Culture (Mardi 15 Décembre 2009)
“HISTOIRE DES IDRISSIDES”, DE RACHID BENBLAL
Intrigues au royaume berbère
Par : MUSTAPHA MOHAMMEDI
Passionné par tout ce qui touche le Maghreb, chercheur infatigable, Rachid Benblal nous invite à une somptueuse fresque avec son dernier livre Histoire des Idrissides. Une histoire captivante, rédigée avec une précision d’horloge et qui se lit d’une seule traite. Le challenge était d’autant plus difficile que l’auteur — un avocat de profession — est parti de rien, sans aucune référence, sans outil de travail.
Il lui faudra cinq ans d’investigation et de recoupement pour qu’il arrive enfin à jeter toute la lumière sur un pan du Moyen-âge très peu connu du Maroc (788 à 948).Pour écrire cette étonnante saga d’une dynastie qui assoira les bases du futur royaume dont les Alaouites son les actuels dépositaires, Rachid Benblal fera appel à l’hagiographie, à l’archéologie, aux textes anciens, à Ibn Khaldoun, aux récits des voyageurs et, bien sûr, aux historiens européens dont les textes parcimonieux ne révèlent pas grand-chose de cette époque. Dans ce récit de plus de 230 pages où l’écrivain rapporte dans les moindres détails les batailles qui ont opposé chefs et califes musulmans après la mort du prophète (QLSSSL), omeyyades et abassides, khereidjites et sunnites, le lecteur incrédule tombe des nues, de chapitre en chapitre en découvrant le marchandage de certains imams, leurs intrigues et, surtout, leur cruauté. Ainsi, par exemple, Hossein, le petit-fils du Prophète (QLSSSL), alors calife du Hedjaz et de l’Irak, sera décapité par les sbires d’Omeyya, son corps foulé par les chevaux, 87 personnes de son entourage, dont son fils aîné Ali subiront le même sort et le reste de sa famille et de ses proches envoyés en captivité en Syrie. Le Maghreb, fraîchement islamisé, n’en menait pas large lui non plus. Des hobereaux s’entretuent à longueur d’année pour un titre, pour une parcelle de royaume. Profitant des troubles d’abus et de la confusion générale, un homme, Salah Ibn Taref, d’origine juive et venu à l’islam on ne sait pas trop comment, décréta qu’il était prophète. Il codifiera sa nouvelle religion, allant jusqu’à écrire des pseudos sourat à qui il donnera le nom de perdrix, de sauterelle, du diable, de ne manger ni poule ni coq, et il demandera à ses fidèles de lécher ses crachats parce qu’ils avaient des vertus… thérapeutiques. C’est au milieu de ses bouleversement catalytiques du monde islamique, trisaïeul du prophète en droite ligne s’enfouira discrètement du Moyen-Orient, traversera l’Égypte et s’installera au Maroc où il fondra la ville de Fès. Toutes les tribus berbères lui furent allégeance et le surnommèrent Idris El Akbar. Il sera assassiné au cours de son règne et son fils Idris 2 sera proclamé roi… dans le ventre de sa mère. à noter enfin le remarquable travail de généalogie de l’auteur qui remplit ainsi un grand vide de l’histoire des peuples et de la mémoire des hommes.
15 décembre 2009
M. MOHAMMEDI