Le conte au Maghreb par Nora Aceval
« Il n’y a pas si longtemps, en Afrique du Nord, le conte avait une place très importante, comme un acte social qui servait à éduquer les enfants et aussi les plus grands. Aujourd’hui, la tradition se perd à cause de la télévision et du modernisme, mais il y a encore beaucoup de grand-mères qui détiennent des répertoires très importants. J’ai moi-même collecté tout mon répertoire de cette littérature orale. »
« Les styles de contes varient selon la personne qui les raconte. La mère de famille va privilégier les histoires longues de type merveilleux avec des ogres et des princesses. L’homme va favoriser les contes courts, philosophiques et versifiés. D’autres conteurs se produisent dans les souks avec des musiciens et chantent les épopées religieuses ainsi que des histoires inventées, critiques de la société et de la politique. Ce sont des conteurs libres, payés par le public comme il y a des millénaires. »
« Les contes sont de tradition rurale, mais on retrouve aussi des contes citadins, reconnaissables par leurs longues descriptions, leur vocabulaire plus châtié, comme ceux des ‘Mille et une nuits’ ».
« Au Maghreb, les contes peuvent revêtir différentes formes. Il y a les contes chantés, les comptines pour enfants, les contes grivois et licencieux où les femmes se moquent un peu des hommes, où elles envoient des messages de protestation. Les femmes se les racontent, mais ils sont souvent destinés aux oreilles masculines. C’est à croire qu’ils arrivent souvent à destination puisque des hommes m’en ont raconté. Mais il m’a fallu presque vingt ans de collecte et de confiance pour qu’enfin ils me narrent ces contes grivois, où souvent ils passent pour des cocus quand ils sont jaloux! »
Nora Aceval, conteuse traditionnelle, est née à Tousnina, sur les hauts plateaux de Tiaret, dans le sud-ouest algérien. Son enfance a été bercée par les contes populaires que disaient les femmes de sa tribu des Ouled Sidi Khaled.
http://toukimontreal.com/actualites/2009/10/17/l%E2%80%99afrique-au-bout-du-conte/
24 octobre 2009
Nora Aceval