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Footeux bac

10 décembre 2009

Non classé

Footeux bac

par Abdou B.

«Le mépris des hommes est fréquent chez les politiques, mais confidentiel». A.Malraux



Un sport magnifique, fait d’esprit collectif, d’efforts continus, de travail acharné, est devenu en Algérie un acteur à part entière dans les champs politiques, de l’Education nationale et du management de la société. Si les joueurs, la FAF et l’encadrement de l’équipe nationale font leur job comme il faut pour redorer le blason du pays et remporter des victoires méritées, beaucoup de ministères ne peuvent dire ou en faire autant.

Après une série de grèves dont personne ne connaît avec précision les résultats finaux ou définitifs, les élèves, leurs parents et les enseignants continuent à naviguer à l’aveuglette. Dans des lycées d’Alger, des cours ne sont pas faits, des élèves passent le temps devant les établissements avec le désarroi des parents. Le surveillant général, le directeur du lycée, coupés des professeurs, ne sont d’aucune utilité pour personne. Toutes les grèves dans l’Education nationale sont terminées à moitié, des centaines d’heures de cours sont perdues en route, et déjà les épreuves du bac sont directement préparées en fonction de… la Coupe du monde de foot. Trois semaines de cours ont sauté. Une partie du programme a été éliminée devant de vraies difficultés, en termes de pédagogie et de volume horaire, pour la rattraper.

On passe outre, faute d’avoir su négocier avec les corps enseignants pour trouver dans des délais pertinents de bonnes solutions consensuelles. On va donc aménager des épreuves du baccalauréat en fonction des «blancs» du programme et pour permettre au plus grand nombre de… suivre des matches de la Coupe du monde.

Quelle sera la valeur de ce bac comparé à celui qui se déroulera dans les pays qualifiés en Afrique du Sud ? Sans nul doute, il sera inférieur pour envoyer des bacheliers dans des universités, qui ne seront donc pas au niveau de la compétition mondiale que se livrent des universités de grande compétitivité à travers le monde. Les discours de M. Bouteflika sur l’importance stratégique de l’enseignement, de la recherche scientifique et de la considération vitale qu’il faut avoir pour ceux qui transmettent le savoir sont ainsi réduits à néant. Tout simplement parce que l’administration refuse de les reconnaître et de négocier avec des syndicats de terrain, représentatifs d’une partie des éducateurs.

Après la Coupe du monde qui ne dure qu’une poignée de semaines, on tournera la page sans évaluer les dégâts répercutés dans l’enseignement supérieur. Heureusement qu’il n’y a pas une coupe du monde chaque année en même temps que le bac en Algérie, avec une qualification assurée pour l’équipe nationale! Si un signal fort a été donné par la société en brassant tous les âges, conditions sociales et statuts confondus après la victoire algérienne sur l’Egypte, rien ne prouve qu’il a été entendu et décodé, du moins jusqu’à présent, par les décideurs du pays. Les paramètres identitaires, le spectre de l’appartenance de l’Etat-nation, la relation de l’Algérie avec le reste du monde n’ont donné lieu à aucune réflexion, ni du côté de la majorité présidentielle ni de la part des oppositions. Ces dernières, devant les résultats convenus de la dite tripartite, de l’hystérie officielle égyptienne, de l’installation de la commission interministérielle pour la PME/PMI, gardent une réserve, sinon un silence révélateur du marasme que connaissent tous les appareils partisans. Ces derniers, tous, sont dépassés par la vitalité inventive de la société, des syndicats autonomes qui animent une série de corps de métiers. La grippe porcine, pour les officiels, les citoyens absents de tous les débats et pour l’opposition, est une affaire banale, anecdotique, à la limite exclusive à «l’Occident mécréant». L’immunité devant cette pandémie, prise au sérieux dans les grands pays développés, semble être un privilège «divin», diffus, au vu de l’absence de communication, comme c’est le cas du sida qui ne devient une menace qu’une fois par an, à l’occasion de sa journée mondiale.

Des chercheurs et experts nationaux, dans la presse privée, ont délivré des analyses et des commentaires d’une grande richesse à même d’éclairer les décideurs et les formations politiques. L’irruption de la société, de la majorité des jeunes après le match Egypte-Algérie, la situation économique, sanitaire, universitaire, l’émigration et la harga, la mixité, la religiosité ambiante et son utilisation politique, toutes ces problématiques et tant d’autres sont chaque jour décortiquées par les élites nationales. Celles-ci sont-elles écoutées, consultées par les partis, les parlementaires (occupés par leurs salaire, retraite et privilèges), par le gouvernement? Rien n’est moins sûr. Les mêmes clientèles, les mêmes mécanismes et processus de nomination d’avant la chute du mur sont reconduits systématiquement. «Vous avez les journaux privés, nous avons le pouvoir et les médias lourds», semblent répondre avec une belle discipline tous les gouvernants et leur périphérie.

Il y a l’Algérie, bien sûr, mais il y a aussi le monde dans lequel les élites et les jeunes veulent faire entendre leur voix, leur génie créateur. Ghaza, les minarets en Suisse, la guerre idéologique et sociale menée par l’Europe contre l’émigration et les musulmans, la Palestine définitivement livrée à Israël, les changements climatiques ne disent strictement rien aux formations politiques en Algérie.

Lorsqu’une majorité composite n’a aucune identité sur ces questions, n’a aucun point de vue argumenté, comment stigmatiser des jeunes fans de l’émeute et leur reprocher d’avoir perdu la boussole ?

Le quotidien d’Oran

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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2 Réponses à “Footeux bac”

  1. mimouna Dit :

    Pause-Café : Pause-Café
    Et pourtant, ils ne parlent pas arabe !

    Le dernier succès des Verts a mis à nu la faiblesse criante du football national dans la mesure où cette équipe gagnante était formée essentiellement de joueurs nés et entraînés en France ! Cela relativise un peu ce succès et montre tout le chemin que nous devons parcourir avant d’avoir un championnat national de football digne de ce nom, capable de donner des joueurs de qualité, aptes physiquement et tactiquement.
    Mais en même temps, ce succès montre qu’il faut arrêter de marginaliser les binationaux qui, dans la majorité des cas et lorsque toutes les conditions leur sont offertes, choisissent l’Algérie. Comme quoi, on peut avoir deux passeports, ne pas parler un traître mot d’arabe et porter l’Algérie dans son cœur ! Des Meghni et des Yebda, il en existe aussi dans les sciences, les technologies, les arts, etc.
    Pour qu’ils réalisent les mêmes exploits dans leurs domaines respectifs, il leur manque juste un Saâdane et une réelle volonté politique capable de faire des miracles ! Comme organiser un pont aérien entre Alger et Khartoum en quelques heures !
    farahmaamar@ymail.com
    «Si ce que tu as à dire est moins beau que le silence, alors tais-toi !»
    Proverbe arabe

  2. mimouna Dit :

    A chaque insulte et invective égyptiennes, plus grossières les unes que les autres, on essaie de se défendre en Algérie en mettant en avant l’arabité et l’islamité des Algériens ou en pratiquant la politique de l’autruche. Comme si les Algériens avaient besoin de se justifier en permanence devant un pays qui souffre de maux sociaux et politiques au moins aussi terribles que ceux dont souffre le nôtre.
    En témoigne le récent rapport rédigé par l’Institut du Caire pour l’étude des droits de l’homme, qui situe l’Egypte «en tête de la liste des pays (arabes) où la torture est pratiquée de manière systématique et routinière». Autrement dit, l’image positive de l’Egypte que les tenants algériens de l’araboconservatisme donnent en exemple est radicalement différente de la réalité dévoilée par l’Institut du Caire. Et se justifier par rapport à quoi quand on sait que l’histoire de l’Algérie est aussi riche que l’est celle de l’Egypte ? Mais encore faudrait-il l’enseigner à nos enfants qui ignorent par exemple que leur pays a enfanté Saint Augustin. En effet, alors que le peuple égyptien est fier de son passé pharaonique, en Algérie, tout est fait pour minimiser le passé berbère, punique, romain, comme si celui-ci ne faisait pas partie de notre identité et appartenait à un autre pays. Ainsi nos enfants savent-ils qui sont les Circoncelions, ces damnés de la terre avant l’heure, qui terrorisaient les riches fermiers romains dans l’Algérie antique ? Et que connaissent-ils de Massinissa à part des bribes, enseignées à la va-vite, histoire de satisfaire quelques berbéristes grincheux. De façon générale, le passé antique (et même islamique) de l’Algérie n’est ni entretenu ni valorisé. Il suffit de voir l’état d’abandon dans lequel se trouvent de nombreux vestiges antiques et partant l’état de la recherche archéologique algérienne. Voulant être plus Arabes que les Arabes, souffrant d’un complexe nourri par une idéologie islamo-conservatrice importée – oui importée car étrangère à nos valeurs et à notre passé –, la plupart des gouvernements qui se sont succédé depuis 1979 ont tout fait pour tirer l’Algérie vers le bas afin qu’elle soit à l’image de ces pays arabes, inféodés à l’Occident capitaliste. De ce fait, ceux qui appellent à tourner la page – alors que l’Egypte officielle exige des excuses pour je ne sais quel crime de lèse-majesté – craignent sans doute de voir s’effondrer leur rêve d’une Algérie assujettie politiquement et idéologiquement à l’islamoconservatisme. Ces gens se sont disqualifiés par leur absence de réaction quand l’emblème national a été brûlé par des avocats égyptiens et non par des «moins que rien», quand les médias, des pseudo-intellectuels, des journalistes, des artistes égyptiens ainsi que des prédicateurs connus d’El-Azhar insultaient sur les chaînes égyptiennes le passé et les symboles de l’Algérie. Reste, qu’aussi puissant qu’ils soient au pays de Moubarak, ces faiseurs d’opinion égyptiens qui font montre de xénophobie à l’égard de l’Algérie ne doivent pas nous entraîner dans un anti-égyptianisme à rebours et contre-productif. L’Egypte à laquelle je pense ne se réduit ni à ces gens, ni aux Moubarak père et fils et leur régime, ni aux séries à l’eau de rose égyptiennes, ni aux thuriféraires d’Oum Dounia, et encore moins aux Frères musulmans et aux prédicateurs d’El-Azhar qui soutenaient et justifiaient par leurs prêches et leurs fatwas le terrorisme de l’AIS et du GIA. L’Egypte à laquelle je pense est celle portée par les poèmes et le combat de Ahmed Fouad Negm, de Cheikh Imam, par les idées de l’économiste engagé Samir Amin, par cette société civile qui se bat pour la démocratie et le pluralisme au pays de Cléopâtre. Pour résumer, ce match de football entre l’Algérie et l’Egypte aura tout de même eu le mérite de déchirer le voile d’hypocrisie entourant les rapports algéro-égyptiens tels qu’établis depuis des décennies. Il va peut-être permettre aux Algériens d’être eux-mêmes, de se regarder en face, d’être fiers de ce qu’ils sont, de cette algérianité pour laquelle Mustapha Lacheraf a tant lutté et, partant, de nouer des rapports avec l’Egypte des droits de l’Homme, de la démocratie et du progrès social.
    H. Z.
    Bonne lécture

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