La préservation de la mémoire collective, les faits et les sites historiques, en plus de la sauvegarde des lieux ayant été le théâtre de batailles durant la glorieuse guerre de libération nationale et leur baptisation aux noms de grands mais méconnus moudjahidine et chouhada ont été vivement soulignés par les participants à l’assemblée générale annuelle de l’association El-Wafa pour la préservation et la commémoration des sites de guerre à Annaba.
Pourquoi se limite-t-on à certaines personnalités, les chouhada et les moudjahidine, au détriment de nombreux autres héros de la cause de la libération du pays du joug du colonialisme ? se sont interrogés certains adhérents de cette association, dont le président Lakhdar Tarbouche se déploie pour perpétuer cette mémoire et faire en sorte que chaque coin de cette région soit connu, valorisé et réhabilité.
C’est à l’occasion de cette traditionnelle assemblée générale consacrée à la présentation et à l’approbation du rapport moral de 2009 et les perspectives pour 2010 qu’un des adhérents, en l’occurrence le moudjahid Chaouli Mohamed Salah, a exprimé sa colère de voir toujours les mêmes honorés. «A croire que cette guerre n’a été menée que par une poignée de moudjahidine et de martyrs. L’Algérie fourmille de héros. Certes, ce sont de simples djounoud ou chouhada, mais leur sacrifice est tout aussi grandiose que celui des autres», a-t-il dit en faisant allusion aux traditionnelles cérémonies de baptisation ciblant généralement les mêmes noms de chouhada ou de moudjahidine à travers le pays. Il est inconcevable de continuer, cinquante ans après la guerre de libération, à faire preuve d’autant d’ingratitude envers ceux qui demeurent, aux yeux des uns et des autres, inconnus alors qu’ils ont accompli des exploits qui méritent d’être reconnus, perpétués et transmis aux générations futures, a-t-il lancé avant de citer certains de ces inconnus, restés dans l’ombre trop longtemps. «Blidi Abderrahmane, Nououiya Mohamed et pas mal d’autres héros revendiquent leur réhabilitation», a-t-il dit. Exhibant une photo souvenir, ce moudjahid a tenu à lancer cet appel afin que nul ne soit oublié.
Boudjemaa Redjem, un autre adhérent et membre de l’ONM à Oued Aneb, a, quant à lui, souligné l’importance des visites sur terrain, seules actions à ses yeux susceptibles de situer les réalités et mieux cerner les besoins et les actions à entreprendre. Aussi, a-t-il salué les efforts de cette association qui ont permis de valoriser certains d’entre eux et le carré des martyrs de Chorfa où sont enterrés une vingtaine de chouhada.
Après cette réhabilitation, les habitants de ce coin du pays sont enfin soulagés de pouvoir se recueillir à la mémoire des leurs sur place au lieu de se déplacer jusqu’à Berrahal.
L’installation d’une clôture au niveau du cimetière Abdellah-Merah, où reposent 81 chouhada, fait partie des actions inscrites pour 2010. Après l’avoir débarrassé des troupeaux de vaches venant brouter l’herbe grasse, ce cimetière classé sera mieux sécurisé une fois la clôture installée.
Autre point soulevé, celui de l’inutilité de la baptisation des établissements scolaires ou autres aux noms de chouhada et de moudjahidine du moment qu’ils continuent à conserver à ce jour leurs anciens noms. La raison invoquée, selon M. Tarbouche, est la même. Des contraintes que seuls les blocages et les lenteurs administratifs peuvent justifier.
La restauration de la stèle commémorative de Séraïdi a aussi fait l’objet de discussions. A ce sujet, le président d’El-Wafa dira que dix correspondances concernant l’action à entreprendre pour réhabiliter ce site ont été transmises au P/APC, en vain. L’intervenant a, par ailleurs, déploré l’état de vétusté et d’abandon dans lequel se trouvent les 23 lieux et centres de torture datant de l’époque coloniale, dont un, situé à El-Eulma, a été détourné de sa véritable vocation pour être exploité en salle de conférences et un autre à Oued Aneb, qui est en ruine.
Que restera-t-il aux générations montantes ? s’est-il demandé. A ce rythme, il ne leur restera plus aucun site ni aucune trace de ce que fut cette glorieuse guerre de libération nationale. D’autres questions en rapport avec les dépenses consenties durant l’exercice 2009 et les projets inscrits pour l’année 2010 ont été passées en revue par le président, qui n’a pas manqué de consacrer une partie de son intervention au défunt président Houari Boumediene. Le président de l’association El-Wafa a lancé pour conclure : «Notre histoire interpelle tout un chacun afin que nul ne soit oublié.»
Dalila S. |
3 janvier 2010
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