Histoires vraies
Le faux Monty (1re partie)
Les deux brancardiers descendent comme ils peuvent l’escalier étroit d’un petit immeuble triste de Worthing, station balnéaire anglaise non loin de Brighton. Le malade qu’ils transportent a l’air bien mal en point. Il vivait seul. C’est la concierge qui a appelé l’hôpital. Elle était venue faire son ménage et elle l’a trouvé inconscient.
Comme les brancardiers heurtent la rampe, le malade se redresse et crie d’une voix tonnante
— Par Jupiter, faites attention ! Je suis le maréchal Montgomery, vicomte d’El-Alamein !
Cet effort l’ayant épuisé, il retombe inanimé sur la civière. Les brancardiers échangent des commentaires apitoyés :
— Le pauvre vieux ! C’est à l’asile qu’il aurait fallu le conduire.
— Grâce à Dieu, Monty est bien vivant. Je l’ai vu hier à la télé.
Oui, en ce mois d’août 1964, Bernard Law Montgomery, maréchal d’Angleterre, vainqueur de Rommel à El-Alamein, commandant en chef des troupes du Débarquement de Normandie, que tous les Anglais appellent affectueusement Monty, est bien vivant. Mais si le moribond qu’emportent les brancardiers a sa raison qui se trouble, ce qu’il dit n’est pas totalement insensé. C’est le souvenir de l’extraordinaire aventure qu’il a vécue, une des plus étonnantes de la Seconde Guerre mondiale.
Clifton James est né soixante-sept ans plus tôt, en 1897, en Tasmanie, la grande île au sud de l’Australie. Il est originaire d’un milieu aisé, son père est président du tribunal de Hobart, mais ses parents meurent dans un accident de voiture. Orphelin très jeune, Clifton James est élevé par deux vieilles demoiselles, dans la terreur de son tuteur, le colonel James, retraité de l’armée des Indes, qui le déteste pour son corps chétif et son âme peureuse.
La guerre l’amène en Europe. Gazé et blessé dans les Flandres, il est réformé, il s’installe à Londres et commence à vivoter. Il trouve une place de commis voyageur, mais il renonce vite à ce métier ingrat. En fait, il a une passion secrète et, maintenant qu’il n’a plus ni les vieilles demoiselles ni le colonel de l’année des Indes pour lui dicter sa conduite, il va enfin y céder. Il a toujours rêvé d’être comédien. Lui, le frêle, le timide Clifton James, que ses blessures de guerre ont rendu plus fragile encore, quelle revanche il pourrait prendre ! Il se voit déjà interprétant les grands héros du répertoire shakespearien, devant une salle croulant sous les bravos.
Malheureusement, s’il devient effectivement comédien, sa vie n’en est pas plus brillante pour cela. Certes il n’est pas dénué de talent, c’est la personnalité qui lui manque. Il se voit confiné à des petits rôles de quelques
répliques ; parfois même, pour vivre, il doit accepter de faire de la figuration. Et, à la place des prestigieuses scènes londoniennes qu’il espérait, ce sont des tournées en province, dans des théâtres de second ordre. Sa vie de commis voyageur se poursuit d’une autre manière.
1939 : c’est de nouveau la guerre et elle le tire un peu du bas de l’échelle où il se trouvait. Ses états de service lui ont, en effet, valu d’être officier. Mais à quarante-deux ans, il n’est pas versé dans une unité combattante, il est lieutenant trésorier-payeur. Il reste donc en Angleterre pendant la campagne de France et il assiste en témoin à la bataille d’Angleterre. Par la suite, tandis que les combats se déroulent sur les terres et les mers du monde entier, il est toujours à Londres dans les bureaux de l’administration militaire, à faire des calculs et des comptes.
Mars 1944. Alors que jusqu’à présent Clifton James était un des rares militaires stationnés en Angleterre, il est maintenant rejoint par toute une multitude. Des troupes considérables sont concentrées dans l’île (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
23 janvier 2010 à 10 10 39 01391
Histoires vraies
Le faux Monty (2e partie)
Résumé de la 1re partie n Ancien militaire, Clifton James se prend pour le maréchal d’Angleterre Montgomery…
Des troupes considérables sont concentrées dans l’île : Anglais, Américains, soldats de tous les dominions britanniques, soldats alliés. C’est qu’un grand événement qui se prépare : le débarquement en France. Et, pour occuper tous ces militaires forcés à l’inaction, il y a, entre autres, des représentations théâtrales.
Dans son service, Clifton James est populaire pour une étonnante raison : il possède une ressemblance frappante avec le maréchal Montgomery. Même plus que cela, il est son véritable sosie. Bien entendu, tout le monde ne l’appelle plus que Monty, et c’est devenu l’objet de plaisanteries perpétuelles. Ce jour-là, le colonel chef de son service vient le trouver
— Dites-moi, James, vous êtes bien acteur dans le civil ? Cela vous plairait-il de remonter sur les planches ?
— Certainement, colonel !
— Il y a une représentation du théâtre aux armées, au Nottingham Hall. J’ai pensé que vous pourriez faire une imitation de Monty. Cela amuserait la troupe.
Clifton James accepte sans se faire prier. La représentation a lieu, et ce n’est pas un succès, c’est un triomphe ! Clifton James apparaît en uniforme de général de cavalerie, celui de Montgomery, avec sur la tête son fameux béret noir. Il prononce quelques mots en imitant sa voix, telle qu’il a pu l’entendre aux actualités, et toute la salle se dresse en hurlant :
— Salut, Monty ! Sacré vieux haricot !
Il y a même des journalistes qui sont là. Tandis que Clifton James poursuit son numéro, des flashs crépitent et le lendemain, 14 mars 1944, il a droit à un article sur quatre colonnes dans le News Chronicle. On y voit, entre autres, sa photo avec la légende : «Non, ce n’est pas lui. Son nom est James.»
Cet article, le capitaine Stephen Wattes le considère avec attention. Il tire plusieurs bouffées de sa pipe et se ressert une tasse de thé, car l’idée qui lui est venue mérite d’être sérieusement examinée. Le capitaine Wattes est l’un des plus brillants éléments du MI 5, le service d’espionnage anglais. En cette période, la majeure partie de son activité concerne le Débarquement, et il y a peut-être quelque chose à tirer de cela.
Quelques minutes plus tard, le capitaine Wattes est dans le bureau de son chef, le colonel Lester. Il lui montre l’exemplaire du News Chronicle, avec la photo de Clifton James. Le colonel Lester hoche la tête.
— Je vois… Qu’est-ce que vous suggérez au juste ?
— Le maréchal Montgomery est en ce moment à Portsmouth, en compagnie du général Eisenhower.
— Je le sais parfaitement. Il dirige l’entraînement des troupes du Débarquement.
— Oui, mais les Allemands le savent aussi. Nous venons de capter un message radio y faisant état…
Le colonel Lester fait une grimace. Le camp de Portsmouth où est concentrée l’armée du Débarquement est l’endroit le plus secret et le mieux protégé d’Angleterre et pourtant les Allemands y ont des informateurs sur place ! C’est évidemment une mauvaise nouvelle, mais ce que vient de dire le capitaine pourrait transformer ce point marqué par l’ennemi en avantage. Son subordonné poursuit son idée :
— Imaginez que Monty quitte Portsmouth pour aller très loin : qu’en concluraient les Allemands ? Que le débarquement n’est pas pour tout de suite. Ils relâcheraient leur garde des côtes. (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
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23 janvier 2010 à 10 10 48 01481
Histoires vraies
Le faux Monty (3e partie)
Résumé de la 2 e partie n Les alliés veulent utiliser la ressemblance de Clifton James avec le maréchal Montgomery pour tromper les services secrets allemands à propos du Débarquement…
Effectivement : c’est ingénieux. Mais il reste un obstacle.
— Lequel ?
— Ce Clifton James. Nous ne savons pas qui il est. Pour lui confier un rôle d’une telle importance, nous devons être absolument sûrs de son entourage et de lui-même.
— C’est exact, colonel. Je m’en charge…
A partir de ce moment, le MI 5 enquête discrètement sur Clifton James, et les résultats sont satisfaisants à tous points de vue. L’entourage de l’acteur est absolument sûr, pour la meilleure raison qui soit : il n’existe pas. Il n’a pas de famille, il a laissé quelques cousins éloignés en Tasmanie avec lesquels il ne correspond pas. Il vit seul, c’est un célibataire endurci et il n’a pas d’amis, seulement quelques relations dans son service à l’armée. Quant à lui-même, il mérite une totale confiance : son patriotisme, en particulier, est digne de tous les éloges.
Et la médiocrité de sa carrière d’acteur est un avantage supplémentaire. S’il avait été connu, sa ressemblance avec Montgomery aurait déjà frappé de nombreuses personnes, mais ce ne sont pas ses brèves apparitions dans des pièces de troisième ordre qui ont pu lui attirer ce genre de renommée. A tous points de vue, Clifton James est l’homme de la situation !
Quelques jours plus tard, le capitaine Wattes est dans son bureau. Il se présente. Clifton James l’écoute, très intrigué d’avoir en face de lui un homme du MI 5.
— Cela vous dirait de continuer à jouer les Montgomery ?
— Pour le théâtre aux armées ?
— Non, pas au théâtre, dans la vie…
Et Stephen Wattes lui explique le projet qu’il a en tête : il s’agirait de monter une mise en scène à l’attention des Allemands, au cours de laquelle il se comporterait réellement comme le général.
Tout en écoutant son interlocuteur, Clifton James a du mal à modérer son enthousiasme. Lui, l’obscur, va entrer dans le personnage du plus grand chef militaire britannique. Et pour quelle pièce : la plus grandiose, la plus exaltante ! Il va peut-être, par son action, jouer un rôle décisif dans la guerre. Des objections lui viennent pourtant à l’esprit.
— Je ressemble physiquement à Monty, mais je ne sais pas quel est son comportement. Pour cela il faudrait que je l’approche. Est-ce qu’il sera d’accord ?
Le capitaine Wattes sourit.
— Nous lui avons tout expliqué. Non seulement il est d’accord, mais il vous attend…
Et, quelques instants plus tard, Clifton James part à bord de la voiture du capitaine Wattes rencontrer le chef des armées britanniques. Le véhicule franchit aisément tous les barrages de ce véritable camp retranché de Portsmouth et arrive au grand quartier général allié.
Montgomery est logé dans une imposante bâtisse aux allures de château. La confrontation avec son sosie est impressionnante. Les deux hommes se ressemblent d’une manière hallucinante, même de près il est impossible de les distinguer. Ils se regardent aussi stupéfaits l’un que l’autre. Mais la similitude s’arrête là. Intérieurement, ils sont aussi différents qu’il est possible. Montgomery toise son vis-à-vis avec impatience, tandis que ce dernier est si ému qu’il vacille presque sur ses jambes. Le vrai Montgomery s’adresse à Wattes :
— Qu’est-ce que vous attendez précisément de moi, capitaine ? (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
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23 janvier 2010 à 15 03 24 01241
Histoires vraies
Le faux Monty (4e partie)
Résumé de la 3e partie n Clifton James est informé du rôle qu’il doit jouer, c’est alors que le MI 5 lui fait rencontrer le maréchal Montgomery, son sosie…
Que vous permettiez au lieutenant James de rester en votre compagnie pour qu’il vous étudie et calque son comportement sur le vôtre. Si vous pouviez aussi le renseigner sur vos habitudes.
— Par exemple ?
Clifton James prend pour la première fois la parole.
Il le fait timidement, en ayant presque l’air de s’excuser.
— Par exemple, monsieur le maréchal, quels sont vos goûts alimentaires ?
— Je ne mange jamais de poisson, je ne bois que de l’eau. Cela vous ira ?
Clifton James fait «oui» de la tête, plus impressionné que jamais. Il se rend compte de toute la difficulté de l’entreprise. Cette attitude de meneur d’hommes, ce ton cassant, ces gestes autoritaires c’est cela qu’il va devoir acquérir. Bien sûr, cela fait partie du métier d’acteur, mais un acteur joue sur une scène et s’adresse à d’autres acteurs. Tandis que lui, il va devoir commander à des colonels, des généraux, parler d’égal à égal avec les puissants de ce monde.
Et il y parvient. Jour après jour, il fait des progrès, il copie la démarche du chef suprême des armées britanniques, il adopte ses tics de langage, ses manies. Il s’applique tant qu’il peut, car on lui a dit que le temps était compté. Le Débarquement est imminent, et il est prévu qu’il quitte l’Angleterre sous l’apparence de Monty quelques jours avant la date fixée.
Et, le 26 mai 1944, les trois coups sont frappés pour cette pièce sans précédent. Clifton James a pris place, en uniforme de général de la cavalerie, dans une limousine portant le fanion du commandement en chef des forces armées. Sur sa poitrine, resplendissent quatre rangées de décorations.
La puissante voiture prend la direction de l’aérodrome de Northolt. Celui-ci a pour particularité d’être à la fois civil et militaire. Le MI 5 sait que les Allemands y ont des espions et il compte bien qu’ils feront leur rapport. La voiture s’arrête à proximité du terrain. Un détachement est là pour rendre les honneurs. Monty s’extrait du véhicule et fait quelques pas de sa démarche caractéristique, à la fois raide et un peu traînante.
Le général Herwood, son aide de camp, se présente à lui. Montgomery répond rapidement à son salut et se dirige vers l’appareil. Le commandant vient le saluer à son tour.
— Mes respects, sir. C’est un honneur pour moi de vous avoir à bord.
— Bonsoir, commandant. J’espère que nous avons une bonne météo.
— Excellente, sir.
— Alors, en route ! Ne traînons pas.
Et le maréchal Montgomery, vicomte d’El-Alamein, s’engouffre dans la carlingue. Les déplacements d’une personnalité de son importance sont, bien entendu, couverts par le secret. Il aurait été invraisemblable que sa destination soit connue. Le MI 5 fait répandre, par plusieurs employés de l’aéroport à son service, le bruit que Monty part pour Gibraltar. Et les services secrets allemands tombent dans le piège ! Après la guerre, leurs archives montreront qu’ils ont suivi de bout en bout le voyage du faux Monty.
A Gibraltar, le maréchal, accueilli par le gouverneur, le major Foles, traverse la ville sous les acclamations de la population, aussi heureuse que surprise de le voir. Au palais du gouverneur, il est salué par son camarade à l’école de guerre, sir Ralph Eastwood, qui lui lance un jovial :
— Hello, Monty ! Sacré vieux haricot !
Ce dernier lui serre vigoureusement la main et lui lance à son tour :
— Salut, Rusty ! Cela fait rudement plaisir de te revoir ! (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
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23 janvier 2010 à 15 03 26 01261
Boumerdès : perpétuité pour deux frères assassins
Le tribunal criminel près la Cour de Boumerdès a prononcé tard dans la soirée d’hier, dimanche, une peine de prison à perpétuité à l’encontre de deux frères, K. Kamel et K. Mohamed, pour «homicide volontaire avec guet-apens et préméditation». Selon les faits rapportés durant l’audience qui a duré plus de 8 heures, cette affaire remonte au ramadan 2005, avec la découverte de la dépouille de la victime N. Zoheir (16 ans) atteinte de plusieurs coups de couteau, dans une orangeraie de la commune de Bordj Menaïel (Boumerdès), qui n’est autre qu’une propriété de la famille des deux coaccusés. L’enquête mena immédiatement à l’arrestation des deux prévenus sur la foi de plusieurs témoignages, dont celui de l’oncle de la victime qui avait assuré avoir vu son neveu, le jour du meurtre, en compagnie d’une personne suspecte se dirigeant vers la ferme en question, soit le lieu du crime. Un autre témoin a déclaré avoir entendu les deux prévenus, à plusieurs reprises, menacer la victime de sanctions, en l’accusant de voler le produit de leur ferme. Pour sa part, la défense a nié toutes les accusations contre ses mandants en soulignant que les faits retenus contre eux ne reposaient que sur les déclarations de témoins sans aucune preuve matérielle à l’appui attestant de leur culpabilité. Elle a ajouté qu’aucune relation ne liait, ni les prévenus ni leur famille à la victime, car leur séjour à l’orangeraie, (lieu du crime) n’avait pas dépassé les deux mois. Le parquet avait requis la peine de mort contre eux.
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23 janvier 2010 à 15 03 36 01361
Histoires vraies
Le faux Monty (5e partie et fin)
Résumé de la 4 e partie n Après un court séjour chez le maréchal pour s’imprégner de ses manières, Clifton James se rend à Chypre, en tant que maréchal Montgomery…
Au palais du gouverneur a lieu une réception à laquelle sont conviées plusieurs personnalités espagnoles connues pour être favorables aux Allemands.
Durant une bonne partie de celle-ci, le maréchal Montgomery a une longue conversation avec son vieil ami Eastwood et, bien qu’ils parlent à voix basse, on peut entendre qu’il est question plusieurs fois d’un certain «plan 303».
De Gibraltar, l’avion de Montgomery part pour Alger. Là, il est accueilli par le général Wilson, chef des armées américaines dans le pays. Monty le salue sur l’aéroport d’un sonore «Hello, Jumbo !» utilisant le sobriquet par lequel il a l’habitude de le nommer.
Puis tous deux montent dans une Cadillac blanche escortée par quatorze motards de l’armée américaine et vont s’enfermer dans une villa sur les hauteurs d’Alger, protégée par une véritable petite armée.
Ainsi qu’on a pu l’établir plus tard par leurs archives, les services secrets allemands se sont interrogés sur la signification de cette entrevue. Est-ce que cela ne signifiait pas que le débarquement d’Angleterre allait être précédé par un autre venant d’Afrique ?
Ils n’auront en tout cas pas longtemps à se poser la question. Nous sommes alors le 5 juin 1944. Le lendemain à l’aube, c’est le Jour le plus long qui commence sur les plages de Normandie. Sans qu’on puisse établir avec certitude que la chose était liée avec l’opération du faux Monty, les historiens ont été frappés par la surprise qui a été celle des Allemands. Rommel, chef des troupes du mur de l’Atlantique, était à Berlin pour l’anniversaire de sa femme, l’état-major de la VIIe armée, qui défendait la Normandie, était en permission à Rennes et une division de panzers avait été envoyée dans le Midi.
En tout cas, pour Clifton James, le rideau est tombé. Habillé de son uniforme de lieutenant, il revient en Angleterre en compagnie du général Herwood, l’aide de camp de Montgomery, qui doit retrouver son chef au plus vite. Ce dernier le complimente pour sa performance.
— Vous avez été à la hauteur, James ! Vos nerfs n’ont pas flanché.
Les nerfs de Clifton James n’ont pas flanché, mais il est épuisé. Il n’a pas encore retrouvé ses esprits. Entendant s’exprimer cet homme qu’il a rudoyé depuis des jours, il réplique d’une voix bourrue :
— Mes nerfs ! Qu’est-ce que c’est que cette ânerie, par Jupiter ?
Puis il se rend compte qu’il est en train de s’adresser à un maréchal et qu’il est en uniforme de lieutenant. Il se répand en excuses.
Ainsi s’est terminé le fait d’armes de Clifton James, qui a peut-être changé le cours de l’histoire. Il a en tout cas changé le cours de son existence car, à partir de là, rien pour lui n’a été comme avant. Après la démobilisation, il a bien tenté d’exploiter son aventure. Il a tenu le rôle de Monty dans un film médiocre consacré au maréchal Montgomery, qui n’a eu aucun succès. Et cela s’est arrêté là. Car non seulement son numéro d’imitation n’a pas servi sa carrière, mais il lui a porté un coup fatal. Chaque fois qu’il apparaissait sur scène il était salué dans le public par des cris :
— Salut, Monty ! Sacré vieux haricot !
Alors Clifton James a cessé de jouer. Un cirque de Blackpool l’a exhibé pendant un moment, et puis il en a eu assez, il a arrêté toute activité. Il s’est retiré à Worthing, vivotant de sa pension de blessé de la guerre de 14. Jusqu’à ce jour de 1964 où les brancardiers sont venus le chercher et où il a lancé sa dernière réplique.
D’après Pierre Bellemare
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23 janvier 2010 à 15 03 37 01371
Ghardaïa : proxénète à 81 ans !
l Les services de la sûreté de la wilaya ont démantelé, mercredi dernier, un réseau de prostitution composé de trois femmes et deux hommes dans un quartier situé au centre-ville de Ghardaïa. Au cours d’une perquisition dans une habitation, sujet de plusieurs plaintes des habitants du quartier, les éléments de la police ont procédé à l’arrestation en flagrant délit de trois femmes âgées respectivement de 81 ans (la patronne et propriétaire du lieu de débauche), 43 ans et 33 ans qui pratiquaient la prostitution ainsi que deux hommes de 42 ans et 30 ans, qui ont été placés sous mandat de dépôt.
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23 janvier 2010 à 15 03 53 01531
Histoires vraies
Les quarantièmes rugissants (1re partie)
Cela commence par une scène conjugale tout ce qu’il y a de plus anodin. Ramón Carlin fête, en cette année 1970, les quarante-cinq ans de sa femme Paquita. Ramón Carlin a lui-même quarante-sept ans, il en paraît un peu plus, avec son physique rondouillard, sa petite moustache et son crâne déjà bien dégarni. Paquita, elle, est une brunette pimpante, ravissante et menue aux allures de petit bibelot.
Tous deux se trouvent dans l’élégante salle à manger de leur villa d’un quartier résidentiel de Mexico. Il faut dire que les Carlin sont riches, très riches même. Ramón est à la tête d’une entreprise de machines à laver dont l’activité est florissante et sa fortune se compte en millions de pesos. Il a un grand sourire en direction de sa femme, tout en lui tendant un paquet plat entouré de papier cadeau.
— Bon anniversaire, ma chérie ! C’est une surprise !
Intriguée, Paquita ouvre fébrilement le paquet. Qu’est-ce que cela peut bien être ? L’instant d’après, elle découvre un catalogue en papier glacé, sur lequel sont représentés toutes sortes de bateaux. Elle se tourne, étonnée, vers son mari :
— C’est cela la surprise : un bateau ?
— Non, la surprise, c’est autre chose. Regarde à l’intérieur.
Paquita Carlin feuillette le dépliant et découvre, entourée à l’encre rouge, la photo d’un beau voilier, avec une grande voile blanche. Ramón Carlin sourit.
— Il ne te plaît pas ? Tu ne le trouves pas beau ?
Paquita est un peu décontenancée, elle n’a jamais mis le pied sur un bateau.
— Si, il est très joli, et qu’est-ce qu’on va en faire ?
— Eh bien, on va se promener en mer.
— Mais tu n’auras jamais le temps, avec ton travail.
— Justement, c’est ça la surprise : j’arrête de travailler !
Paquita regarde son mari avec des yeux ronds. Effectivement, pour une surprise, c’est une surprise ! Ramón, ce bourreau de travail qui fait des journées de dix heures ou plus, qui ne vit que pour son entreprise, s’arrêterait comme cela, du jour au lendemain ? Une inquiétude la traverse :
— Qu’est-ce qui se passe ? Tu es malade ?
— Non, je ne me suis jamais mieux porté. Et justement, j’ai envie de profiter un peu de la vie. Les enfants sont grands, ils n’ont plus besoin de nous.
— Et ton affaire, qui va s’en occuper ?
— J’en ai parlé à mon frère. Il accepte d’être directeur et il se débrouillera très bien.
Paquita Carlin enregistre comme elle peut toutes ces informations qui signifient un bouleversement complet de son existence. Elle ne sait que penser. Elle serait plutôt du genre casanier et tranquille. Jamais elle n’aurait imaginé que Ramón lui proposerait un jour une vie si trépidante. Mais elle lui a toujours fait confiance. Elle demande :
— Où est-il ce bateau ?
— En Floride. C’est là-bas qu’il a été construit. Nous allons le chercher. Nous partons demain. J’ai pris nos billets d’avion.
– Et comment est-ce qu’on va revenir ? Avec le bateau ?
— Bien sûr. Je me débrouillerai très bien, tu verras.
— Mais tu ne sais pas naviguer !
— J’apprendrai. Cela ne doit pas être si difficile…
Et Paquita Carlin, qui a toujours été une épouse soumise, suit son mari. Dès qu’elle monte sur le bateau, que Ramón a baptisé pour lui faire plaisir «Sayula», du nom de la province dont elle est originaire, elle s’aperçoit d’une chose : elle a le mal de mer. Une fois qu’ils ont quitté les côtes de Floride, elle fait une autre constatation : il n’est pas si facile que cela d’apprendre à naviguer. Et malgré la bonne volonté de son mari pour tirer les cordages, manœuvrer les voiles, ils manquent plusieurs fois de chavirer. Enfin, ils arrivent quand même indemnes à Veracruz, le grand port mexicain. (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
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23 janvier 2010 à 16 04 10 01101
Histoires vraies
Les quarantièmes rugissants (2e partie)
Résumé de la 1re partie n Ramon a offert à sa femme un voilier, mais à la grande déception de celle-ci il décide de mettre son frère à la tête de ses affaires…
A partir de là, c’est une nouvelle vie qui commence pour les époux Carlin. Ils ne sont pas toujours en bateau, mais durant les années qui suivent, ils font quelques promenades à la belle saison et même deux ou trois régates d’amateurs car, effectivement, Ramón Carlin se révèle un assez bon marin. Et puis, un jour de 1973, celui-ci annonce à son épouse :
— Chérie, j’ai une surprise !
Paquita est un peu craintive. Elle n’a pas oublié l’anniversaire de ses quarante-cinq ans et elle s’attend à un nouveau bouleversement dans son existence. Elle ne se trompe pas.
— J’ai décidé d’acheter un nouveau bateau. Il s’appellera le «Sayula II».
Et Ramón tend à sa femme la photographie d’un superbe voilier à deux mâts. Paquita le contemple avec étonnement.
— Mais il est très grand !
— Il fait dix-neuf mètres soixante, avec une coque tout en plastique. C’est le dernier cri de la technique.
— Tu ne pourras jamais le faire marcher tout seul.
— Effectivement. J’en ai déjà parlé aux enfants et ils sont d’accord.
— Qu’est-ce que tu dis ?
— J’en ai parlé aussi à nos neveux, car le «Sayula II» a besoin d’un équipage de dix hommes. Ils sont d’accord aussi. J’ai pris les billets d’avion pour tout le monde. Nous partons la semaine prochaine.
Paquita pense être au bout de ses surprises, mais elle est loin d’avoir tout entendu. Elle demande :
— Il est en Floride, comme l’autre ?
— Non, au nord de la Finlande. C’est là qu’on fabrique les meilleurs…
Ramón Carlin marque un temps. Il a beau savoir que sa femme l’a toujours suivi aveuglément, il a quand même un moment d’hésitation.
— De là, on ira à Portsmouth en Angleterre. C’est de là que part… la Course autour du monde.
— Tu ne parles pas sérieusement ?
— Si. Je me suis déjà engagé.
— Et tu ne veux tout de même pas que je vienne avec toi ?
— Bien sûr que si.
— Mais je ne sais rien faire !
— Tu t’occuperas de la cuisine. Ta présence nous fera beaucoup de bien au moral, aux enfants et à moi.
Paquita Carlin est décidément une épouse modèle et soumise, car, encore une fois, elle accepte. Par malchance pour elle, le «Sayula II» essuie une terrible tempête entre la Finlande et l’Angleterre. Elle croit mourir tant elle est malade et elle se demande ce que va être le tour du monde. Mais elle ne dit rien et, début septembre 1973, elle se retrouve à Portsmouth. Jusqu’à présent elle avait trouvé que le «Sayula II» était un voilier gigantesque, en voyant les autres concurrents amarrés à quai, elle découvre que c’est de loin le plus petit.
Il y a là, en effet, la fine fleur de la voile mondiale, des navires mis au point selon les techniques les plus sophistiquées et sponsorisés à prix d’or : «Pen Duick VI», d’Eric Tabarly, «Adventure» et «Great Britain II», qui réunissent l’élite de la voile britannique, «Kriter», d’Alain Gliksman, «33 Export», de Dominique Guillet, et tant d’autres encore. A chaque escale, ils seront attendus par toute une équipe de techniciens et un équipage de rechange sera là pour embarquer si nécessaire. Ramón Carlin, lui, courra avec son bateau acheté sur un catalogue, ses quatre fils, ses six neveux et Paquita, qui se demande ce qu’elle fait là. (à suivre…)
D’après Pierre Bellemare
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