils ne provoquent chez lui ni crainte irraisonnée ni répulsion. Et puis, il se sent protégé par le bon Dieu et la Providence. Dès cet instant, sa décision est prise.
— Tu as dit que les Papous vont venir à Fané ?
— Oui, père. Ils doivent être là.
— Alors, je vais leur donner ma réponse.
Suivi de son domestique tremblant, le religieux se dirige vers l’extrémité de la bourgade. Effectivement, les Papous sont là, des dizaines de Papous, des jeunes, des vieux, des guerriers en armes, des femmes portant leurs enfants dans les bras. Tous le regardent avec attention, l’air grave. Il prend la parole d’une voix forte, réunissant toutes les connaissances qu’il a dans leur langue.
— Je vais aller dans vos villages et je dirai la messe. Si les sorciers réussissent à me faire mourir, c’est que je ne suis pas le représentant de Dieu et les sorciers auront raison. S’ils ne parviennent pas à me tuer, c’est qu’ils ont tort et vous ne les écouterez plus jamais… Maintenant, rentrez chez vous !
Les Papous ont écouté le discours dans le plus grand silence et c’est dans le même silence qu’ils font demi-tour. Le père André Dupeyrat, lui aussi, rentre chez lui. Il a décidé de partir sans plus attendre, dès le lendemain. Il s’occupe de réunir les quelques affaires dont il aura besoin, et c’est alors qu’il fait cette découverte. (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
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14 janvier 2010 à 19 07 12 01121
Histoires vraies
La flèche du diable (3e partie)
Résumé de la 2e partie n Le père Dupeyrat décide de rester et de continuer à prêcher malgré la menace terrifiante des sorciers…
La chemise qu’il avait lors de sa tournée précédente, qu’il avait portée pendant plusieurs semaines sans pouvoir en changer et qu’il n’avait pas encore eu le temps de laver, a disparue. Le bon Dieu et la Providence vont avoir beaucoup de travail !
Le lendemain matin, André Dupeyrat, sa canne ferrée à la main, quitte Fané d’un bon pas. Sa tournée, comme les autres, va durer plusieurs semaines. Enfin, s’il arrive au bout. Car tel est l’enjeu du véritable combat qu’il a engagé. De sa vie ou de sa mort, dépend la réussite de sa mission. Il garde espoir, non seulement parce qu’il est d’un naturel optimiste, mais parce qu’il possède une arme, une arme secrète, qu’il emporte avec lui.
Ou plutôt, c’est Aitapé qui la porte, dans le sac qu’il a sur l’épaule. Le missionnaire lui a dit qu’il n’avait aucune obligation de l’accompagner et le Papou, malgré sa peur visible, a tenu à venir quand même.
Le premier village est tout proche. Un groupe d’habitants vient à sa rencontre pour lui souhaiter la bienvenue. Tout à coup, ils se mettent à pousser des cris et se jettent dans les fourrés. C’est quand ils ont disparu que le père Dupeyrat voit ce qu’ils cachaient par leur présence : devant lui, en plein milieu du chemin, frétille un long ruban argenté. Le serpent, très mince et très clair, presque blanc, doit mesurer un mètre cinquante ; sa tête pointue est si fine qu’elle se distingue à peine de son corps. André Dupeyrat ne sait pas son nom. Il ne sait qu’une chose : son poison est foudroyant, il tue en moins d’une minute.
Le reptile s’avance lentement. La partie supérieure de son corps est dressée, le reste suit en ondulant doucement. C’est la posture d’attaque. Il va frapper, mais il ne semble pas pressé. A présent, il ouvre sa gueule et lance en avant sa langue à deux pointes, en sifflant.
Le père Dupeyrat ne bouge pas. Il tient fermement sa canne dans sa main droite, à la manière d’un gourdin. L’animal semble hésiter, alors il en profite ; il se lance en avant et écrase sa canne sur lui avec tant de violence qu’il le sectionne en deux. Puis il va prendre les morceaux mutilés et les brandit dans ses mains, tout en appelant les villageois
— J’ai vaincu la flèche du diable ! J’ai vaincu les sorciers !
Effectivement, il constate que les regards qu’on lui lance sont à la fois craintifs et admiratifs. Le respect dont il bénéficie s’est certainement accru grâce à cet exploit. Il sait bien aussi que ce n’est pas terminé.
D’ailleurs, au même moment, il entend dans le groupe une voix anonyme lui lancer, en langue papoue :
— Il y en aura d’autres !
Quelques jours plus tard, André Dupeyrat se trouve dans un village beaucoup plus loin dans la forêt. L’accueil a été favorable. Les villageois se sont pressés pour assister à la messe. Mais le père ne se fait pas trop d’illusions sur leurs sentiments. Il s’agit moins de ferveur que de crainte. Les Papous assistent au duel qu’il livre aux sorciers et ils le redoutent tout comme ils redoutent ces derniers. Pour rien au monde, ils ne voudraient le contrarier.
A présent, le religieux se repose dans la case qu’on a mise à sa disposition. Il est allongé sur son hamac. Il demande à Aitapé, qui se trouve à ses côtés, de lui passer sa pipe et son tabac, lorsque celui-ci s’immobilise et se met à chuchoter :
— Attention, père, ne bouge pas ! Deux petits serpents noirs montent sur le piquet de ton hamac, près de ta tête. (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
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14 janvier 2010 à 19 07 21 01211
Histoires vraies
La flèche du diable (4e partie)
Résumé de la 3e partie n Le père Dupeyrat qui vient d’éliminer un premier serpent «préparé» pour le tuer, réussira-t-il à contrer les autres tentatives des sorciers ?
Le père Dupeyrat a cessé de faire le moindre mouvement, mais il constate avec angoisse que son hamac continue de se balancer. Il n’y a rien à faire pour l’arrêter. Son domestique reprend la parole :
— Ils s’entremêlent. Maintenant ils se séparent. C’est sans doute un mâle et une femelle. Il y a un espoir…
Aitapé s’est éloigné. Il revient avec un couteau à la main. Il s’approche insensiblement du piquet. Il parle dans un souffle :
— Ils montent vers toi. S’ils mêlent leurs têtes, je peux frapper…
Il n’en dit pas plus. Au même instant, il y a un éclair et la lame du couteau s’abat. Le mâle et la femelle ont enlacé leurs têtes et il les a coupées toutes les deux d’un coup. Ainsi qu’il l’a dit, s’il ne s’était pas agi d’un couple, tout était perdu. Il n’aurait pu tuer qu’un seul des reptiles et l’autre aurait mordu.
Peu après, André Dupeyrat sort de sa case en tenant les serpents dans chaque main. Les regards impressionnés des Papous lui montrent qu’il vient encore de remporter son combat, mais, même si aucune voix anonyme ne s’élève, il sait qu’il y en aura d’autres.
Les jours et les semaines passent. Le père Dupeyrat n’est maintenant plus très loin de terminer sa tournée. Des serpents, il en a rencontré effectivement beaucoup d’autres, de toutes tailles, de toutes couleurs, mais tous aussi mortels les uns que les autres. Chaque fois, il s’en est sorti : il a réussi à en tuer plusieurs, les autres ont renoncé à l’attaquer et se sont enfuis.
Le village où se trouve en ce moment le père n’est plus très loin de Fané. Curieusement, il ne s’y était jamais rendu. Il y a pourtant reçu bon accueil et toute la population sans exception est venue assister à la messe, ce qui est maintenant le cas, depuis que ses victoires sur les reptiles s’accumulent La chaleur est étouffante ce jour-là et le religieux s’accorde une sieste dans la case qu’on a mise à sa disposition. Elle est minuscule : le plafond de feuillage tressé n’est guère plus qu’à un mètre cinquante du sol. Cela ne l’empêche pas de trouver rapidement le sommeil.
C’est un sifflement qui le réveille. Il ouvre les yeux. La tête d’un serpent se balance vingt centimètres au-dessus de son visage. Il est passé par un trou du feuillage et descend lentement vers lui. C’est la première fois qu’il en rencontre un de cette espèce, la plus grande de Nouvelle-Guinée. Il est gros comme le bras, d’une couleur gris fer et fait deux mètres de long. Sa morsure n’est pas foudroyante, comme celle du premier qu’il a rencontré, elle tue au contraire lentement dans d’effroyables souffrances. Le père le sait pour avoir donné les derniers sacrements à un malheureux Papou, dans un village.
Le reptile descend lentement, inexorablement. Sa tête est juste au-dessus de la sienne. Il a la gueule ouverte, les crocs dégagés, il siffle doucement. André Dupeyrat sait qu’il est perdu : Aitapé n’est pas là. Il est seul dans la case, il n’a de secours à espérer de personne. Alors, tout en s’efforçant de rester parfaite-ment immobile, il fait ses prières.
Il y a un contact effrayant : l’énorme reptile glisse maintenant sur son cou. Même si la situation semble désespérée, il faut continuer à ne pas bouger. Le religieux s’efforce de rester aussi raide qu’un morceau de bois, mais il ne peut empêcher son cœur de battre et, avec l’angoisse qu’il éprouve en cet instant, c’est un véritable vacarme qui part de sa poitrine. (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
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14 janvier 2010 à 19 07 27 01271
Histoires vraies
La flèche du diable (5e partie et fin)
Résumé de la 4e partie n Le père Dupeyrat échappe de justesse à un couple de serpents, mais le voici confronté à un autre reptile qui monte sur son cou…
Le serpent est justement sur sa poitrine et continue son chemin sans se presser. Le père est frappé par sa grosseur, presque celle d’un boa. Et, étonnamment, au lieu de le remplir d’horreur, cette vision lui apporte pour la première fois un espoir. Il se demande, en effet, comment les sorciers ont pu faire entrer un animal de cette taille et de cette puissance dans un bambou. Leur art de manipuler les serpents a beau être sans pareil, il a tout de même des limites.
Et si pour une fois les sorciers n’étaient pour rien dans tout cela ? Les serpents peuvent attaquer d’eux-mêmes, c’est même une des plaies de la Nouvelle-Guinée, une des principales causes de mortalité. En tout cas, celui avec lequel il est actuellement aux prises ne semble pas agressif. Il descend lentement le long de son corps, arrive sur le sol de la case et se prépare à la quitter, d’une manière indifférente, presque dédaigneuse.
Brusquement, le père Dupeyrat décide d’agir. Il vient d’échapper miraculeusement à la mort, mais cela ne lui suffit pas. Il comprend qu’il a la possibilité de l’emporter définitivement. Alors que le reptile a déjà la tête à l’extérieur, il s’empare de sa canne et frappe de toutes ses forces. Le coup est si violent qu’il brise la colonne vertébrale de l’animal qui est agité de soubresauts convulsifs. Le père le prend par la queue et sort de la case en criant
— Venez ! Venez tous !
Les Papous arrivent et s’immobilisent devant lui. Il prend la parole d’une voix éclatante
— Regardez ! J’ai vaincu les sorciers ! Je suis plus fort que tous les serpents car mon Dieu est le plus fort !
André Dupeyrat voit alors un spectacle extraordinaire : tous les habitants du village se mettent à genoux dans un même mouvement. A cet instant, il comprend qu’il vient de l’emporter définitivement.
Quelques jours plus tard, il est de retour à Fané. La population du village l’entoure et lui fait fête, car elle était au courant du combat d’une nature si particulière qui l’opposait à ses adversaires. Le chef de la petite garnison anglaise le félicite au nom de tout le monde et l’interroge :
— A quoi attribuez-vous d’être sorti vivant de cette épreuve ? A l’aide de Dieu ?
Le père Dupeyrat sourit.
— Je pense que les missionnaires ont la protection du Seigneur, mais, comme on dit : «Aide-toi, le ciel t’aidera.» J’ai mis le proverbe en application et j’ai emporté une arme avec moi.
— Une arme ?
— C’est Aitapé qui l’a avec lui. Veux-tu la montrer, Aitapé ?
Le domestique s’exécute et sort du sac qu’il portait un petit morceau de matière jaune. Le père André Dupeyrat le prend en main.
— C’est sans doute grâce à cela que je suis en vie : du savon ! Les Papous que les sorciers voulaient éliminer n’en avaient pas et ils gardaient leur odeur sur eux. Moi, j’ai pris soin de me laver pendant toute mon expédition. Et, alors que les serpents normalement attaquaient comme une flèche, devant moi, ils hésitaient, ce qui m’a permis de frapper le premier. Je pense qu’ils reconnaissaient mon odeur mais, comme elle était atténuée et qu’il y avait en plus celle du savon, ils étaient désorientés. Ainsi s’est terminée l’aventure du père André Dupeyrat en Nouvelle-Guinée, une aventure dont il est sorti vainqueur grâce à sa foi, à son courage et à un morceau de savon.
D’après Pierre Bellemare
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14 janvier 2010 à 19 07 28 01281
G-B : perpétuité pour le violeur de ses propres filles
l Un Britannique a été condamné, hier mardi, à la prison à perpétuité, avec une peine incompressible de 19 ans et demi, pour le viol répété pendant un quart de siècle de ses deux filles, auxquelles il a fait sept enfants. Cet homme de 56 ans a constamment abusé pendant 25 ans à partir de 1981 de ses deux filles, qui se sont trouvées enceintes de lui à 19 reprises. Evoquant le «pire» cas qu’il ait jamais eu à traiter, le juge l’a condamné à 25 peines de prison à vie différentes, à purger simultanément. Il devra passer au minimum 19 ans et demi en prison. Il avait reconnu avoir commis 25 viols et 4 agressions sexuelles sur ses filles. L’aînée a été sept fois enceinte de lui. Elle a deux enfants et en a perdu deux mort-nés. La cadette a connu douze grossesses et a cinq enfants. Redouté de toute sa famille, le père a commencé à abuser de ses deux filles alors qu’elles avaient 8 et 10 ans, selon l’accusation. Au début, elles étaient abusées chaque jour, et pendant de longues périodes elles ont été violées deux ou trois fois par semaine. Si elles lui résistaient, il les battait férocement, allant parfois jusqu’à brûler leurs yeux et leurs bras. L’homme, qui selon l’accusation prenait «plaisir» en infligeant de tels sévices, continuait à violer ses filles alors même qu’elles étaient enceintes. L’une était chargée de surveiller les enfants de l’autre pendant ces viols. Il faisait déménager sa famille de village en village, dans des zones rurales, pour éviter d’être repéré.
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14 janvier 2010 à 19 07 39 01391
Histoires vraies
Le faux Monty (1re partie)
Les deux brancardiers descendent comme ils peuvent l’escalier étroit d’un petit immeuble triste de Worthing, station balnéaire anglaise non loin de Brighton. Le malade qu’ils transportent a l’air bien mal en point. Il vivait seul. C’est la concierge qui a appelé l’hôpital. Elle était venue faire son ménage et elle l’a trouvé inconscient.
Comme les brancardiers heurtent la rampe, le malade se redresse et crie d’une voix tonnante
— Par Jupiter, faites attention ! Je suis le maréchal Montgomery, vicomte d’El-Alamein !
Cet effort l’ayant épuisé, il retombe inanimé sur la civière. Les brancardiers échangent des commentaires apitoyés :
— Le pauvre vieux ! C’est à l’asile qu’il aurait fallu le conduire.
— Grâce à Dieu, Monty est bien vivant. Je l’ai vu hier à la télé.
Oui, en ce mois d’août 1964, Bernard Law Montgomery, maréchal d’Angleterre, vainqueur de Rommel à El-Alamein, commandant en chef des troupes du Débarquement de Normandie, que tous les Anglais appellent affectueusement Monty, est bien vivant. Mais si le moribond qu’emportent les brancardiers a sa raison qui se trouble, ce qu’il dit n’est pas totalement insensé. C’est le souvenir de l’extraordinaire aventure qu’il a vécue, une des plus étonnantes de la Seconde Guerre mondiale.
Clifton James est né soixante-sept ans plus tôt, en 1897, en Tasmanie, la grande île au sud de l’Australie. Il est originaire d’un milieu aisé, son père est président du tribunal de Hobart, mais ses parents meurent dans un accident de voiture. Orphelin très jeune, Clifton James est élevé par deux vieilles demoiselles, dans la terreur de son tuteur, le colonel James, retraité de l’armée des Indes, qui le déteste pour son corps chétif et son âme peureuse.
La guerre l’amène en Europe. Gazé et blessé dans les Flandres, il est réformé, il s’installe à Londres et commence à vivoter. Il trouve une place de commis voyageur, mais il renonce vite à ce métier ingrat. En fait, il a une passion secrète et, maintenant qu’il n’a plus ni les vieilles demoiselles ni le colonel de l’année des Indes pour lui dicter sa conduite, il va enfin y céder. Il a toujours rêvé d’être comédien. Lui, le frêle, le timide Clifton James, que ses blessures de guerre ont rendu plus fragile encore, quelle revanche il pourrait prendre ! Il se voit déjà interprétant les grands héros du répertoire shakespearien, devant une salle croulant sous les bravos.
Malheureusement, s’il devient effectivement comédien, sa vie n’en est pas plus brillante pour cela. Certes il n’est pas dénué de talent, c’est la personnalité qui lui manque. Il se voit confiné à des petits rôles de quelques
répliques ; parfois même, pour vivre, il doit accepter de faire de la figuration. Et, à la place des prestigieuses scènes londoniennes qu’il espérait, ce sont des tournées en province, dans des théâtres de second ordre. Sa vie de commis voyageur se poursuit d’une autre manière.
1939 : c’est de nouveau la guerre et elle le tire un peu du bas de l’échelle où il se trouvait. Ses états de service lui ont, en effet, valu d’être officier. Mais à quarante-deux ans, il n’est pas versé dans une unité combattante, il est lieutenant trésorier-payeur. Il reste donc en Angleterre pendant la campagne de France et il assiste en témoin à la bataille d’Angleterre. Par la suite, tandis que les combats se déroulent sur les terres et les mers du monde entier, il est toujours à Londres dans les bureaux de l’administration militaire, à faire des calculs et des comptes.
Mars 1944. Alors que jusqu’à présent Clifton James était un des rares militaires stationnés en Angleterre, il est maintenant rejoint par toute une multitude. Des troupes considérables sont concentrées dans l’île (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
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