Au coin de la cheminée
M’hammed le fils du sultan (10e partie)
Résumé de la 9e partie :Impressionnée par la ruse de M’hammed, Flifla accepte de le laisser sortir vainqueur du combat pour que son père autorise leur mariage…
La ville fut tout de suite décorée et la fête fut grandiose. M’hammed, le fils du sultan, eut la moitié du royaume et vécut dans le château de son beau-père. Quelque temps après, il lui dit :
— Je dois prendre ma femme et rentrer dans mon pays, moi aussi, j’ai un pays à gouverner.
— Et la moitié du royaume que je t’ai offerte ?
— Je n’en ai pas besoin, ma femme me suffit.
Le lendemain, il fit monter sa femme derrière lui et rentra. Il trouva Saâd dans un piteux état, sale, maigre, la barbe jusqu’aux dents et les pieds enfoncés dans le sol. Il le salua, le fit entrer et lui permit d’aller se laver et se reposer. Flifla fut heureuse du château magnifique, des pommes odorantes et de l’oiseau chanteur. Ils vécurent un temps, heureux et paisibles.
Un jour parmi les jours, la colombe arriva et le prince écrivit : «Je vis dans un château merveilleux dans lequel il y a les pommes odorantes qui rendent l’esprit et l’âme, l’oiseau chanteur à l’aile qui répond, le sang des gazelles et Flifla, la fille du sultan des djinns, il n’y manque rien ; viens, père, le visiter.» Le sultan lut le message, s’agita et devint furieux telle une mer houleuse et dit :
— Ce fils de chien m’a surpassé ! Allez vizir, cette fois, trouve le bon conseil qui nous débarrassera définitivement de lui et qui me permettra de lui prendre son château.
— Sidi, je n’ai plus aucun conseil ! Tout ce qu’on lui demande d’impossible, il le ramène ! Sidi, je suis devant toi, à ta merci, si tu veux me tuer, n’hésite pas, mais je n’ai plus aucun conseil à te fournir !
— Bon ! C’est moi alors qui fournis le conseil : j’exige que tu ailles le voir, que tu lui crèves les yeux et que tu me ramènes un verre rempli du sang qui en aura coulé pour que je le boive.
Sidi, comment puis-je ? Il ne m’a fait aucun mal !
— C’est ainsi, sinon ta tête volera entre tes pieds !
Le vizir prépara des poissons très salés, une outre pleine d’eau et partit. En arrivant devant le château, il les cacha et frappa à la porte. Saâd vint lui ouvrir et l’accueillit fort gaiement :
— Bienvenue, Sidi le vizir ! et il appela le prince. Celui-ci accourut sans prendre le temps de se changer et l’invita à entrer, mais le vizir répondit :
— Non, non je veux d’abord faire un tour dans la forêt voisine.
— Laisse-moi le temps de me changer.
—Non, non, ce n’est pas nécessaire ! Nous n’allons pas très loin.
Ils se mirent à marcher, traversèrent la forêt, le prince se fatigua et dit :
— J’ai faim, rentrons au château !
— Non, j’ai ce qu’il faut. Puis, il lui donna les poissons salés et ils continuèrent à marcher. Plus loin, le prince, assoiffé, réclama à boire.
— Je ne te donnerai à boire que si tu me laisses t’arracher l’œil droit.
Mourant de soif, le prince se laissa faire. Le vizir lui creva l’œil et recueillit le sang dans un verre qui ne fut qu’à moitié plein puis lui donna une gorgée d’eau. Ils se remirent à marcher, quand ils furent très loin, le prince demanda :
— Vizir de mon père, j’ai soif et je suis fatigué.
Ce dernier répondit :
— Laisse-moi te crever l’autre œil et je te donnerai l’outre entière. (à suivre…)
Bochra Ben Hassen et Thierry Charnay
29 décembre 2009
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