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LIBANDE YAMILÉ GHEBALOU-HARAOUI Comment sortir des ténèbres ?

11 janvier 2010

1.Lu pour vous

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Culture : LIBANDE YAMILÉ GHEBALOU-HARAOUI
Comment sortir des ténèbres ?



Liban, un premier roman, une écriture errante entre lyrisme, narration, phrases enlevées, tous les ingrédients pour ne pas tomber dans des clichés et la négation. Entreprenant et osé !
«La balle siffla en passant près de lui ; il eut l’impression qu’elle était passée à quelques millimètres de son oreille. Il tressaillit puis il soupira ; la tension, très vive, lorsqu’il comprit le risque qu’il avait côtoyé, retomba et emporta au fond de lui un pan de son nom et de sa patrie.» Dès les premières pages, Yamilé Ghebalou-Haraoui plante le décor de son premier roman, le Liban, et sa fracture, le déchirement avec en arrière-plan, l’Algérie contemporaine que nous ressentons en filigrane même si le roman se passe entièrement au Liban. «Omar pense à une autre ville, au bord de la Méditerranée. Il pense à cette colline qui brille face à la mer. Il pense à ces maisons blanches où habite une ombre claire. Ma mère a de très longs cils, un sourire qui ouvre la luminescence de son front, elle rit si facilement.» C’est cette ville, Alger, que porte en mémoire le personnage phare du roman de Yamilé Ghebalou-Haraoui. Une porte s’ouvre sur l’engrenage de la violence qui a réduit en «cendres» un pays culturellement et socialement riche. L’histoire des personnages résonnent affreusement et violemment d’une manière obsessionnelle, le Liban ou l’Algérie ou encore les deux… une manière d’exorciser le mal d’un pays par le mal d’un autre pays. Ce qui frappe avant tout est cette écriture cinématographique, qui rend la perception des lieux très visuelle et l’évolution des personnages presque sensorielle. La véritable action du roman est le jeu d’écriture qui n’exalte pas les sentiments mais les débusque d’une manière psychologique pour une mise à nu inattendue. Le personnage principale se dévoile par touches successives, un style tendu et concis, une écriture lyrique qui atténue les violences et les obscurités – exploits absurdes d’hommes inconséquents – que l’on rencontre entre les pages de Liban. Omar rêve de paix, Kamal est déjà dans cette paix, il vient d’être assassiné, dès le début du roman, et c’est la descente aux enfers pour Omar, Kamal était une presque moitié. «Omar ne dormait pas : il respirait ces odeurs familières qui le déracinaient profondément pourtant. Il était comme ces légionnaires : il était venu en toute ignorance, lui aussi porté par l’admiration et l’amitié de Kamal ; il voulait être à ses côtés simplement, accompagner sa puissance et sa solitude ; ils s’étaient rencontrés dix ans plus tôt, en terre française et s’étaient liés sans mot dire ; ils se cherchaient du regard, avaient du plaisir à converser ensemble, même chichement : ils étaient heureux de manière fugace, instantanée comme s’ils avaient toujours vécu ensemble.» Omar va tenter de survivre dans une ville coupée en deux, Beyrouth Est et Beyrouth Ouest, les miliciens armés, les femmes aux décolletés plongeants qui reviennent des cabarets en dépit des bombes et des attentats, l’envie d’oublier les deuils, les phalanges, les milices, l’armée régulière. Omar qui a fui l’Algérie, chassé par l’image de son père assassiné, n’a pas fui la violence, il l’a cherché avidement en mercenaire, en garde du corps. Au Liban, son ami est assassiné, alors dans la foulée et pour l’argent il devient le garde du corps d’une fille, Esmet-Nour, une Franco-Algérienne, la fille de l’homme le plus connu du Liban, Shéhadé, un risque et un danger quotidien. Alors que l’homme attendait sa réponse, l’auteure dans une coupure salutaire reprend son haleine en faisant parler Omar, en italique dans le texte : «Je suis Omar, cette ville était mienne pareille à un labyrinthe bleu, la mer y battait comme un pouls», ces passages privilégiés, comme des voix off, celle d’Esmet, de Kamel aussi extirpent d’une lecture hallucinante, à double vitesse, permettant une petite halte. Puis entre les voix de ce trio de personnages masculins, Kamal, Omar, Shéhadé, une voix féminine prime de l’intérieur, c’est une voix «conscience» face à celles des hommes responsables de leurs propres dévastations. Sa première rencontre avec celle qu’il devra protéger, Esmet-Nour, ne lui laisse qu’une vague impression de dégoût. La fille arrogante et gâtée ne le réjouit guère. Pourtant, une nuit dans cette maison du père, véritable labyrinthe et geôles froides, Omar a le frisson, il n’aime pas cette maison obscure qui grouillent de miliciens et sent les exécutions sommaire et la torture. Or, un soir il regardait, tapie dans un coin, la fille fumer une cigarette, un instant d’abandon total. Comme il aimait être là, pensa-t-il, secrètement nourri des gestes de cette intimité qu’elle avait ce soir pour lui sans le savoir. Une révélation pour Omar qui vit dans ses yeux une douceur indicible et se rendit compte que cette femme avait quelque chose à donner, toujours à offrir. «Il était heureux d’être lové dans cette nuit pour faire ce tendre apprentissage : sentir encore et encore avec cette force inouïe qui le bouleversait, cette lointaine proximité, sans blessure aucune, sans envie sinon fugace et fuyante. Il se sentait un homme.» Cette fille va l’entraîner dans une aventure extraordinairement humaine et inattendue pour lui, risquer sa vie pour sauver des enfants. Peut-être c’est ce qu’il était venu chercher à Beyrouth ou dans ce village perdu dans la montagne Firdowsiya, sa propre âme, libérer son âme des noirceurs et des obscurités. C’est l’histoire d’héros en lambeaux, minés par les guerres et les violences, errants d’entre les morts et les inconsciences pour se trouver, la quête de la paix est dans chaque mot, chaque parole dites. Nous sommes dans les années 1970, le Liban traverse sa guerre civile, Kamal Joumblat est assassiné, l’Algérie sombrera, deux décennies plus tard, dans une effroyable guerre anonyme aussi. Le roman est structuré fondamentalement sur la quête d’Omar, Omar qui, peut-être, ne s’en sortira pas indemne d’une telle confrontation avec la réalité. L’écriture de Yamilé Ghebalou-Haraoui est d’une finesse et force qui nous rappelle Marguerite Duras bien que les comparaisons sont parfois inutiles ; il ne s’agit point de mesurer la qualité d’une œuvre mais de la situer par rapport à un environnement littéraire ou d’une approche romanesque.
Nassira Belloula
Liban de Yamilé Ghebalou-Haraoui
Editions Chihab 2009, 180 pages

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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